Jack Nicholson
Nicholson, elle était célèbre dans la famille pour ses capacités à dominer les hommes. « Son mari était peintre en bâtiment, commente ironiquement un proche, mais il la laissait, elle, peindre leur maison, à eux. »
À ce moment-là, la maison des Wilkinson Reed se trouvait au beau milieu d’un paysage rustique. On disait que les toutes proches Sand Hills étaient à une époque situées au bord de l’océan, et les enfants biologiques et adoptifs d’Emma Wilkinson Reed allaient chercher des coquillages très loin dans les terres pour essayer de prouver cette théorie. La vie n’était pas toujours facile, mais les enfants s’amusaient bien, surtout l’été, et Tante Emma leur donnait beaucoup d’amour.
Ethel May devint une jolie brune mince de taille moyenne et développa une personnalité douce. Brillante et dotée de talents artistiques, elle était douée pour la couture, et, dès l’adolescence, s’intéressait beaucoup aux vêtements et aux chapeaux. Elle créait des oreillers fantaisie et décorait des abat-jour. Et elle avait aussi un certain don pour la peinture à l’huile.
Bien que William Rhoads, le père d’Ethel May, se fût installé tout près, à Point Pleasant, il tendait à négliger sa fille. Rhoads était un homme important et pressé depuis qu’il était devenu président de la Taylor Metal Co., et, tout comme son propre père, homme politique (en tant que conseiller de district). Lorsqu’il se fut remarié, il prêta encore moins d’attention à sa fille, pourtant inscrite à un lycée situé à quelques kilomètres de chez lui.
Ethel May se montra studieuse, et, à l’âge de 20 ans, en juin 1918, obtint son diplôme à la Neptune High School. Son père fut sans doute l’un des derniers membres de la famille à apprendre qu’elle entretenait une liaison amoureuse avec un camarade de classe nommé John J. Nicholson. Âgé de deux ans de moins qu’Ethel May, John J. vivait avec sa mère au 1601 Monroe Street, à quelques maisons de celle de Tante Emma, dans le même secteur.
Deux mois à peine après avoir reçu son diplôme, le 4 août 1918, Ethel May épousa John J. au cours d’une cérémonie catholique qui eut lieu à la Holy Spirit Church. Les témoins étaient la cousine d’Ethel May, Bella – la fille de Tante Emma – et son mari, Calvin Williams.
Aucun signe ne laisse penser que William Rhoads ait assisté à la cérémonie. En revanche, tout semble indiquer que l’annonce de ce mariage l’ait rendu furieux. On dit dans la famille qu’il devint fou de rage lorsqu’il apprit que John J. était un catholique irlandais, lui-même étant un méthodiste de Pennsylvanie « pur jus » (selon l’expression de Jack), qui, à Chester, avait été élevé dans un quartier où vivaient beaucoup de catholiques irlandais, ce qui avait enraciné en lui des préjugés qu’il allait obstinément garder tout au long de sa vie.
La cérémonie catholique aurait suffi à déclencher la colère de William, mais il y avait « pire » encore : sa fille était enceinte au moment où elle se dirigeait vers l’autel.
À cette époque où l’on n’acceptait pas encore les mères célibataires, quand un bébé apparaissait dans les bras d’un couple de jeunes mariés, les langues de vipère prenaient un malin plaisir à compter le nombre de mois qui séparaient la naissance du mariage. Ethel et John J. allèrent donc rechercher l’anonymat à Pittsfield, dans le Massachusetts, laissant ainsi Neptune sans aucun sujet de discussion.
June Frances Nicholson vint au monde trois mois après le mariage Rhoads-Nicholson, le 5 novembre 1918, à Pittsfield. D’après l’annuaire de la ville, John J. était « fabricant de fenêtres », et, pendant quelques mois, lui et sa femme vécurent là où les membres de la famille Nicholson étaient disposés à les aider.
Un an après la naissance de June, William J. Rhoads modifia son testament. Le père d’Ethel May connut une mort soudaine et violente au cours de l’été 1935. Alors qu’il nageait dans le canal reliant la Manasquan River à la baie de Barnegat, il eut les mains atrocement mutilées par un hors-bord. Son testament révéla qu’il avait tout laissé à sa seconde femme et qu’il avait officiellement déshérité Ethel May. Ainsi, Ethel May dut traverser la vie sans père ni mère. Et elle ne fut ni la première ni la dernière Nicholson à devoir porter ce fardeau.
John J. Nicholson avait lui
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