Jack Nicholson

mérites des stupéfiants. Leurs remontrances privées renforçaient la pression publique qui pesait sur Nicholson.
    L’étalage de drogue fit place à la réserve et au déni. Les immenses soirées grouillantes d’invités qui se tenaient chez Nicholson cessèrent après l’arrestation de Polanski. Les rassemblements étaient désormais moins importants, les invités triés sur le volet.
    Le sujet de la drogue fut mis en veilleuse lors des interviews. Il y eut moins d’interviews, plus de règles énoncées sur les questions qui pouvaient être posées.
    Il était temps de calmer le jeu, de se faire un peu oublier.
    Quasiment le soir même de l’arrestation de Polanski, au printemps 1977, Nicholson laissa tomber Moon Trap pour focaliser son attention sur un autre western Goin ’ South, ou En route vers le sud. Si les studios n’avaient pas laissé Jack réaliser son western expérimental, ils l’autorisèrent en revanche à faire ce western plus gai, qui semblait en être l’antithèse : tout en polissonneries et en chatouilles. Jack abandonna également son idée de ne pas jouer dans le film qu’il mettrait en scène. United Artists promit immédiatement un budget provisoire de 6 millions de dollars.
    Le premier rôle, celui d’un minable voleur de chevaux gracié devant la potence grâce à un mariage blanc, semblait offrir à Nicholson « un boulevard, ou pour utiliser une métaphore du baseball, une power alley  », d’après les mots du coproducteur, Gittes. Et Nicholson pouvait mettre en scène le plaisant En route vers le sud les yeux fermés.
    En réalité, ce script écrit par le vieil ami de Nicholson John Herman Shaner et son co-scénariste Al Ramrus traînait dans les parages depuis plusieurs années. Rédigé quelques années après Easy Rider, En route vers le sud avait été présenté à Nicholson mais avait rapidement rejoint le lot des scripts qui ne semblaient pas pouvoir atteindre le premier rang. « Il aimait le rôle parce qu’inconsciemment, on l’avait peut-être écrit pour lui », dit Shaner. Mais Nicholson était toujours occupé par des choses plus importantes.
    L’associé de Gittes, Don Devlin, dont l’amitié avec Shaner s’était quelque peu tarie du fait de désaccords politiques et de rivalités vis-à-vis de Jack, avait toujours voté contre En route vers le sud. Par ailleurs, l’offre d’option, quand elle fut enfin formulée, ne dépassa pas la somme peu généreuse de 500 dollars. Et quand Gittes et Harold Schneider s’embarquèrent dans le projet, ils demandèrent une réécriture complète. Jack se rangea à l’avis de sa nouvelle équipe de production.
    Shaner et Ramrus firent du mieux qu’ils purent, corrigèrent et modifièrent le script, mais les producteurs ne cessaient de demander des changements. Ils reprochèrent aux scénaristes leur piètre sens de l’humour. Finalement, de façon brutale, les créateurs de En route vers le sud furent congédiés – nouvel exemple de la façon dont Nicholson pouvait rejoindre la tradition hollywoodienne qui voulait que l’on piétine le scénariste, qui était dans ce cas précis l’un de ses plus vieux amis. Une fois de plus, c’était Nicholson qui définissait les règles de la loyauté, de même que les personnes et les circonstances qui lui permettaient de les appliquer.
    « J’ai été choqué et très contrarié, mais je sais que c’est comme ça, les affaires », dit Shaner. Une autre équipe, constituée de Charles Shyer et Al Mandel, fut appelée à réécrire le script et à être créditée à l’écran. L’aspect comique fut renforcé.
    On fit les recherches habituelles pour trouver l’actrice qui incarnerait le mieux la vieille fille qui sauve le voleur de chevaux minable pour la seule et unique raison qu’elle souhaite qu’il l’aide à exploiter en secret une mine d’or. Une fois de plus, on contacta Jane Fonda (Nicholson avait très envie de donner la réplique à la sœur de Peter Fonda), mais cette dernière venait de jouer dans Cat Ballou et n’avait pas envie de se répéter en faisant un autre western comique. Nicholson eut un entretien avec une petite nouvelle, Jessica Lange, et envisagea de donner le rôle à une autre actrice dont la carrière dans le cinéma était en plein essor, Meryl Streep.
    D’après les articles de journaux de l’époque, alors que Nicholson se trouvait dans un bureau du gratte-ciel de Gulf+Western et contemplait Central Park par la