Jack Nicholson
défaite étant liée à son biopic de Howard Hughes, Aviator, qui avait gagné dans cinq des onze catégories pour lesquelles il avait été nominé, mais pas dans celle du meilleur réalisateur lix (DiCaprio était également passé à côté de l’Oscar du meilleur acteur). Scorsese espérait que ce retour à sa spécialité, le cinéma policier violent – avec la magie de Nicholson – lui permettrait enfin de décrocher la récompense tant attendue.
Nicholson, visant l’universel plutôt que le particulier, ne fit aucune recherche sur le véritable Whitey Bulger. Il arbora une barbe de trois jours et afficha une garde-robe aussi extravagante que son interprétation. La star et le réalisateur eurent des « discussions constructives » durant les six ou sept semaines de tournage, souvent « en dehors de la journée de travail », et il y eut pour les scènes de Nicholson, d’après le principal intéressé, beaucoup de « réécritures de dernière minute ». La rumeur disait que Nicholson faisait prendre à ses scènes d’étranges directions dans lesquelles Scorsese se laissait entraîner. Nicholson recherchait toujours les comportements extrêmes qui laissaient les spectateurs – et parfois les autres acteurs – bouche bée.
« En avez-vous écrit une grande partie ? » demanda plus tard sans ambages Peter Bogdanovich à la star. « Eh bien, je ne sais pas comment dire ça, répliqua Jack. Je préfère ne pas répondre. »
« Davantage de Jack », c’était des poignées de cocaïne. Des méditations crues sur le sexe. Un peu d’opéra, un peu de pornographie. Un gode-ceinture et une séance à trois. Des jurons obscènes (une vieille spécialité de Jack). Et un nombre de cadavres qui évoquait un bain de sang orgiaque.
Nicholson déclara à Bogdanovich après le tournage que Scorsese s’était comporté de façon « très décontractée, très libre » avec lui. « Enfin, je veux dire qu’on a fait quelques petits trucs pas courants. » Sur l’air de Gimme Shelter des Rolling Stones, la chanson d’ouverture, Les Infiltrés fit sa sortie mondiale en octobre 2006. De nombreux critiques trouvèrent que Scorsese avait réalisé l’un de ses excellents films de style. Les dialogues de William Monahan étaient empreints d’authenticité. L’étonnante photographie de Michael Ballhaus et le montage énergique de Thelma Schoonmaker, collaborateurs de longue date de Scorsese, étaient en harmonie avec les excellentes prestations de l’ensemble lx .
Beaucoup se plaignirent de l’excessive violence du film, mais la seule note de controverse fut engendrée par la prestation survoltée de Jack. Donnant l’impression qu’ils avaient discuté du sujet devant un café, Todd McCarthy de Variety et Kenneth Turan du Los Angeles Times, les deux plus puissants critiques hollywoodiens du camp de Nicholson, condamnèrent la star à l’aide d’éloges feints. « À certains moments, il (Nicholson) est en plein dans le mille, écrivit McCarthy, tandis qu’à d’autres, il décolle dans des sphères inexplorées que le réalisateur peine à cadrer. » Turan acquiesçait : « Il y a les moments où Nicholson semble très juste, et ils sont nombreux, et puis il y a ceux où sa prestation paraît beaucoup plus débridée qu’elle ne devrait l’être. »
Ces critiques, qui eurent un écho national, anéantirent pour Nicholson toute chance de recevoir sa neuvième nomination à l’Oscar du meilleur acteur. Mark Whalberg était le seul membre du casting qui avait été nominé – dans la catégorie meilleur acteur dans un second rôle –, mais il repartit chez lui les mains vides après la cérémonie des Oscars, le 25 février 2007. Les Infiltrés remporta quatre grands Oscars, celui de meilleur montage, script, film, et enfin, pour Scorsese, celui du meilleur réalisateur. Nicholson co-présenta la récompense du meilleur film avec Diane Keaton, qui mit son bras autour de ses épaules en un geste de consolation. Comme c’était généralement le cas ces derniers temps, Les Infiltrés était un film qui n’aurait pas existé si Jack n’avait pas été son cœur. Le film avait été conçu autour de son personnage, de sa personnalité ; l’action rythmée et les autres prestations maîtrisées avaient besoin de Jack le fou. Scorsese le savait, et, sur scène, il remercia Jack de son « courage et son inspiration ». L’acteur quitta la scène le sourire aux
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