Jack Nicholson
Jack) dans Cinq pièces faciles :
Bobby (Nicholson) : Vous avez du pain et un grille-pain, n’est-ce pas ?
La serveuse : Ce n’est pas moi qui édicte les règles.
Bobby : OK, je vais essayer de rendre les choses aussi simples que possible. Je voudrais une omelette, nature, et un sandwich poulet crudités au pain blanc grillé – sans mayonnaise, sans beurre et sans salade – et une tasse de café.
La serveuse : Table 2, un sandwich poulet crudités. Retirer le beurre, la salade et la mayo – et un café. Ce sera tout ?
Bobby : Ouais. Maintenant, la seule chose que vous avez à faire, c’est de retirer le poulet, de m’apporter les toasts, de me donner l’addition pour un sandwich poulet crudités, et vous n’aurez pas dérogé aux règles.
La serveuse : Vous voulez que je retire le poulet, c’est ça ?
Bobby : Je veux que vous vous le colliez entre les genoux.
(Bobby balaie de la main tout ce qui se trouve sur la table et sort du café furieux.)
Il se peut que Jack ait réellement mis un coup de pied dans la desserte. Ou bien qu’il ne l’ait pas fait. Il s’agit là de l’une de ces légendes – comme les ennuis dans lesquels Jack se serait mis à l’époque de la Manasquan High School – qui se pare de détails différents selon la bouche qui les raconte.
Plus le cercle des amis de Jack s’élargissait, plus il y avait de fêtes et de maisons où les gens se rassemblaient. Des fêtes innocentes en cette fin des années 1950, qui avaient généralement lieu dans des maisons ou appartements du centre de Hollywood.
Les convives passaient leur soirée à se tirer les cartes ou à écouter Odetta. Ou bien encore à jouer au Monopoly ; Jack et ses amis adoraient utiliser les faux billets du Monopoly, en rêvant du jour où ils pourraient jouer pour de vrai. Il y avait toujours un pichet de vin bon marché, mais personne ne se souvient de Jack comme d’un grand buveur. Il ne tenait pas l’alcool et avait tendance à perdre connaissance.
Parmi les étapes obligatoires, il y avait la maison de Samson DeBrier, une personnalité du milieu de l’art et du spectacle hollywoodiens, qui, lorsqu’il était très jeune, avait joué dans le film muet Salomé, avec Nazimova. Homme voluptueux, DeBrier était, d’après Nicholson, « un sorcier (…), l’un des grands puries xiii de Hollywood- L.A. » et son salon artistico-littéraire semblait « parfaitement représenter la culture de L.A. ».
DeBrier se vantait d’avoir été ami avec Gertrude Stein et d’avoir eu une liaison avec André Gide à Paris dans les années 1920. Il organisait de grandes fêtes ouvertes à tous dans sa petite maison à pignon de la Barton Avenue à Hollywood. Il y avait dans cette demeure une collection de souvenirs, mais aussi une collection d’œuvres d’art et de livres provocateurs, ainsi qu’un lit en forme de dragon chinois. Les lieux avaient servi de décor à Inauguration of the Pleasure Dome de Kenneth Anger, un film d’avant-garde de 1954 avec Anaïs Nin.
Des gens de tous les horizons se retrouvaient chez DeBrier, du compositeur Igor Stravinsky au jeune réalisateur Stanley Kubrick. La légende disait qu’avant sa mort, en septembre 1955, James Dean était venu chez DeBrier au bras de Maila Nurmi, la première Vampira de la télévision, une personnalité culte de Los Angeles qui suscitait l’émoi partout où elle allait, avec ses cheveux de sorcière, ses ongles rouges et son costume de veuve noire au très large décolleté.
À l’instar du Ring, la maison de DeBrier était ouverte aux inconnus qui pouvaient prétendre au statut de « gens intéressants ».
Certaines sources affirment que Jack aurait commencé à fréquenter la demeure de DeBrier au printemps 1955, et qu’il y aurait rencontré James Dean, plusieurs mois avant sa mort, qui l’aurait « snobé ». Bien que peu probable (Nicholson n’avait à cette époque aucun film à son actif ; le mot « snobé » paraît donc un peu fort), cette rencontre n’en demeure pas moins impossible.
Interrogé pour les besoins de cet ouvrage, DeBrier affirme n’avoir aucun souvenir d’avoir vu Dean et Nicholson ensemble dans sa maison, mais dit aimer l’idée que les deux légendes du cinéma aient pu voir leurs chemins se croiser chez lui. DeBrier garde un très bon souvenir de Nicholson. « Jack était toujours souriant et agréable, dit-il, mais je n’aurais jamais imaginé qu’il deviendrait l’un des
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