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Jacques Cartier

Jacques Cartier

Titel: Jacques Cartier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Henri-Emile Chevalier
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d'être confinée à la maison. Elle voulait le voir. Sa volonté était un ordre impérieux. En cachette, Manon, la vieille nourrice, se chargea de la commission.
Et, le 4 septembre suivant, entre dix et onze heures du soir, par de profondes ténèbres, Constance, sa lumière éteinte, attachait au pilastre perpendiculaire qui séparait en deux compartiments la fenêtre de sa chambre, une échelle de soie.
La chambre était au premier étage ; la fenêtre donnait sur la petite place, devant la douve du château.

CHAPITRE VI. LE TÊTE-A-TÊTE.
    L'air était calme. Il faisait une chaleur lourde, énervante. Point d'étoiles au ciel. Un manteau d'ébène. Quelques lueurs de phares, du côté de l'église Saint-Aaron et au donjon du château, seules, trouaient la nuit. Leur flamme vive, mais nette, sans épanouissement, la rendait plus noire encore.
Au pied des fortifications, la mer gémissait son long et solennel gémissement, que venait parfois déchirer une dissonance lugubre. C'était l'aboiement si lamentable d'un chien enfermé dans une cour. Paisible, d'ailleurs, paraissait la ville. Le sommeil y avait suspendu les agitations du jour.
Constance s'accouda à l'appui de la fenêtre, et, attentive, écouta. Bientôt, un pas furtif, imperceptible à tout autre qu'à une oreille aiguisée par l'amour, se fit entendre près de Saint-Thomas. Le coeur de Constance battit plus fort. Ses yeux se fixèrent dans la direction du son et fouillèrent l'ombre.
Une forme flottante s'estompe dans les ténèbres. Elle en brise l'unité. Elle s'avance. Elle est silhouette. Constance respire à peine. Sa main se pose sur son sein pour en comprimer les battements.
La silhouette s'arrête sous la fenêtre. Aussi légère que le frou-frou d'une aile d'oiseau, une tousserie part d'en-bas. Semblable note lui répond d'en haut. Ces signaux ont confirmé la divination de deux âmes. Constance est dans les bras de Georges.
Les questions jaillissent, se pressent, se multiplient encore, se contredisent, à travers l'effeuillement de mille baisers.
—Pas si haut ! pas si haut, Georges ! Ma mère repose dans la pièce voisine... dit tout à coup la jeune fille.
—Que m'importe ! Enfin ! je te retrouve ! Ah ! si tu savais ! si tu savais.
    Constance ! Mais oublions cela... oui, oublions, n'est-ce pas ?... Oublions les heures mauvaises... Mais on dirait que tu as peur de moi... Pourquoi t'éloigner ainsi... Méchante !...
—Asseyez-vous, Georges, balbutia-t-elle, troublée, palpitante, et, en se dérobant à ces dangereuses ivresses ; asseyez-vous, mon bien-aimé... Je vous en prie... Voudriez-vous me faire de la peine ? Je suis souffrante, très-souffrante encore... ne l'oubliez pas. Sans cela, je ne vous eusse point fait venir ici...
—Oh ! Constance...
—De grâce, laissez-moi parler ! Ah ! vous êtes gentil ! vous voici assis !
—Eh bien ! approche, approche tout près... et je t'écouterai...
—Non, messire, non. Je vais me placer vis à vis de vous, à la fenêtre...
Alors, je m'établis à tes pieds...
—Non...
—Je proteste, commença le jeune homme en faisant un mouvement vers Constance...
—Ah ! dit celle-ci mélancoliquement, vous avez envie de m'affliger. Faut-il que déjà j'aie à me repentir de ma confiance en vous ?
—Je jure...
—Asseyez-vous, je le répète, messire Georges, ou je vous quitte...
—Que votre volonté soit faite ! fit-il d'un ton piqué.
Cependant il obéit. Mais si la chambre eût été éclairée, on eût pu voir Un sourire ironique plisser le coin de sa bouche.
—Ah ! vous êtes bon ; je vous aime ainsi ! reprit Constance d'une voix pénétrée.
En prononçant ces mots, elle lui tendit une main, que Georges s'empressa de porter à ses lèvres.
Leurs yeux s'habituaient à l'obscurité.
    Si les traits du visage leur échappaient, le miroitement de la fenêtre permettait au moins de distinguer les gestes.
—Que de choses j'ai à vous dire, mon doux ! continua Constance. Mais, d'abord, répondez franchement à mes demandes. Le voulez-vous ?
—C'est donc bien grave ! dit-il en badinant.
—Vous en pourrez juger, repartit la jeune fille avec un accent sérieux.
Puis, elle voulut retirer sa main. Mais, suivant, la coutume des Bretons amoureux, Georges de Maisonneuve saisit le petit doigt de cette main avec le sien, et lui en fit un anneau.
Constance poursuivit :
—Vous m'avez écrit que, grièvement blessé, en même temps que moi, vous étiez resté près de quatre mois

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