Je suis né un jour bleu
esthétique : certains mots et certaines combinaisons de mots
m’apparaissent comme particulièrement beaux et me stimulent. Parfois, je vais
lire et relire une phrase dans un livre parce que ces mots-là me font éprouver
des émotions très particulières. Les substantifs sont mes mots préférés parce
qu’ils sont les plus faciles à visualiser.
Quand j’apprends une langue, il est un
certain nombre d’outils que je considère comme essentiels pour commencer. Premièrement,
un dictionnaire de bonne taille. J’ai également besoin d’exemples de textes variés
de cette langue, comme des livres d’enfants, des nouvelles et des articles de
journaux parce que je préfère apprendre les mots à l’intérieur des phrases :
cela m’aide à sentir comment la langue fonctionne. J’ai une excellente mémoire
visuelle et quand je lis un mot, dans une phrase ou un paragraphe, je ferme les
yeux, je le visualise dans ma tête et je peux ensuite m’en souvenir
parfaitement. Ma mémoire est bien plus médiocre si je ne fais qu’entendre le
mot et que je ne le vois pas. La conversation me permet d’améliorer mon accent,
ma prononciation et ma compréhension. Faire des fautes ne me gêne pas, mais j’essaye
très fort de ne pas les répéter une fois qu’on me les a fait remarquer.
Chaque langue peut être le marchepied d’une
autre. Plus une personne connaît de langues, plus elle peut en apprendre de
nouvelles facilement. C’est parce que les langues sont comme les gens : elles
appartiennent à des « familles » de langues proches qui partagent des
traits communs. Les langues exercent aussi une influence les unes sur les
autres et s’empruntent mutuellement des mots. Avant même de commencer à étudier
le roumain, je pouvais parfaitement comprendre la phrase : Unde este un
creion galben ? (Où est-ce qu’il y a un crayon jaune ?) à cause
de ses similitudes avec l’espagnol : dónde está (où est-ce ?),
le français : un crayon , et l’allemand : gelb (jaune).
Il y a également des relations entre les
mots à l’intérieur même de chaque langue, relations particulières à celle-ci. Par
exemple, l’islandais emploie bor ð (table)
et bor ð a (manger) ;
le français emploie jour et journal ; l’allemand Hand (la main) et Handel (un commerce ou un artisanat).
Apprendre des mots composés est une
solution pour enrichir son vocabulaire et comprendre la grammaire d’une langue.
Par exemple, le mot allemand pour « vocabulaire » — Wortschatz – se compose de Wort (mot) et Schatz (trésor). En
finlandais, des mots composés peuvent correspondre à des phrases entières dans
d’autres langues. Par exemple, dans la phrase : H ä n oli talossanikin (Il était, lui aussi, dans ma maison), le
dernier mot, talossanikin , est composé de quatre parties : talo (maison) + -ssa (dans) + -ni (mon) + - kin (aussi).
Pour moi certains aspects linguistiques
sont plus difficiles à assimiler que d’autres. J’ai du mal à comprendre les
mots abstraits. Pour chacun d’entre eux, j’ai une image mentale qui m’aide à
les saisir. Par exemple, le mot complexité me fait penser à une tresse
ou à une natte – des cheveux innombrables s’organisant en un grand tout
complet. Quand je lis ou quand j’entends que quelque chose est complexe, j’imagine
que cette chose possède une multitude de parties qui doivent être rassemblées
pour que le tout donne un sens. De même, le mot triomphe suscite l’image
d’un grand trophée en or, comme ceux que l’on gagne à la fin des compétitions
sportives. Si j’entends que l’élection d’un homme politique a été un « triomphe »,
je l’imagine soulevant un trophée au-dessus de sa tête, comme l’entraîneur qui
remporte la coupe d’Angleterre. En ce qui concerne le mot fragile , j’imagine
un verre. Je me représente une « paix fragile » comme une colombe de
verre. L’image m’aide à comprendre que la paix peut être détruite à tout moment.
Certaines structures de phrases peuvent
être particulièrement difficiles à analyser, comme : « Il n’est pas
inexpérimenté dans ces choses », où les deux négations (« ne … pas »,
« in- ») s’annulent. C’est beaucoup plus facile si l’on dit :
« Il a de l’expérience dans ces choses. » Un autre exemple concerne
les phrases interro-négatives. « Ne pensez-vous pas que nous devrions
partir ? » ou « Ne voudriez-vous pas une glace ? ».
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