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Jean sans peur

Jean sans peur

Titel: Jean sans peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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cri :
    – Reine ! Moi !…
    – Toi ! rugit Jean sans Peur. Et qui donc tenterait de s’y opposer si je le veux ainsi ! Je suis maître de Paris. Dans une heure, si je veux, je serai maître de l’Hôtel Saint-Pol… Et toi la maîtresse !
    – Seigneur ! cria Odette dans son cœur, mon père est frappé de la même démence que le roi ! Monseigneur, que dites-vous ! Revenez à vous !… Si on vous entendait…
    – Oui, oui ! dit Jean sans Peur, enivré, tu crains pour moi. Eh bien, je t’obéis, je ne parle plus de ces choses. Je suis à toi, à toi seule. Et si tu veux, je renonce à mon ambition même. Nous quitterons Paris, nous irons habiter mon palais de Dijon. Et là, simple duc de Bourgogne, j’oublierai en te regardant que j’ai pu prétendre à dominer le monde. Viens, partons, le bonheur s’ouvre à nous, puisque je t’aime et que tu m’aimes !
    D’une frénétique secousse, Odette s’arracha à l’étreinte qui peu à peu l’avait enlacée. D’un bond, elle se mit hors d’atteinte. Et frissonnante, frappée d’horreur, elle considéra le duc avec une si poignante douleur que l’homme, stupéfait, recula à son tour en murmurant :
    – Ne craignez rien. Je vous ai fait peur ? C’est malgré moi.
    – Qu’avez-vous dit ! murmura Odette d’une voix de terreur. Que vous m’aimez ! Vous ! Oh ! je devine quelque chose d’horrible ! Dites, parlez vite ! Quel sens donnez-vous à ce mot ?…
    – Enfer ! rugit Jean sans Peur. Et quel sens veux-tu que je lui donne ! Je t’aime comme j’ai cru aimer la reine ! Comme, jadis, j’ai cru aimer Laurence d’Ambrun et d’autres ! Je t’aime ! Ce mot dit tout. Tu es présente dans mon cœur ; je pleure, moi ! Jean sans Peur, la nuit, quand il t’appelle en vain, pleure de savoir que tu n’es pas à lui ! Mais ces mauvais rêves sont finis, puisque tu m’aimes…
    Odette, d’un mouvement d’inexprimable pudeur, couvrit son visage de ses deux mains, et murmura :
    – Allez, monseigneur. Retirez-vous. Je vous le demande en grâce. Faites que je ne vous voie plus… je mourrais de honte et de désespoir.
    – Quoi ? bégaya le duc. Que dites-vous ? Que se passe-t-il en vous ?…
    Le visage toujours couvert de ses mains, toute droite, pareille à une apparition de rêve, elle reprit :
    – Je supplierai le Dieu puissant de me laisser oublier les choses atroces que je viens d’entendre. Ah ! retirez-vous, monseigneur !
    Jean sans Peur fit un pas et gronda :
    – Damnation ! Je crois que cette petite fille se moque de moi !…
    Elle recula avec un cri, mais sans découvrir ses yeux. Et c’était épouvantable, cette volonté formelle de ne plus « voir » l’homme qui avait prononcé les « choses atroces » . Elle cria :
    – Retirez-vous ! ou je jure sur ce Dieu qui nous juge, je jure que j’appelle ! Et à tous, gentilshommes, gens d’armes, valets, je dis l’affreuse ignominie ! Je dis au risque de notre mort à tous deux, je dis qui vous êtes, qui je suis, et les hontes de vos paroles ! Allez ! Allez donc !…
    D’un bond, Jean sans Peur fut sur la jeune fille, qui poussa un grand cri et s’abattit sur les genoux. Il se pencha, et la voix rude, les yeux sanglants, gronda :
    – Tu me chasses après m’avoir affolé de ton faux amour d’enfer… C’est bien. Je m’en vais. Mais sache-le : tu seras à moi ! À mon tour de jurer ; eh bien, avant peu, tu connaîtras ma force et que nul ne résiste à Jean sans Peur ! Adieu : mais, sous peu, tu me reverras, et, quoi que tu fasses, tu seras à moi !
    Il s’en alla à grands pas, ivre d’amour et de fureur. Elle roula sur le tapis, évanouie…

XVIII – ISABEAU
    Lorsque le duc de Bourgogne fut parti, une tenture qui cachait l’entrée d’une petite salle voisine se leva, une femme entra, jeta un regard de banale pitié sur Odette, puis, s’assurant que Jean sans Peur était déjà loin et ne revenait pas, alla ouvrir les portes.
    C’était l’une des suivantes d’Odette de Champdivers, jeune et belle fille qui était tenue en particulière affection par la maîtresse de céans. Elle appela. Les femmes entrèrent et s’empressèrent autour d’Odette. Quant à la suivante, elle sortit, gagna le palais de la reine, et, sur un mot de passe qu’elle prononça, fut aussitôt introduite auprès d’Isabeau. Une demi-heure plus tard, elle se retirait, et Odette, revenue à la vie, la voyait parmi les plus

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