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Jean sans peur

Jean sans peur

Titel: Jean sans peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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pas.
    – Vous ne me suivrez pas ! cria le duc avec une violence contenue.
    Et la passion se déchaîna en lui. Mais, résolu cette fois à triompher, il garda l’attitude respectueuse qu’il avait prise dès son entrée.
    – Sorcier ! gronda-t-il en lui-même, c’est maintenant que je vais voir la puissance des paroles que tu m’as enseignées.
    – Madame, dit-il d’une voix ferme, puisque votre danger vous touche si peu, je vais vous dire, moi, qu’il me touche jusqu’au cœur…
    – Jusqu’au cœur ? balbutia Odette en joignant les mains.
    – Vous me suivrez. J’ai le droit de vous le commander. Car, écoutez : je sais qui vous êtes !…
    L’effet produit par ces paroles stupéfia et bouleversa Jean sans Peur. Odette jeta un cri, pâlit, recula, revint sur le duc, et bégaya :
    – Vous savez ce que je suis… pour vous ?… Vous le savez ?…
    – Je le sais ! dit Jean sans Peur avec une sourde terreur.
    – Il sait que je suis sa fille ! cria Odette au fond d’elle-même.
    Et elle éclata en sanglots. Immobile de stupeur, Jean sans Peur assistait à cette étrange transformation de la jeune fille. Parfois, elle levait sur lui un regard craintif. Par instant, on eût dit qu’elle voulait se jeter dans ses bras et qu’elle n’osait pas. Dans l’âme de Jean de Bourgogne, l’amour grondait :
    – Elle m’aime !… Elle est à moi !…
    Par degrés, Odette de Champdivers se calma. Elle se rapprocha encore de son père, et, la tête basse, gardant ses mains jointes dans cette attitude qui lui était si naturelle, doucement elle parla :
    – Puisque vous savez cela, je dois donc maintenant vous obéir. Tout me l’ordonne. C’est mon devoir et ma joie. Souvent, monseigneur, bien longtemps avant que je vous connusse, j’ai ardemment désiré de vous voir. Je vous attendais. Je savais qu’un jour ou l’autre vous m’apparaîtriez pour protéger ma vie et prendre sur moi les droits qui vous appartiennent… Oh ! je vous ai redouté, d’abord, et combien je m’en repens !… Moi, vous redouter ! Ah ! c’est que je ne savais pas alors… pardonnez-moi, voyez ma joie, voyez mon bonheur…
    – Que dit-elle ? murmurait Jean sans Peur. Est-ce que je deviens insensé moi-même ? Ainsi, reprit-il avec une sorte de timidité qui charma Odette, vous consentez maintenant à me suivre ?
    – Il le faut bien, dit-elle avec un sourire, puisque vous savez maintenant que vous avez le droit de me donner des ordres, et que j’ai le devoir de vous obéir !
    – Par le Dieu vivant, songea le duc, c’est bien là un prodige de sorcellerie ! Mais dussé-je encourir le risque de me trouver face à face avec Satan, il ne sera pas dit que j’aurai reculé.
    – Je vous suivrai parce que c’est mon devoir, continuait Odette. Je vous suivrai si vous m’en donnez l’ordre. Mais le roi, monseigneur… le roi…
    – Le roi ! gronda Jean sans Peur, ce n’est pas au roi qu’il faut penser, c’est à vous… et à moi, mon enfant !
    « Mon enfant ! » Le mot parut si juste, si vrai, il répondit si bien aux aspirations d’Odette que la jeune fille eut « vers le père » un mouvement non moins juste, non moins vrai…
    Et l’effroyable malentendu poursuivit son développement normal et tragique.
    À ce mouvement de pure affection, Jean sans Peur sentit sa tête s’égarer, sa pensée affolée se mit à évoluer parmi des tourbillons de passion.
    – Le roi ! murmura-t-il d’une voix ardente et bégayante, il sera sauf, si tu veux. C’est toi désormais qui donnes des ordres. Si tu veux que le roi soit respecté, je courberai toutes les têtes devant lui. Je lui rendrai sa puissance. Je… mais non ! non ! C’est de nous qu’il s’agit… C’est de toi !…
    Odette, d’abord, ne comprit pas ce bouleversement d’esprit. Étonnée plutôt qu’effrayée, elle écoutait, elle entendait, et ne saisissait pas le sens de ces paroles brûlantes. Mais Jean sans Peur, maintenant, se livrait tout entier, sans résistance, à la fièvre d’amour. Il saisit les mains de la jeune fille. Il râla :
    – Cette reine qui veut te tuer, je la tuerai, moi ! Ce roi, ce pauvre fou, puisque tu daignes le sauver, nous le ferons vivre en quelque monastère où il sera certes plus heureux qu’en ce palais. Il y aura un roi, et ce sera moi ! Il y aura une reine, et ce sera toi !
    L’épouvante, soudain, entra dans l’esprit d’Odette. Elle eut un faible

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