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Jean sans peur

Jean sans peur

Titel: Jean sans peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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roi comme pour le défendre. Gringonneur ricanait. Le roi était sombre.
    – Sire, reprit le peintre, ces ermites portent sous le froc la casaque de cuir et la dague.
    Charles se leva, la figure changée.
    – Mon capitaine des gardes ! dit-il d’une voix rauque. Gringonneur allait s’élancer.
    À ce moment, Bruscaille, rapidement, s’approcha d’Odette et, à voix basse, lui glissa ces mots :
    – C’est le chevalier de Passavant qui nous envoie ! C’était le mot d’ordre…
    Une des plus belles idées de Jean sans Peur…
    Odette était là pour protéger le roi. Odette avait déjoué déjà Tosant et Lancelot, il fallait faire d’Odette une alliée des trois nouveaux ermites. Pâle de rage et de jalousie, le duc avait indiqué à Bruscaille le nom de Passavant comme seul capable d’inspirer à Odette les confiances nécessaires.
    Or, il ne savait pas à quel point ce nom était admiré, vénéré par le formidable trio.
    Ce fut avec ferveur que Bruscaille parla de Passavant. Il y avait une telle sincérité, une telle ardeur de dévouement dans son accent que, dans l’instant même, Odette fut convaincue.
    – Sire, dit-elle d’une voix rapide et oppressée, je sais pourquoi ces hommes sont armés. Sire, je sais qu’ils sont là pour vous protéger, vous… et moi. Sire, ayez confiance. Je réponds d’eux !
    Gringonneur fut stupéfait. Mais le roi leva la main :
    – Il suffit, dit-il. Tout ce qui mérite votre confiance, mon enfant, mérite aussi la mienne. – Monsieur, dit-il au capitaine qui entrait en ce moment, veuillez donner des ordres pour que ces trois révérends soient logés dans mon palais. J’entends qu’on les respecte, et qu’ils ne manquent de rien. Comme ils semblent de joyeuse humeur, je veux qu’ils soient bien nourris, et à cet effet, on leur donnera des viandes de mes cuisines.
    Brancaillon, radieux, mit un pied en avant et dit :
    – Et les vins, Sire ?
    – Pardieu, compère, des meilleurs ! des meilleurs !
    – « Domine, salvum fac regem nostrum ! » chanta Bragaille enthousiasmé.
    – « Salvum fac bonum vinum ! » hurla Brancaillon.
    Dans les antichambres, on écoutait avec respect ces vociférations, et on se disait : « Voilà les ermites déjà à l’œuvre. Ils ne perdent pas de temps. Le roi, pour le coup, va guérir. »
    Gringonneur s’était enfoui dans un fauteuil et, avec admiration, contemplait cette scène. Odette, cependant, avait entraîné Bruscaille à part.
    – Vous l’avez vu ? demandait-elle, haletante.
    – La preuve, dit sincèrement Bruscaille, c’est que je suis vivant… Et mes compagnons aussi. Sans lui, madame, nous serions morts déjà je ne sais combien de fois.
    – Où est-il ? Que fait-il ?…
    – Ce qu’il fait ? Sûrement, il rôde autour de l’Hôtel Saint-Pol.
    – Où l’avez-vous vu ? Que vous a-t-il dit ? Parlez franchement et vous n’aurez pas à vous en repentir. Je veux tout savoir.
    La pauvre Odette espérait que Bruscaille allait lui dire : « Il m’a parlé de vous. » Mais Bruscaille, si fin qu’il fût, ne pouvait lire dans la pensée d’Odette. Il était d’ailleurs fort préoccupé, ce digne sacripant. Il se sentait sur un terrain glissant. Le moindre mot pouvait faire découvrir la fourberie. En outre, une rude bataille se livrait dans son esprit. Il se fût fait tuer pour Passavant. S’il n’obéissait pas à Jean sans Peur, il était pendu.
    – Madame, dit-il, nous avons vu le sire de Passavant il y a quelques jours. Nous allions mourir. Il nous a sauvés – sauvés de la mort la plus affreuse, ajouta-t-il en grelottant. Vous ne savez pas ce que c’est que la table de marbre. Et les escabeaux ! Dieu vous préserve de le savoir jamais, ma noble Dame. Mais enfin nous fûmes sauvés.
    – Sauvés par lui…
    – Oui, madame. Et il nous dit alors : « Vous êtes des drôles, des sacripants, des francs-bourgeois, des gens de sac et de corde… » Il nous en eût dit cent fois plus, madame, nous eussions tendu le dos. Quand il nous eut gratifié de force bourrades agrémentées de douces paroles, comme je viens de vous l’expliquer, il a ajouté : « Si vous voulez me faire plaisir, trouvez un moyen de pénétrer dans l’Hôtel Saint-Pol et d’y rester. Vous verrez le roi. Vous verrez la demoiselle de Champdivers. Vous ferez ce qu’elle vous dira de faire. Soyez bien armés pour pouvoir livrer bataille s’il le faut. »
    – Oui, murmura Odette,

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