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Julie et Salaberry

Julie et Salaberry

Titel: Julie et Salaberry Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louise Chevrier
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les fossés qu’il peut y avoir à combler dans Chambly, lança-t-elle, d’un ton qui n’admettait aucune réplique. Et que tous les esprits obscurcis verront la lumière.
    Ce fut au tour du visage du curé de changer de cou-leur. Pendant que ce dernier digérait les reproches de sa paroissienne, celle-ci demanda à Son Excellence la permission de se retirer.
    L’autorité de cette dame était telle que le gouverneur acquiesça avec grâce et la plupart des femmes présentes se préparèrent à quitter la table, croyant que madame Boileau donnait le signal de se retirer et de laisser les hommes seuls, comme le voulaient les bonnes manières.
    Julie allait faire de même, mais soudain, malgré l’épaisseur de sa robe et de ses jupons, une main ferme empoigna sa cuisse gauche sous la table.
    â€” Oh! échappa-t-elle, à la fois surprise et offusquée.
    â€” Restez encore, chère madame de Salaberry, dit Prévost. Nous n’avons pas encore eu la chance de causer et j’aimerais faire plus ample connaissance avec l’épouse du meilleur de mes officiers.
    Discrètement, Julie repoussa la main libidineuse du représentant de Sa Majesté au Canada et se leva, le visage empourpré. Ce geste ne ressemblait en rien à l’hommage d’un homme pour une femme, et le mépris qu’il contenait l’atteignit au plus profond d’elle-même.
    â€” Je suis persuadée que nous aurons d’autres occasions, répondit-elle d’une voix étranglée.
    â€” Tout va bien, mon ange? s’inquiéta Salaberry devant l’air étrange de sa femme.
    Hermine vint immédiatement au secours de Julie.
    â€” Une faiblesse, sans doute, avec cette chaleur et après une journée épuisante, expliqua madame Juchereau-Duchesnay à l’oreille de son frère. Je m’occupe d’elle.
    â€” Quelle admirable solidarité! dit le gouverneur à Hermine, avec un air hypocrite.
    â€” N’est-ce pas, Votre Excellence? répliqua Hermine avec aplomb. Il est toujours bon de pouvoir compter sur quelqu’un de sa famille. Venez, ma chère, ajouta-t-elle en prenant le bras de Julie.
    Julie comprit alors qu’Hermine avait peut-être elle aussi eu droit aux attentions particulières du gouverneur.
    â€” Voilà une grande vérité, souffla le gouverneur. Je ne doute pas que madame de Salaberry pourra être d’un grand soutien pour son mari.
    Julie tressaillit en entendant ces mots, se demandant ce qu’ils pouvaient signifier. Mais entraînée par Hermine, elle n’eut la réponse que le lendemain.

    Un personnage installé dans le petit salon du manoir de Rouville avait demandé madame de Salaberry. Intriguée, car ce n’était pas l’heure des visites mondaines, Julie sursauta en voyant le gouverneur. Que venait-il faire chez ses parents d’aussi bon matin?
    â€” Votre Excellence, le major de Salaberry, mon époux, est déjà parti au fort.
    â€” Mais c’est vous que je venais voir, madame. Je ne pouvais quitter Chambly sans vous faire mes adieux.
    â€” C’est me faire trop d’honneur, Sir, répondit Julie. Puis-je vous offrir un rafraîchissement? Du thé, peut-être?
    â€” Inutile, ma chère, j’ai ici tout ce qu’il me faut, dit-il en s’approchant d’elle pour saisir sa main et la baiser longuement.
    Les avertissements servis par Hermine, la veille – cette dernière connaissant bien le goût du gouverneur pour les femmes de ses officiers –, lui revinrent en mémoire.
    â€” Sir, je vous en prie, vous me gênez, dit-elle en retirant sa main.
    â€” Madame de Salaberry! Aurais-je provoqué chez vous le même émoi délicieux que j’éprouve en vous voyant? J’ai toujours été sensible à l’éclat irrésistible que dégage une jeune mariée. Attribuable, sans doute, à la décou-verte récente des joies de l’amour. Avez-vous déjà songé à ce qu’une épouse peut faire pour l’avancement de son mari?
    Troublée par cette entrée en matière, Julie commençait à comprendre ce que signifiait l’étonnante conduite du gouverneur.
    â€” Je lis de l’incrédulité dans vos beaux yeux. Mais n’ayez crainte, madame, je venais simplement vous proposer… un marché,

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