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Kenilworth

Kenilworth

Titel: Kenilworth Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Walter Scott
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même état de dégradation.
    Ils venaient de traverser ce jardin de la Paresse, et ils n’étaient qu’à quelques pas de la porte de la maison, quand Lambourne cessa de parler. Cette circonstance fut très agréable à Tressilian, parce qu’elle lui épargna l’embarras de répondre à l’aveu que son compagnon venait de lui faire avec franchise des vues qui l’amenaient en cet endroit. Lambourne frappa hardiment à la porte à grands coups, disant en même temps qu’il en avait vu de moins solides à plus d’une prison. Ce ne fut qu’après avoir entendu frapper plusieurs fois qu’un domestique, à figure rechignée, vint faire une reconnaissance à travers un petit carré coupé dans la porte, et garni de barreaux de fer ; il leur demanda ce qu’ils désiraient.
    – Parler à M. Foster sur-le-champ, pour affaires d’état très pressantes, répondit Michel Lambourne d’un air assuré.
    – Je crains que vous ne trouviez quelque difficulté à prouver ce que vous venez d’avancer, dit Tressilian à voix basse à son compagnon pendant que le domestique portait ce message à son maître.
    – Bon ! bon ! répliqua l’aventurier ; nul soldat ne marcherait en avant s’il fallait qu’il réfléchît de quelle manière il fera sa retraite. Le premier point est d’entrer ; après quoi tout ira bien.
    Le domestique ne tarda pas à revenir. Il tira de gros verrous, ouvrit la porte, et les fit entrer par un passage voûté dans une cour carrée, entourée de bâtimens de toutes parts. Le domestique, ayant ouvert une autre porte en face de la première, au bout de cette cour, les introduisit dans une salle pavée en pierre, où l’on ne voyait que très peu de meubles, antiques et en mauvais état. Des fenêtres, aussi hautes qu’elles étaient larges, montaient presque jusqu’au plafond de l’appartement, boisé en chêne noir. Ces croisées s’ouvrant sur la cour, la hauteur des bâtimens empêchait que le soleil n’y pénétrât jamais ; et comme toutes les vitres étaient séparées les unes des autres par des compartimens en pierre, et chargées de peintures représentant différens traits de l’histoire sainte, ces fenêtres étaient loin d’admettre la lumière en proportion de leur grandeur, et le peu de jour qui y pénétrait se chargeait des nuances sombres et mélancoliques des vitraux.
    Tressilian et son guide eurent le loisir d’examiner tous ces détails, car le maître du logis se fit attendre quelque temps. Enfin il parut, et quelque préparé que fût Tressilian à lui voir un extérieur désagréable et repoussant, sa laideur était au-dessus de tout ce qu’il s’était imaginé. Tony Foster était de moyenne taille, de formes athlétiques ; mais si lourd qu’il en paraissait difforme, et que dans tous ses mouvemens il avait la gaucherie d’un homme à la fois manchot et boiteux. Ses cheveux (alors comme aujourd’hui on entretenait les cheveux avec beaucoup de soin), ses cheveux, au lieu d’être bien lisses, et disposés en petits crochets, ou dressés sur leurs racines, comme on le voit dans les anciens tableaux, d’une manière assez semblable à celle qu’adoptent les petits-maîtres de nos jours, s’échappaient malproprement d’un bonnet fourré, et, mêlés ensemble comme s’ils n’avaient jamais connu le peigne, pendaient sur son front et autour de son cou, et formaient un accompagnement convenable à sa figure sinistre. Ses yeux noirs et vifs, enfoncés sous deux gros sourcils, et toujours baissés vers la terre, semblaient être honteux de l’expression qui leur était naturelle, et chercher à la cacher aux observations des hommes. Quelquefois cependant, quand, voulant lui-même observer les autres, il les levait tout-à-coup et les fixait sur ceux à qui il parlait, ils semblaient doués en même temps de la faculté d’exprimer les plus ardentes passions, et de les dissimuler à leur gré. Tous ses autres traits étaient irréguliers, et d’un caractère à rester gravés pour jamais dans le souvenir de quiconque avait vu cet homme une seule fois. Au total, comme Tressilian ne put s’empêcher de se l’avouer à lui-même, l’Anthony Foster, en présence duquel il se trouvait, était la dernière personne à qui il aurait fait volontiers une visite inattendue.
    Il portait un pourpoint à manches de cuir roux, semblable à ceux qui servaient alors de vêtement aux paysans tant soit peu aisés ; son ceinturon de cuir soutenait du côté

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