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Kenilworth

Kenilworth

Titel: Kenilworth Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Walter Scott
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sérieuses qui occupaient Tressilian, il sentit que son habit de voyage, quelque élégant qu’il pût être, faisait triste figure au milieu de cette magnificence, surtout lorsqu’il s’aperçut que son modeste équipage était un sujet d’étonnement pour ses amis, et de mépris pour les gens de Leicester.
    Nous ne pouvons taire ce fait, quoiqu’il semble choquer la gravité du caractère de Tressilian ; mais, à dire vrai, cette attention qu’on fait à la toilette est une sorte d’amour-propre dont le plus sage n’est pas exempt : notre espèce s’y laisse aller si naturellement que non-seulement le soldat qui court à une mort inévitable, mais encore le criminel qui marche à l’échafaud, se montrent jaloux de paraître de la manière la plus avantageuse. Mais évitons les digressions.
    C’était vers le soir d’un jour d’été (le 9 juillet 1575) ; le soleil venait de se coucher, et l’on attendait avec impatience l’arrivée de la reine. La foule, réunie depuis plusieurs heures, grossissait à chaque instant. Une abondante distribution de rafraîchissemens, de bœuf rôti, de tonneaux d’ale mis en perce sur différens points de la route, entretenait la gaieté du peuple ainsi que ses dispositions favorables pour la reine et le favori, dispositions qui se fussent sans doute beaucoup affaiblies si le jeûne eût été ajouté à une si longue attente. Le temps se passait en amusemens populaires ; on criait, on riait, on se jouait des tours malins les uns aux autres.
    Tout était ainsi en mouvement dans la plaine voisine du château, et principalement près de la porte du parc, où le peuple s’était réuni en plus grand nombre, lorsqu’on vit éclater tout-à-coup une fusée dans l’atmosphère, et aussitôt le son de la grosse cloche se fit entendre au loin dans la plaine.
    À ce signal les cris cessèrent : le murmure sourd de l’attente y succéda, et l’on n’entendit plus que le bruit confus de plusieurs milliers d’hommes qui parlaient à demi-voix : c’était, pour me servir d’une expression bizarre, « le chuchotement d’une immense multitude. »
    – Ils arrivent, la chose est sûre ! s’écria Raleigh. Tressilian, ce son a quelque chose de majestueux : nous l’entendons d’ici, comme sur un vaisseau les hommes de quart entendent, après un long voyage, le flot qui se brise au loin sur quelque plage inconnue.
    – Selon moi, répondit Blount, ce bruit ressemble plutôt au mugissement de mes vaches dans l’enclos de Wittens-Westlove.
    – Il est certainement à paître dans ce moment, dit Raleigh à Tressilian ; il n’a dans la tête que bœufs ou fertiles prairies. Il ne vaut guère mieux que ses bêtes à cornes, et il n’est véritablement homme que quand il a les armes en main.
    – Il va vous le prouver dans l’instant, dit Tressilian, si vous ne finissez de faire de l’esprit à ses dépens.
    – Bah ! je m’en moque ! répondit Raleigh. Mais toi aussi, Tressilian, tu es devenu une espèce de hibou, et tu ne voles plus que de nuit ; tu as échangé tes chansons pour de lugubres accens, et la bonne compagnie pour un trou de muraille.
    – Et toi, quelle espèce d’animal es-tu donc, Raleigh, dit Tressilian, toi qui nous juges si lestement ?
    – Moi ? répondit Raleigh ; je suis un aigle qui ne m’abaisserai jamais jusqu’à terre tant qu’il y aura un ciel où je pourrai prendre mon essor, et un soleil que je pourrai fixer.
    – Belle fanfaronnade, par saint Barnabé ! dit Blount. Mais, mon bon sire l’aigle, gare la cage ! gare l’oiseleur ! Tel oiseau volait aussi haut que vous que j’ai vu ensuite, fort proprement empaillé, servir d’épouvantail aux autres. Mais chut ! pourquoi ce silence soudain ?
    – C’est le cortège qui s’arrête à la porte du parc, dit Raleigh, où une sibylle, une de ces fatidicœ , parle à la reine et lui tire son horoscope. J’ai vu les vers ; ils ont peu de sel. Sa Majesté, d’ailleurs, est rassasiée de poésie ; elle me disait à l’oreille, pendant le discours du greffier de Ford-Mille, en entrant sur le territoire de Warwick, qu’elle était pertœsa barbarœ loquelœ , fatiguée de tout ce langage barbare.
    – La reine lui parler à l’oreille ! se dit Blount en soi-même : grand Dieu ! qu’est-ce que tout ceci deviendra ?
    Ses réflexions furent interrompues par les applaudissemens bruyans de la multitude, renvoyés par tous les échos à deux milles à la

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