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Khadija

Khadija

Titel: Khadija Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marek Halter
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campements dans le désert ou aux combats.
    — Il y en a tant qu'on croirait que vingt clans se sont installés là, assura Bilâl, ses mains moulinant plus vite que le rythme de ses paroles. Ou que tous les habitants de Mekka ont décidé de quitter leur maison pour vivre comme des Bédouins !
    Aussi loin qu'il avait pu voir, les rues paraissaient désertées et les places sans vie. Quelques fumées s'échappaient des cours des maisons. Vide aussi semblait l'esplanade de la Ka'bâ. Et vide encore l'alentour des entrepôts.
    — Peut-être que l'ennemi aura tout emporté, dit encore Bilâl, sans conviction.
    — Les troupeaux ? demanda Abu Bakr. Les as-tu vus ? Les ont-ils pris ?
    Des troupeaux de petits bétails, oui, Bilâl en avait remarqué. Les chameaux, il ne pouvait le préciser.
    — On les tient près des puits, sur la route d'Arafat. D'où j'étais, impossible de voir si loin.
    — Et des hommes en armes, y en a-t-il beaucoup ? demanda à son tour Muhammad.
    Bilâl fronça les sourcils, comme surpris par la réponse qu'il allait donner.
    — Non. En fait, non.
    Maintenant qu'il y repensait plus calmement, moins aiguillonné par le désir de revenir à la caravane afin de prévenir du danger, ce qui l'avait le plus surpris, avec cette quantité de tentes, c'était que Mekka paraissait vide. Une ville sans vie.
    — Mais je me trompe peut-être, reprit-il. Je suis resté loin, maître Muhammad. Je ne voulais pas qu'on me surprenne.
    Muhammad caressa d'une main l'épaule du géant et lui assura qu'il avait sauvé la caravane. Puis, après avoir échangé quelques mots avec Abu Bakr, il décida de s'approcher de Mekka et de vérifier par lui-même ce qui était véritablement arrivé. Abu Bakr voulut l'accompagner. Muhammad refusa.
    — Reste ici, mon ami. La caravane a besoin de toi.
    Et, en serrant le baudrier de sa nimcha sur sa poitrine, il ajouta :
    — Si je ne suis pas de retour demain à l'aube, ne t'approche pas de Mekka. Mène la caravane jusqu'au port de Djedda. Bilâl t'assistera. Là-bas, tu pourras écouler nos marchandises, et les marchands sauront peut-être ce qui est advenu ici. La rumeur dans le désert est plus rapide qu'un écho dans la montagne.
    Abu Bakr protesta. Argumenta. Quant à Bilâl, qui gardait la vision stupéfiante d'une ville morte, il insista lui aussi pour accompagner son maître.
    — C'est mon devoir, gronda-t-il de sa voix à faire trembler les falaises. Ne suis-je pas ton serviteur ?
    — Alors, dit Muhammad, je ne suis plus ton maître. Tu n'es plus mon esclave. Tu es un homme libre.
    Le grand Noir en resta bouche bée et pour une fois muet. Muhammad le serra dans ses bras.
    — Abu Bakr m'en est témoin. Je le dis devant lui : tu es un homme libre, Bilâl de Mekka. Si tout va bien, le sage Waraqà notera dans son rouleau de mémoire le libération de Bilâl. Les dieux le savent, et toi, et mon ami Abu Bakr, ainsi que tous les serviteurs de la maisonnée de la saïda bint Khowaylid qui sont là autour de nous. Longue vie à Bilâl de Mekka, l'homme libre !
    Avant que l'émotion ne retombe, Muhammad lança sans se retourner son méhari en direction de sa cité bien-aimée. Sa silhouette se confondit bientôt avec le désert.

La ville désertée
    Comme Bilâl, à l'approche de Mekka Muhammad quitta la route pour remonter la pente du jabal Umar. Il connaissait bien ce flanc de colline où, quelques années plus tôt, il s'était souvent exercé au combat avec le Perse Abdonaï. L'endroit était isolé, raviné par les éboulis du wadi que les grandes pluies d'hiver creusaient et transformaient sans cesse. Un lieu parfait pour apprendre l'art de la guerre. Des falaises de basalte écarlate s'enfonçaient dans une terre de poussière et de cailloux d'où surgissaient des arbrisseaux, des herbes grises, des broussailles d'épines peuplées d'insectes et de serpents. À l'aplomb des pentes et des pistes qui s'effritaient sous les pattes de son chameau, se dressaient de lourds pitons usés et polis par le vent. De temps à autre, sous l'effet du soleil peut-être, ou de la simple volonté des dieux, ils éclataient tels des fruits trop mûrs. De grandes plaques de roches semées de paillettes miroitantes s'en détachaient alors comme des pétales. Les pluies, la rosée et le feu du soleil les noircissaient aussi bien qu'un feu de bouse. Quelques-unes formaient de parfaits promontoires d'où l'on pouvait contempler Mekka presque en entier.
    Muhammad fit

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