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Kommandos de femmes

Kommandos de femmes

Titel: Kommandos de femmes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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essayons lxix de dormir, mais c’est presque impossible tant notre position est incommode. De plus, nous sommes constamment dérangées ; comme nous sommes toutes atteintes de ces infirmités qui marquent si vite le corps de déchéance, ce sont des va-et-vient sans arrêt vers les w.c. Ceux-ci sont situés à l’extrémité du wagon et leur abord compliqué ; dans la nuit nous devons enjamber les corps. Au retour d’un de ces voyages, je ne puis retrouver ma place et je tombe par terre au milieu des Russes.
    Heureusement, l’aube ne tarde pas à apparaître. À la lueur de la vague clarté qui filtre dans le wagon, je m’aperçois que mes voisines commencent à donner des signes d’agitation inusitée. Sans comprendre un mot de leur conversation, je devine aux regards sournois qu’elles me lancent qu’il doit s’agir de mon pain. Elles ont mangé tout le leur, et le mien, presque entier, est rangé dans mon sac.
    Je ne me suis pas trompée ! Avec ensemble, elles se jettent toutes sur moi, s’acharnent à s’emparer de l’objet de leur convoitise. Accroupie, pliée en deux pour tenir mon sac plus serré, je me défends en donnant des coups de tête. Isabelle et Denise arrivent à mon secours. C’est une mêlée générale. Enfin, nous triomphons.
    Assise dans le compartiment voisin, l’Aufseherin n’a pas bougé.
    — Ma veine lxx habituelle : c’est notre wagon qui fut désigné pour descendre du fourgon tous les colis de vêtements et autres qui suivaient. J’en ai profité pour remplacer mes « pantines » (chaussures basses à semelles de bois) qui ne tenaient plus par une paire de galoches à tiges de toile, tellement blanches que j’ai dû les salir dans la boue pour ne pas attirer l’attention de nos policières.
    *
    * *
    Le commandant des casernements et de l’aérodrome de Rechlin, en voyant défiler ce lamentable troupeau – les vieilles tricoteuses de Ravensbrück traînent la jambe en queue de colonne – a haussé les épaules :
    — Que voulez-vous que je fasse de ça lxxi  !
    Ses pistes avaient été retenues par la Commission Spéciale du Haut Commandement de la Luftwaffe pour accueillir les nouvelles escadrilles du Messerchmitt ME. 262. Et ce tout premier chasseur à réaction réclamait un terrain à sa mesure : hangars creusés dans le sol et protégés par des buttes de sable, canalisations profondes pour le carburant, fortins enterrés pour les munitions et les équipements de rechange, aires de décollage et de manœuvre aussi planes qu’un miroir. L’organisation centrale des camps d’Oranienburg, avait promis d’affecter à Rechlin le « tout premier choix de spécialistes ».
    — Que voulez-vous que je fasse avec ça !
    — Nous pouvons tout de même essayer !
    — Au point où nous en sommes ! Mais seulement les volontaires.
    Les deux « surveillantes » en uniforme n’ont pas pour habitude de réclamer des « volontaires » .
    — Une kapo lxxii commença à inspecter les rangs. Du bout de sa badine, elle désigna celles qu’elle voulait emmener. La route que nous prenons traverse le camp d’aviation ; celui-ci nous semble très étendu, car nous marchons très longtemps. De nombreux avions sont à l’atterrissage. La colonne s’arrête : autour de nous, des bureaux militaires, des cuisines…, un va-et-vient continuel d’aviateurs entre les baraquements ; nous sommes au centre du camp.
    Nous regardons autour de nous, curieusement ; mais, bien vite, la kapo nous rappelle à la réalité. Une chaîne est formée et, une par une, les pelles sorties d’un grenier circulent. Chacune pourvue d’un outil, des équipes sont formées. Je reste près de Lucienne, mais Isabelle et les deux autres sont emmenées dans une autre direction. Tandis que nos amies s’enfoncent vers l’intérieur du camp, nous reprenons notre marche. Très peu de chemin à parcourir et le lieu de travail est atteint. Un plateau que rien n’abrite du vent glacé qui souffle depuis le matin ; une terre argileuse qu’il nous faut bêcher pour creuser une excavation destinée à loger un avion : tel est l’endroit où nous allons passer des heures.
    Les S.S. et les aviateurs s’affairent sans cesse. Ils s’emparent des pelles et, rejetant la terre avec force, nous montrent comment il faut s’y prendre pour obtenir du bon travail.
    Les pelles s’enfoncent difficilement dans la terre visqueuse et la surveillance est serrée. À côté de moi, Lucienne

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