La 25ème Heure
arrêtée. À la police elle déclara ne rien savoir. La mère de Hilda fut arrêtée également, deux jours après. Elles furent interrogées, puis battues. Mais les inspecteurs ne purent rien tirer d’elles. À la perquisition ils tombèrent sur les lettres du colonel Müller.
– C’est l’ami de Iohann ! dit Hilda. Il nous envoyait deux cents marks par mois. À Pâques, à Noël et pour nos anniversaires, il nous envoyait des provisions et des cigarettes.
La police militaire avertit le colonel Muller de l’évasion de Iohann Moritz, espérant obtenir un complément d’information.,
Deux jours après, ils reçurent du quartier général un télégramme long d’une page.
Le colonel Müller écrivait à la police : " Depuis quatre siècles on n’a enregistré aucun cas de désertion parmi les membres de la " Famille héroïque " dont Iohann Moritz fait partie. Stop. Il est absolument exclu que Iohann Moritz ait déserté. Stop. Je suis convaincu que sa disparition a été provoquée par un rapt ou un assassinat. Stop. Disparition de Iohann Moritz constituerait pour l’histoire de la " Famille héroïque " une perte irréparable. Stop. Il doit être retrouvé à n’importe quel prix. Stop. Ne souillez pas du soupçon de désertion l’une des plus courageuses et honorables familles de sang germanique. Stop. Ne pas employer le mot désertion dans l’enquête que vous menez. Stop. La femme et l’enfant de Iohann Moritz sont considérés d’office comme protégés par l’Institut d’Études et Recherches allemandes. Stop. Jusqu’au moment où Iohann Moritz sera retrouvé sa femme et son enfant recevront une pension alimentaire de l’Institut. Stop. La police locale est invitée à veiller sur la femme et l’enfant. Stop. Tenez-moi au courant des recherches. Stop. Toute nouvelle information concernant Iohann Moritz doit m’être communiquée télégraphiquement au quartier général. Stop. Colonel Muller . O. K. W. "
– Si le colonel apprend que nous avons arrêté la femme de Moritz, nous serons transférés sur le front par mesure disciplinaire, dans les vingt-quatre heures, dit le capitaine chef de la police militaire. Nous ferions mieux de demander à la femme de ne pas communiquer au colonel qu’elle a été arrêtée.
– Que ferons-nous du dossier ? demanda le lieutenant qui était à la tête de la police judiciaire.
– Classez l’affaire immédiatement. Il n’est pas bon de jouer avec l’O. K. W., dit le capitaine.
– N’empêche que c’est une bêtise de ne pas se rendre compte que nous avons affaire à un déserteur, dit le capitaine. Les hommes supérieurs font parfois plus d’erreurs que le commun des mortels. Le colonel Müller est un savant. J’ai lu plusieurs de ses articles dans les revues. Il a également publié des livres. Mais il est trop exclusif. Comment peut-il s’imaginer que Moritz n’a pas déserté ?
Hilda fut reconduite chez elle dans la voiture du capitaine.
– Quand vous aurez encore besoin de l’auto, vous n’aurez qu’à téléphoner, lui dit le chef de la police. Ma Mercédès est à votre disposition, nuit et jour. Quelque désir que vous ayez, vous n’avez qu’à me le faire connaître. Je vous serais fort reconnaissant de ne pas écrire au colonel Müller que vous avez été arrêtée. Nous ne l’avons fait que pour donner l’exemple. Cela a été une simple formalité.
– Mon mari n’a donc pas déserté ? demanda Hilda. Il a été envoyé en mission spéciale ?
– Nous ne pouvons pas vous répondre, dit le chef a de la police. Mais votre mari n’a pas déserté. Le reste est secret.
Hilda rougit de plaisir. À partir de ce jour-là sa vie ne fut plus qu’un conte des Mille et une Nuits.
Elle était convaincue que son mari avait été envoyé en mission spéciale par l’O. K. W. " Autrement, pourquoi auraient-ils mis l’auto à ma disposition ", se disait-elle.
Elle restait des heures durant devant la fenêtre et s’imaginait Iohann Moritz dans toutes sortes de situations pleines de mystère comme dans les films d’aventure.
" Il n’a rien voulu me dire, se dit-elle. Il me considère comme inférieure. Je ferai tous les efforts possibles pour être digne de lui. " Hilda embrassa son enfant et lui dit :
– De toute ma vie je n’ai eu de moment plus heureux que celui-ci. Seule la femme d’un Iohann Moritz peut connaître pareil bonheur, le bonheur d’être femme de
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