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La 25ème Heure

La 25ème Heure

Titel: La 25ème Heure Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Virgil Gheorghiu
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elle devait encore attendre. À ce moment, on frappa à la porte.
    Hilda serra l’enfant dans ses bras et ne répondit pas.
    Elle entendit qu’on parlait russe derrière la porte. Et puis de nouveau des coups dans la porte. Elle ouvrit la fenêtre qui donnait sur le jardin.
    " Je ne puis m’enfuir sans avoir tenu ma promesse. Iohann "mon mari" est un héros ; moi, je n’ai pas le droit d’être lâche. "
    Hilda déboucha un des bidons d’essence et le versa sur la toile de tente. Les coups de crosse qu’on donnait dans la porte allaient bientôt la faire sauter. Hilda déboucha également le second bidon et en versa la moitié. Elle avait peur que les Russes ne mettent la porte en morceaux et elle se dépêchait. Elle prit l’enfant et se dirigea vers la fenêtre.
    " Après avoir sauté par la fenêtre, je jetterai le briquet allumé dans la pièce et il brûlera. Ainsi, j’aurai tenu ma parole ", se dit-elle.
    L’atmosphère de la chambre était empestée d’essence. L’enfant se mit à tousser. Hilda se dépêchait. Quand elle enjamba la barre d’appui de la fenêtre pour sauter dans la cour, les Russes avaient déjà commencé à enfoncer la porte à coups d’épaule. Du chambranle de la fenêtre jusqu’aux plates-bandes du jardin, la hauteur n’était pas grande. Sauter était facile. Mais à ce moment même, trois képis russes surgirent à la fenêtre.
    Dans le jardin, il y avait d’autres soldats. Elle ne pouvait plus sauter. Hilda jeta un regard vers la porte. L’enfant, suffoqué par l’odeur d’essence, criait. Elle décida pourtant de sauter et de se frayer un chemin à travers les soldats russes. À ce moment même, quelqu’un tendit la main par la fenêtre en voulant la saisir et toucha son pied.
    Hilda poussa un cri. Elle voulait se défendre. Elle n’avait que son briquet à la main. Sans réfléchir elle appuya sur le levier comme on appuie sur la détente d’un revolver lorsqu’on est attaqué. L’espace d’une seconde, il y eut une grande lumière. Puis l’obscurité se fît, une obscurité plus noire et plus profonde que la nuit. La lumière n’allait plus jamais revenir.
    Les mêmes flammes qui brûlaient le corps du géant ; Iorgu Iordan enveloppèrent également la femme de Iohann Moritz et Franz leur enfant. Et le même feu détruisit de la cave au grenier la maison et tout ce qui s’y trouvait et les photos apportées par le géant et posées par lui sur la table, celle de la mère de Suzanna et celle de Suzanna, la première femme de Moritz.
    L’essence apportée par le géant brûlait encore, élevant des longues flammes vers le ciel.
     
     
     
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    Traian Koruga et Eleonora West restaient l’un à côté de l’autre devant le major Brown, gouverneur américain de la ville de Weimar.
    – C’est tout, monsieur le gouverneur, dit Traian Koruga. Le 23 août au moment où la Roumanie a demandé l’armistice, ma femme et moi avons été internés par les Croates en même temps que les autres membres de la Légation de Roumanie.
    " Nous avons été internés, selon les règlements diplomatiques, dans un hôtel, en même temps que les représentants de tous les pays ennemis.
    " Puis la Croatie a été occupée par les partisans de Tito. Nous avons été transférés en Autriche, puis en Allemagne et pour finir en Tchécoslovaquie.
    " Lorsque l’Allemagne a capitulé, il ne s’est plus trouvé personne pour nous interner et nous sommes partis vers l ’Ouest. Nous avons tout laissé pour partir vers l’Ouest.
    Eleonora revit les deux cents kilomètres faits à pied. Elle avait les jambes enflées et la plante des pieds couverte de durillons.
    – Nous avons tout laissé et nous nous sommes enfuis à travers bois et à travers champs pour arriver en territoire occupé soit par les Américains, soit par les Anglais, soit par les Français, conti nua Eleonora West. Nous ne voulions pas tomber vivants entre les mains des Russes ou des partisans. Nous étions prêts à nous tuer plutôt que d’être pris par eux.
    – Pourquoi aviez-vous peur des Russes et des partisans ? demanda le gouverneur. Seuls des fascistes en ont peur. Les Russes et les partisans sont nos alliés. Ils ont combattu pour la victoire des Nations Unies.
    –  Vous n’êtes pas fasciste, non plus, monsieur le gouverneur, mais je ne crois pas que vous accepteriez que votre femme demeure en territoire occupé par les bolcheviks, ne fût-ce que vingt-quatre heures, dit Traian.

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