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La 25ème Heure

La 25ème Heure

Titel: La 25ème Heure Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Virgil Gheorghiu
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silence. Le géant regardait quelque part, au loin, perdu dans ses pensées comme dans une eau sans fond.
    – Maintenant c’est fini, dit-il.
    Hilda leva les yeux. Elle croyait que le géant voulait se suicider devant elle, et elle n’aurait pas pu supporter cela. Mais il n’avait pas l’air de vouloir se suicider encore. Le géant se tourna vers la photo du Führer. Il se mit au garde-à-vous, et salua, la main tendue.
    Hilda était derrière lui. Elle regardait ses épaules et sa taille serrée dans l’uniforme. Elle voyait son bras tendu. Il était immobile comme une Statue. Il se retourna, releva le bras, et la salua.
    » – Adieu, amie et merci ! dit-il. Je suis le lieutenant Iorgu Iordan. Mais tu n’as pas besoin de le répéter. Sois fière de ce que tu vas accomplir, c’est un honneur pour une Allemande que d’exécuter les dernières volontés d’un soldat !
    Il serra la main de Hilda. Il la serra très fort comme pour une séparation.
    – Maintenant je veux rester seul ! ordonna-t-il. Viens aussitôt que tu auras entendu le coup de feu. Adieu !
     
     
     
106
     
     
     
    Les premiers camions russes apparurent au bout de la rue.
    Hilda entendit tout d’abord le bruit des moteurs puis elle les vit par la fenêtre de la cuisine. Elle se précipita vers la chambre où se trouvait le géant. Il lui avait dit de ne pas entrer avant d’entendre le coup partir. Elle n’avait rien entendu, et n’avait pas osé enfreindre son ordre. Les camions russes qui passaient dans la rue faisaient trembler les murs. Hilda ne pouvait plus attendre. Elle avait peur. Elle frappa à la porte et entra. Le géant gisait au milieu de la pièce, sur le dos, étendu sur la toile de tente.
    " Comment n’ai-je pas entendu le coup de feu ? " se demanda Hilda.
    Le corps du géant était droit comme s’il était mort au garde-à-vous en saluant la photo du Führer. Il avait son képi sur la tête. Son visage était violacé, et comme recouvert d’une poudre de cendre. La joue droite, la bouche et le nez étaient tachés de sang. Il n’y avait pas beaucoup de sang. Rien que de minces filets.
    Hilda prit le revolver tombé près de la bouche du géant et le mit dans sa gaine de cuir. Puis elle la referma. Elle se demandait comment le géant avait pu se tuer sans qu’elle entendît le coup partir.
    Hilda prit les pans de la toile et les rabattit sur le mort. Avant de lui couvrir le visage, elle regarda le géant une dernière fois.
    " Je n’ai pas l’impression de me trouver à côté d’un mort ! se dit-elle. La mort ne me fait pas peur. Je ne vois pas la mort même en me trouvant à son côté. Peut-être est-ce parce que j’ai vu à l’hôpital tant d’hommes mourir… "
    Hilda couvrit le visage du géant, sans le toucher.
    Maintenant, il ressemblait à tous les hommes qu’elle avait vus. Vivant, le géant n’était pas comme les autres. Mais Hilda se souvenait à peine des temps où le géant était encore là, en vie, se rasant et mettant son uniforme. Alors, toute sa chair tremblait lorsqu’elle l’approchait.
    Mais tout cela avait dû se passer des dizaines d’années auparavant. Elle l’avait presque oublié.
    Dehors on entendait le bruit des camions et des tanks russes. Hilda tout à coup prit peur. Elle voulait saisir l’enfant, et s’enfuir dans les bois par la petite porte du jardin. Elle se rappela la promesse faite au géant.
    " Je regrette de lui avoir promis de le brûler ", se dit-elle.
    Elle ne pouvait porter le cadavre dans le jardin, car elle risquait d’être vue par les soldats russes des camions et des tanks qui passaient devant la porte.
    " Je dois attendre jusqu’à ce soir, se dit-elle. Je le porterai dans la cour et j’y mettrai le feu, dès qu’il fera nuit. Puis je m’enfuirai avec l’enfant. "
    Hilda demeurait auprès du mort sans penser à rien.
    Puis elle se dit que si l’on trouvait le mort dans la maison, elle risquait d’être arrêtée. Elle chercha l’enfant dans la chambre d’à côté, le prit et s’assit avec lui sur une chaise, près du mort.
    " Je ne peux pas ne pas tenir une promesse faite à un soldat avant sa mort ", se dit-elle.
    Elle ferma la porte et tira le verrou, décidée à attendre jusqu’à ce qu’il fasse nuit. Dans deux ou trois heures la nuit serait là. Hilda n’avait pas de montre. Elle se rappela que le géant en portait une au poignet. Elle écarta la toile de tente et regarda la montre du géant pour savoir combien de temps

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