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La Bataillon de la Croix-Rousse

Titel: La Bataillon de la Croix-Rousse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louis Noir
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mois   ; tout s’embrouille, les faits et les dates   : puis, sur l’ordre d’incarcérer que vous n’avez pas lu mais qui sera joint aux pièces des archives, j’ai mis un mot, un mot qui vous aurait frappé si vous l’aviez lu.
    Le petit abbé se mordit les lèvres.
    – Ce mot, reprit Roubiès, c’est « réintégrer », ordre de réintégrer à la prison la femme Saint-Giles qui n’aurait jamais dû en sortir. Donc, elle a déjà été incarcérée. On peut baser tout un échafaudage sur ce simple mot.
    – Oh   ! mon père, dit le petit abbé avec une admiration sincère, vous êtes vraiment fort et Dieu vous inspire.
    Cette flatterie réparait un peu le tort de n’avoir point lu l’ordre d’arrestation.
    Toutefois, Roubiès revint sur cette faute et dit   :
    – Mon enfant, la conclusion à tirer de tout ceci, c’est que vous devez prendre garde et lire toute pièce qui vous passe par les mains   : le plus petit morceau de papier peut être instructif.
    Et la leçon donnée, il dit   :
    – Travaillons, mon enfant. C’est pour la plus grande gloire de Dieu.
    Les misérables   !
    Si vraiment la gloire de Dieu exigeait tant d’infamies, Dieu serait infâme.
    Si Saint-Giles, qui était sous les verrous, avait su que sa mère était arrêtée et jetée au milieu des prostituées, il eût été mille fois plus malheureux encore qu’il l’était.
    Personne ne s’ennuie plus en prison qu’un artiste   : sa pensée, qui a des ailes, se trouve comprimée entre les quatre murs d’une cellule. Saint-Giles en prison, c’était un pinson en cage.
    Il n’apercevait, dans sa mansarde grillée, par la lucarne du plafond, que le ciel, une petite échappée de ciel.
    Des coups reçus, Saint-Giles ne ressentait rien, presque rien.
    Mais il s’ennuyait, s’ennuyait, s’ennuyait…
    Curieux par état, par tempérament, curieux avec passion, il eût voulu savoir…
    Mais toute la matinée s’écoula sans qu’il reçût la visite du geôlier.
    La fusillade ayant cessé, Saint-Giles en conclut que la lutte s’était terminée vers quatre heures du matin.
    Comme on ne venait pas le délivrer, il en avait conclu non moins logiquement que les républicains étaient vaincus.
    Enfin, vers onze heures, un geôlier vint ouvrir la porte.
    Cet homme avait la mine moins renfrognée que Saint-Giles ne s’y fût attendu c’était une assez bonne tête de vieux soldat, calme, obligeant, philosophe et ne paraissant s’étonner de rien.
    – Monsieur, dit-il à l’artiste qui étudiait cette physionomie pour savoir quel parti l’on pourrait tirer de cet homme, monsieur, je viens prendre vos ordres pour le dîner que l’on vous servira sur le coup de midi.
    – Mes ordres   ? fit Saint-Giles un peu étonné.
    – C’est l’habitude pour les prisonniers à vingt livres par jour, et l’on vous a mis dans cette classe.
    – Peste   ! on me cote assez haut, d’après ce que je vois.
    – Très haut, monsieur   ! C’est le taux d’un gentilhomme.
    – Sous la République   ?
    – La République est finie à Lyon   : on a repris les anciens geôliers dont je suis et l’ancien règlement.
    – Nous sommes définitivement battus alors, nous autres   !
    – Complètement battus   ! Mais, j’ai un mot à vous remettre.
    – De ma mère, probablement.
    – Non   ! Du moins je ne le crois pas.
    Le geôlier tendit à Saint-Giles une petite lettre parfumée qui sentait la femme et la poudre brûlée.
    Elle était de la baronne.
    « Cher,
    « La guerre est la guerre, comme l’amour est l’amour.
    « Vous êtes prisonnier et je suis blessée, peu de chose du reste, une égratignure, un coup de fouet, comme disent les chirurgiens.
    « Je vous écris en hâte pour vous rassurer sur votre mère et sur tous les vôtres, y compris votre fiancée.
    « Certaine baronne de votre connaissance veille sur la famille.
    « Quant à vous, comme tous les prisonniers, vous voilà au secret le plus absolu. Inutile de vous dire que vous ne courez aucun danger, dans huit jours vous serez dehors.
    « Je vais intriguer pour obtenir permission de vous aller voir.
    « J’ai eu l’occasion de vous apercevoir dans la lutte, mes compliments   ! Morbleu, cher, vous êtes superbe au feu.
    « À bientôt.
    « Votre fifre dévoué.
    « P. S. J’espère que vous boirez un peu à ma santé. »
    Saint-Giles plia la lettre, enchanté d’être rassuré sur les siens.
    S’il avait su…
    La baronne mentait

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