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La Bataillon de la Croix-Rousse

Titel: La Bataillon de la Croix-Rousse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louis Noir
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enfermait les femmes de mauvaise vie.
    – Le plus odieux, ajouta M me  Rameau, c’est que, quand elle est sortie de cette prison, le geôlier lui a dit brutalement   : « Et maintenant nous te tenons. Si tu bouges, si tu fais ta républicaine, nous te rappellerons que tu es une femme de rien, « la boue des rues ». Et M me  Saint-Giles veut mourir pour épargner à ses enfants la honte qu’elle subirait sous cet affront.
    – C’est une bien triste histoire que vous me racontez là, madame   ! dit Dubois-Crancé redevenant gentilhomme.
    – Aussi, mon mari, connaissant votre grande autorité morale, vous prie-t-il, citoyen représentant, de promettre à cette honnête femme une réhabilitation solennelle.
    Dubois-Crancé réfléchit pendant quelques instants, puis il dit à M me  Rameau   :
    – Cette réhabilitation, M me  Saint-Giles l’aura de son vivant, sous la forme d’un hommage que les armées ne rendaient autrefois qu’aux reines et aux princesses du sang.
    Il remercia M me  Rameau et lui fit donner par une vivandière l’hospitalité de la nuit dans une dépendance du château de la Pape.
    Puis il se rendit lui-même à la batterie qui devait, le lendemain 10 août, ouvrir le bombardement en tirant le premier coup de canon.
    De là, il expédia divers ordres.
    Le lendemain, à l’aube, tout l’état-major de l’armée était réuni à Montessuy autour de la batterie de trois pièces de 10 qui envoya à Lyon la réponse de Kellermann à son invitation.
    Près des canons de Montessuy, Kellermann, le vainqueur de Valmy, représentant le génie militaire de la Révolution   ; Dubois-Crancé représentant son génie politique.
    Partout, sur le vaste circuit du blocus, l’armée sous les armes.
    Jamais Lyon ne vit se dérouler devant ses murs spectacle plus imposant.
    Lorsque les gerbes d’or du soleil de thermidor jaillirent au-dessus des crêtes, versant sur les pentes des torrents de lumière, la fanfare de la diane éclata, puis toutes les musiques jouèrent à l’unisson la Marseillaise.
    Pendant que l’hymne sacré montait vers le ciel, un cortège d’officiers s’avançait vers la batterie, escortant une femme voilée de noir, vêtue de deuil, à laquelle Saint-Giles donnait le bras.
    Elle entra dans la batterie et fut reçue par Dubois-Crancé qui la présenta à une députation de toute l’armée convoquée la nuit même   :
    – Citoyenne, dit Dubois-Crancé, les généraux ici présents et l’état-major de cette armée connaissent les injures que tu as subies pour la cause républicaine. Ta vertu est pure, ton honneur est sans tache, ta réputation brille comme le soleil qui vient de chasser la nuit.
    « L’armée des Alpes devant Lyon veut te rendre un solennel hommage.
    « Autrefois, quand une reine ou une princesse assistait à un siège, on lui faisait l’insigne honneur de mettre le feu à la pièce qui ouvrait le bombardement.
    « Nous allons foudroyer Lyon et tu ouvriras le feu sur la ville rebelle   : le feu purifie tout et il effacera la tache dont s’est souillée la ville en laissant commettre la lâcheté dont tu as souffert.
    « Tu seras la Némésis, déesse des justes vengeances ».
    Puis, s’adressant à l’armée, il donna un signal.
    Les tambours battirent et les trompettes sonnèrent aux champs, la plus grande marque d’honneur.
    Toute la troupe présenta les armes.
    Alors Dubois-Crancé s’écria   :
    – Soldats,
    « Je vous présente la plus honnête femme et la plus grande citoyenne qui ait jamais honoré la République. »
    Puis, au milieu des applaudissements, Dubois-Crancé prit une mèche fumante des mains d’un artilleur et la remit à M me  Saint-Giles en lui montrant la lumière d’un canon chargé.
    Elle mit le feu à la pièce d’une main sûre et la détonation retentit portée à une distance énorme par les eaux du Rhône.
    – C’est le canon de mes funérailles   ! dit M me  Saint-Giles en embrassant son fils.
    Et, au milieu des hourras de l’armée, elle disparut, emportée par une voiture qui l’attendait.
    Le lendemain, Lyon apprenait cette nouvelle extraordinaire que Dubois-Crancé, l’homme inflexible, le patriote austère, avait fait tirer par sa maîtresse le premier coup de canon du 10 août.
    Et Lyon s’indignait.
    Et Lyon se soulevait de colère, commentant ce trait avec une sombre fureur.
    Aussi, lorsque Dubois-Crancé fit envoyer le 11 août sa troisième sommation, toutes les autorités

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