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La belle époque

La belle époque

Titel: La belle époque Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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d'un bleu sombre soulignait son regard. Un long moment, McDougall détailla ses traits fins, harmonieux, soulignés par sa coiffure. Ses cheveux étaient relevés sur sa tête et maintenus par de multiples épingles. Soumise à cet examen, ce fut bientôt à Marie de rougir un peu. L'arrivée d'un serveur affublé d'un grand tablier blanc leva leur embarras un moment.
    Après avoir passé leur commande, afin de briser le silence devenu inconfortable, James McDougall confia:
    —J'aime bien votre ville, mais l'idée de manger au restaurant tous les jours jusqu'en juillet me déprime un peu.
    —    Serez-vous ici aussi longtemps ?
    —    Mon patron ne connaît pas un mot de français... Cinq personnes sur six, parmi les gens qui se présentent pour jouer un rôle dans le pageant, parlent cette langue. Il fait beaucoup de signes, mais cela ne suffit pas toujours pour être bien compris. Je traduis... et je règle les petits détails.
    Marie se souvenait d'avoir aperçu le grand esthète marcher dans les rues de la ville avec des airs de dandy. Son allure le distinguait tout à fait des autres habitants.
    —    Cet homme...
    —    Frank Lascelles ?
    —    Oui. On raconte qu'il a une bonne réputation.
    —    Il est en train de s'imposer comme le grand spécialiste de ce nouveau genre de représentation. L'été dernier, il a remporté un franc succès à Oxford. L'été prochain, tout indique qu'il organisera un autre pageant à Bath.
    —    En quelque sorte, remarqua-t-elle en riant, c'est un travailleur saisonnier.
    La jeune femme découvrait des dents blanches, parfaitement alignées dans un sourire charmant. McDougall adopta le même ton amusé pour répondre :
    —    En quelque sorte... Cependant, la préparation d'une célébration de ce genre demande toute une année d'efforts. Ici, la situation s'avère un peu différente : comme il ne connaît rien du passé de la ville et qu'il ne peut même pas lire la plupart des publications sur le sujet, il n'a pas participé à la préparation du scénario. D'habitude, les textes sont de lui.
    —    Vous travaillez toujours avec lui ?
    —    Non, ma présence ici tient seulement au fait que je connais le français, sans compter que j'ai suffisamment tâté du théâtre pour savoir précisément ce qu'il désire. Normalement, aujourd'hui, je devrais enseigner cette langue à des collégiens pas tellement enthousiasmés par le sujet.
    Son allure comme sa tenue évoquaient effectivement un professeur de collège.
    —    Vous vous exprimez très bien, commenta Marie.
    —    Avec un affreux accent écossais.
    Si la prononciation demeurait rocailleuse, tant la grammaire que le vocabulaire étaient exacts.
    —    Un accent plutôt charmant. Où avez-vous appris ?
    —    A Edimbourg, à l'école... Mais j'ai beaucoup bénéficié de mon passage dans une maison de commerce spécialisée dans l'importation de vins français. J'ai habité pendant deux ans dans la région de Bordeaux.
    Un long moment, tous les deux évoquèrent les charmes respectifs des campagnes écossaise, française et québécoise. A la fin, un peu dépitée du fait que ses fonctions de boutiquière et de mère de famille la condamnaient à l'immobilisme, Marie choisit de changer de sujet:
    —    Habitez-vous aussi au Château Frontenac ?
    Tous savaient que le metteur en scène tenait ses quartiers dans le grand hôtel qui se dressait sous les fenêtres du restaurant, de l'autre côté de la place d'Armes.
    —    Non, répondit l'autre dans un sourire. Les assistants ne jouissent ni du même traitement ni des mêmes conditions d'existence que leur patron... Je réside toutefois à deux pas d'ici, à l'hôtel Victoria.
    —    Vous auriez pu tomber beaucoup plus mal.
    Un long moment de silence succéda à ces paroles. Tous les deux gardaient un air gêné. Marie surveillait du coin de l'œil les autres clients de l'établissement, cherchant des regards réprobateurs posés sur elle. Heureusement, aucune des personnes tenant commerce dans la rue de la Fabrique n'était susceptible de manger à l'extérieur le midi. Puis autour d'eux les échanges se déroulaient en anglais : les qu'en-dira-t-on ne traversaient que rarement la frontière pour voyager d'une communauté linguistique à l'autre.
    Si la conversation ne reprit pas vraiment entre eux, les regards se révélaient éloquents. Au moment de régler l'addition, James McDougall demanda, de

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