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La belle époque

La belle époque

Titel: La belle époque Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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Don-de-Dieu sortait d'un chantier naval de Lauzon. Sa ressemblance avec l'original, dont les plans n'existaient plus, devait être bien approximative.
    A trois heures, quand il s'approcha de la rive, plusieurs canots d'écorce chargés d'Amérindiens se détachèrent du quai pour le rejoindre. Charles Langelier, un avocat souvent élu député libéral à l'Assemblée provinciale, puis nommé conseiller législatif, personnifiait Samuel de Champlain. Il descendit dans l'un des esquifs alors que des hourras fusaient de toutes les poitrines. Ses compagnons l'imitèrent et bientôt les Amérindiens revinrent débarquer tous ces passagers près du quai du marché Finlay. Une double haie d'honneur, formée des soldats de Montcalm et de Wolfe, reçut les augustes visiteurs en se tenant au garde-à-vous et en présentant les armes. Puis les soldats les escortèrent jusqu'à l'Habitation.
    Pourtant, tous ne contemplaient pas la scène touchante de la redécouverte de Québec par le grand explorateur venu de la Saintonge. Thomas Picard devait une fois de plus à ses étroites relations avec le Parti libéral de compter parmi les malheureux privés du spectacle. À proximité de la statue de Champlain, à l'extrémité est de la terrasse Dufferin, des estrades abritées du soleil par de grandes toiles blanches recevaient les hôtes de marque. Toutefois, comme le jour de l'arrivée du prince, le commerçant se tenait debout, un peu en marge des notables. Sa situation faisait penser à celle de l'invité venu de la campagne pour assister à un banquet, assis sur un strapontin au bout le moins noble de la tablée, avec les enfants.
    Tout le gratin canadien se trouvait là, de même que de nombreux étrangers parmi les plus prestigieux : le marquis de Lévis, le marquis de Lévis-Mirepoix, le comte de Montcalm, une brochette de lords - Roberts, Dudley, Lovât, Bruce - le duc de Norfolk, représentant les catholiques du Royaume-Uni, le vice-président américain Charles Fairbanks, l'amiral Jauréguiberry. Tout le Cabinet fédéral, Wilfrid Laurier en tête, formait un joli fond de scène, de concert avec une brochette de juges et au moins trois premiers ministres provinciaux.
    —    Tout le bon peuple se détourne de ses ancêtres afin de contempler la belle visite, maugréa Louis-Alexandre Taschereau.
    Le ministre provincial au physique ingrat se trouvait lui aussi relégué au strapontin discret. Son constat tenait au fait que lentement, des personnes abandonnaient la balustrade de fonte pour venir se presser près des estrades.
    —    Ils applaudissent Henri Bourassa un jour et le lendemain la noblesse venue des vieux pays, proféra le marchand avec humeur.
    Taschereau fit un demi-tour sur lui-même, puis conclut:
    —    Je ne reconnais ici aucune des personnes présentes à l'assemblée du marché Jacques-Cartier en août dernier. Les parages conviennent surtout aux redingotes et aux complets faits sur mesure.
    —    Tout à l'heure, j'ai vu Armand Lavergne...
    —    Si la progéniture illégitime autoproclamée de Laurier se trouve là, le morpion Olivar Asselin va bientôt se manifester aussi. Ces deux-là viennent ensemble, comme la merde et l'odeur de la merde.
    Un peu plus tôt dans l'année, Taschereau avait été assailli à coups de poings par le journaliste surexcité. L'affaire se trouvait toujours devant les tribunaux. Devant l'engouement de la population pour les commémorations, l'hebdomadaire Le Nationaliste donnait maintenant dans l'humour, se moquant des vieillards et des grosses dames qui s'extasiaient devant les visiteurs de la métropole. Cependant, de critiques tonitruantes, point.
    A la fin, Thomas éclata de rire, puis enrichit leur petit échange d'un morceau de sagesse :
    —    Nous retrouver en plein soleil nous rend aigris tous les deux, j'en ai bien peur.
    —    Mais j'ai une solution à cela, et pas vous.
    Le ministre ouvrit son parapluie. Magnanime, il laissa son compagnon profiter d'une part d'ombre.
    Très vite, les jeux de main amenèrent les amants aux premières plaintes énamourées, aux mouvements saccadés et, finalement, aux râles de jouissance. Avec une mine à la fois surprise et amusée, Marie regarda les longs jets de semence atterrir sur la poitrine, puis sur le ventre de son compagnon. Le dernier coula sur le gland, puis contre le dos de sa main.
    —    Tu avais fait des réserves, remarqua-t-elle, les yeux rieurs.
    Dans la pénombre de la chambre, ils

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