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La belle époque

La belle époque

Titel: La belle époque Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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quelques battements cardiaques séparait la vie de la mort.
    La rive s'élevait, abrupte. Le commerçant et son fils, comme les autres sauveteurs, des ouvriers assez chanceux pour avoir pu détaler à temps, ou alors ceux qui se trouvaient sur la terre ferme au moment de la catastrophe, et des curieux accourus des villages de Sainte-Foy ou de Sillery, eurent un peu de mal à gravir la pente rocheuse. La plupart d'entre eux pleuraient de désespoir, impuissants, ce qui n'aidait en rien à leur progression.
    Quand ils furent enfin rendus sur une surface à peu près plane, Thomas posa une main sur l'épaule de son garçon, lui fit signe de s'asseoir sur l'herbe. Quand les sanglots d'Édouard se calmèrent un peu, l'homme demanda d'une voix douce :
    —    Tu es prêt à rentrer à la maison ?
    —    ... Ces hommes ?
    L'adolescent fit un geste vague vers le fleuve.
    —    Nous ne pouvons plus rien, tu l'as vu comme moi... A marée basse, dans cinq ou six heures, des gens pourront récupérer les corps.
    —    Le fiacre est sans doute parti...
    Plus probablement, le cocher devait se trouver encore sur place, à attendre que des curieux attirés par le bruit de la catastrophe requièrent ses services pour rentrer à la maison. Pour le rejoindre, il fallait retourner tout en haut de la falaise-Tenter cette ascension, alors que la descente s'était montrée difficile et dangereuse, paraissait impossible. Quant à rentrer à pied, la distance jusqu'à la rue Scott représentait un défi que le garçon ne voulait pas relever.
    —    Si nous marchons un peu vers l'est, nous trouverons bientôt une route carrossable le long du fleuve. Je ne doute pas que quelqu'un voudra nous faire faire un bout de chemin vers la Haute-Ville.
    Des personnes arrivaient encore sur les lieux. Maintenant, toute la population de Québec devait être au courant de la catastrophe. Quand l'obscurité dissimulerait les milliers de tonnes de ferraille tordue qui formaient une ligne brunâtre d'une rive à l'autre, invisible là où l'eau se révélait la plus profonde, ces gens rentreraient à la maison. Les voitures encombreraient alors les chemins.
    Cette prévision se vérifia. Contre un pourboire généreux, bien que les billets fussent trempés à cause de leur séjour dans l'eau du fleuve, Thomas convainquit un cocher d'oublier les gens qu'il avait emmenés là pour le reconduire rue Scott avec son fils.
    Après un repas sans joie, avalé en silence, les enfants de Marie Buteau et d'Alfred Picard regagnèrent leur chambre respective. Ils entendirent bientôt la porte arrière s'ouvrir et se refermer. Une demi-heure plus tard, Mathieu ressentit le besoin d'un passage au « petit coin ». Au moment de regagner son lit, il ouvrit discrètement la porte de la chambre de Thalie, en face de la sienne. L'ombre blanche d'une chemise de nuit se dressait près de la fenêtre. Le garçon entra sur le bout des pieds, vint s'asseoir près d'elle.
    Depuis toujours, la fillette avait décidé de faire de la croisée son poste de vigie. Au début, elle poussait un petit banc doté d'un coussin contre le mur pour s'agenouiller dessus. À sept ans, elle pouvait maintenant s'y asseoir, croiser ses bras sur le rebord de la fenêtre pour y mettre le menton. De cet endroit, elle profitait d'un point de vue enviable sur l'hôtel de ville, situé juste en face. Plus loin, la façade de quelques commerces de la rue Buade, et même tout à fait à droite, d'autres immeubles de la rue Saint-Jean se profilaient dans l'ombre. Si elle se penchait un peu, elle profitait d'une vue plongeante sur le trottoir de la rue de la Fabrique; en tournant la tête vers la gauche, la basilique révélait sa masse sombre.
C'était là son grand théâtre, offrant un spectacle
— La nouvelle situation vaut certainement mieux, c
Côte-de-la-Canoterie. La taverne du Cheval blanc s
— Cela doit être passionnant de mettre sur pied un
— Mais cela ne portera pas trop à conséquence, le
— Marie ressentait le besoin de se reposer de moi,
— Comme il est beau ! murmura Eugénie, fascinée pa
La confidence laissa le garçon perplexe. Comment c

C'était là son grand théâtre, offrant un spectacle sans cesse renouvelé. Le jour, les gens se pressaient, désireux de vaquer à leurs affaires. La nuit, le quartier prenait des allures fantomatiques. Les lumières des rues jetaient des halos jaunâtres sur les trottoirs. Plutôt rares, des passants allaient d'une flaque de

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