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La bonne guerre

La bonne guerre

Titel: La bonne guerre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Studs Terkell
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volontaire
pour entrer dans l’infanterie. Comme j’avais été mitrailleur pendant la guerre
d’Espagne, je savais ce qu’étaient un angle de tir, une trajectoire et tous ces
trucs-là. Je me suis donc engagé en juin 1942, et comme l’US Army ne voulait
pas nous envoyer au front, nous les anciens rouges de la guerre d’Espagne, de
rage je n’ai pas tiré un seul coup de feu avant la fin de 1943.
    Ils nous ont coincés six semaines au Camp Dix, où en
principe on n’aurait pas dû rester plus de quelques jours. Avec un copain on
avait fini par connaître l’endroit comme notre poche, alors on est allés voir
nos fichiers. On était classés : PAF, premature antifascists, ce
qui revenait à dire que nous avions été antifascistes avant l’heure !
    Finalement on nous à envoyés à Camp Wheeler, en Géorgie. C’était
là qu’ils se débarrassaient du rebut : ressortissants allemands et
italiens, homosexuels, maquereaux, gangsters, condamnés de droit commun, plus
mon copain et moi. (Il rit.) C’était ce qu’on appelait la Branch
immaterial  : l’armée désarmée ! On nous donnait des fusils sans
percuteur et sans cran de sûreté. Et puis on a eu la chance d’entendre dire qu’un
des généraux avait un mal fou à trouver des volontaires pour l’infanterie. Il a
fait passer une annonce demandant à tous ceux qui avaient eu une expérience
dans l’infanterie d’aller en vanter les mérites à la radio du camp. Mon copain
et moi on a passé une heure à expliquer que c’était avec les fantassins qu’on
gagnait les guerres.
    Le général nous a dit : « Dites donc, les gars, vous
n’êtes pourtant pas d’âge à avoir participé à la guerre américano-espagnole. »
(Il rit.) « Non, bien sûr, mais à la guerre d’Espagne, oui. » « Qu’est-ce
que vous fichez ici, alors ? Vous étiez du côté de Franco ou quoi ? Non,
on se battait du côté du gouvernement. » Alors, il a déclaré :
« Je vous inscris immédiatement dans les cadres de l’infanterie. » C’est
comme ça qu’on est devenus caporaux.
    Tous les nouveaux venus doivent passer un test, et tous ceux
qui ont plus de 120 de QI sont envoyés à l’école d’élèves officiers. Comme nous
avions eu plus de 120 ils nous ont mis le grappin dessus. Moi je n’avais pas du
tout envie d’aller dans une école d’élèves officiers. Je connaissais des types
qui s’étaient fait leurs treize semaines d’instruction, qui s’étaient acheté
leurs uniformes, galons compris, et dont le brevet avait été déclaré nul et non
avenu par Washington. Moi, je ne voulais pas avoir à subir ça.
    Le commandant nous a dit : « Comment voulez-vous
que ça vous arrive, les gars, vous êtes bien trop bons. » Alors nous
sommes partis pour Fort Benning, et nous sommes devenus élèves officiers. On
était parmi les meilleurs parce qu’on savait déjà tout ce qu’on devait
apprendre. Mon voisin de lit a sympathisé avec moi. La femme d’un autre gars
est arrivée avec deux valises de whisky, et pendant les permissions j’allais
dans leur appartement avec mon copain. Puis au bout de quatre ou cinq semaines,
ce type est venu me dire : « Écoutez, les gars, je ne peux pas faire
ça : je suis censé faire le compte rendu exact de toutes vos activités, et
je ne sais même pas quoi mettre dedans. » Alors je lui ai dit :
« Tu veux que je le fasse,moi, ton rapport ? » (Il rit.) J’ai écrit un brillant rapport sur toutes nos activités, et il l’a
signé.
    Vers la sixième semaine mon capitaine m’a convoqué. Il a
sorti un drapeau américain de son tiroir. « Élève officier Wolff, est-ce
que vous reconnaissez ce drapeau comme étant celui de votre patrie ? »
J’ai répondu : « Oui, mon capitaine. – Êtes-vous prêt à défendre ce
drapeau ? – Oui, mon capitaine. » Il a remis le drapeau dans le
tiroir qu’il a refermé d’un coup sec. « Je ne comprends pas ce que
manigancent ces connards de Washington ! » (il rit.) Il ne
savait pas ce qui se passait, mais moi je savais que ça commençait à sentir le
roussi pour moi.
    Ils ont attendu qu’on parte en manœuvres, et là une jeep est
venue me rechercher. Tous les types disaient : « Wolff, il va réussir
sans problème, il n’a pas besoin de passer par tous ces trucs-là. » Moi je
savais bien que c’était loin d’être évident. Quand je suis arrivé j’ai vu que
mon paquetage était prêt, et j’ai reçu ordre de retourner à

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