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La campagne de Russie de 1812

La campagne de Russie de 1812

Titel: La campagne de Russie de 1812 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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considérables, faisaient de larges
et longes ruptures transversales dans les flammes et par-dessus, on
voyait des volcans dont les jets incalculables n'avaient de bornes
qu'aux cieux. »

    Le piquet de la
Garde vient reprendre son service. Mais bien des bonnets d'ourson
sont roussis...

    À nouveau,
le lendemain, l'Empereur quitte Petroskoïe. Il veut voir le
spectacle épouvantable de la ville embrasée. La nuit,
la ligne de feu ressemble à un volcan de plusieurs cratères.
« Ces gerbes de feu, racontera-t-il à
Sainte-Hélène, projetées dans tous les sens et
entraînées par la violence des vents, étaient
accompagnées dans leur ascension et dans leur marche rapide
par un sifflement épouvantable et par des détonations
foudroyantes... » On entend Napoléon s'exclamer :

    – Voici qui
présage de grands malheurs !

    On apporte à
l'Empereur l'affiche apposée par le gouverneur Rostopchine sur
le poteau indiquant le chemin de son château : « J'ai
embelli pendant huit ans cette campagne et j'y vivais heureux au sein
de ma famille. Les habitants de cette terre, au nombre de dix-sept
cent vingt, la quittent à votre approche, et moi, je mets le
feu à ma maison pour qu'elle ne soit point souillée par
votre Présence. » L'Empereur demeure abasourdi par
tant de haine et peut-être admiratif devant un tel sacrifice
patriotique. Parfois, il est en proie à des accès de
rage, tantôt il demeure silencieux et presque prostré.

    Pendant ce temps,
les soldats se précipitent au milieu de l'incendie, marchant
dans le sang, foulant aux pieds des cadavres et se livrant au plus
affreux pillage. « Parfois nous dit un rapport russe, les
maraudeurs déshabillaient complètement les passants ou
leur enlevaient leurs chaussures », un vol devenu l'idée
fixe des malheureux fantassins dont presque tous sont venus à
pied depuis Paris !... « Tous les Français sont
ivres après le dîner, poursuit le rapport, les habitants
les tuent et on les enterre la nuit. »

    Le 18 au matin,
alors que le vent apporte « l'odeur insupportable des
maisons brûlées », Napoléon, pour
regagner le Kremlin, traverse la ville, tandis que « des
cendres chaudes lui volent dans la bouche et dans les yeux ».
Le spectacle est hideux : « Sur notre route. nous dit
encore Constant, nos voitures étaient entourées d'une
foule de malheureux Moscovites qui venaient nous demander l'aumône.
Ils nous suivirent jusqu'au palais, marchant dans les cendres chaudes
ou sur les pierres calcinées encore brûlantes. Les plus
misérables allaient pieds nus. C'était un spectacle
déchirant de voir plusieurs de ces infortunés, dont les
pieds posaient sur des corps chauds, exprimer leur douleur par des
cris, ou des gestes d'un affreux désespoir. »

    – Est-ce là
tout ce qui reste de la grande Moscou ? s'exclame Napoléon,
horrifié.

    Ce même
jour, il écrit à Marie-Louise : « Tout a
disparu, le feu, depuis quatre jours, la consume. Comme toutes les
petites maisons des bourgeois sont en bois, cela prend comme des
allumettes. C'est le gouverneur et les Russes qui, de rage d'être
vaincus, ont mis le feu à cette belle ville. Deux cent mille
bons habitants sont au désespoir, et dans la rue et la misère.
Il reste cependant assez pour l'armée et l'armée a
trouvé bien des richesses de toutes espèces, car, dans
ce désordre, tout est au pillage. Cette perte est immense pour
la Russie. Tout son commerce en sentira une grande secousse. Ces
misérables avaient poussé la précaution jusqu'à
enlever ou détruire les pompes. »

    *****

    Deux jours plus
tard, le 20 septembre, le colonel Michaud – un Français
émigré au service de la Russie – se présente
chez le tsar toujours à Saint-Pétersbourg.

    Alexandre semble
ne pas avoir encore reçu la lettre que lui a adressée
Koutouzov, car il interroge fébrilement officier :

    – M'apportez-vous
de tristes nouvelles, colonel ?

    – Bien
tristes, Sire : l'abandon de Moscou.

    – Comment ?
Aurait-on perdu la bataille, ou bien aurait-on livré mon
ancienne capitale sans se battre ?

    – Sire,
malheureusement, les environs de Moscou n'offrent aucune position qui
aurait permis le risque de livrer bataille avec des forces
inférieures à celles de l'ennemi, le feld-maréchal
Koutouzov jugea opportun de conserver à Votre Majesté
une armée dont la perte, sans assurer le salut de Moscou,
aurait été grosse de conséquences...

    – L'ennemi
est-il entré dans la ville ?

    – Oui Sire

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