Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La campagne de Russie de 1812

La campagne de Russie de 1812

Titel: La campagne de Russie de 1812 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
Vom Netzwerk:
coiffée de la tour de la Trinité, et
s'installe au Kremlin dans l'appartement que l'empereur Alexandre
occupe lorsqu'il réside à Moscou : des salons, des
salles de fête et une chambre d'apparat dont les fenêtres
donnent sur la Moskova 14 .
On y accroche le portrait du roi de Rome par Gérard.

    – Je suis
donc enfin à Moscou, éprouve-t-il le besoin de répéter.
Je me trouve dans l'antique palais des tsars au Kremlin !

    Mais il n'a pu se
défendre d'un sentiment de malaise en traversant ces rues aux
très nombreuses maisons mortes Caulaincourt remarquera ses
traits « altérés ». Ces
incendies, qui s'allument sans raison apparente, l'oppressent.
Dédaignant la somptueuse couche des tsars, il s'étend
sur son petit lit de fer, enveloppé de rideaux verts, que l'on
a dressé à chaque étape, depuis la traversée
du nickelé.

    Il est brusquement
réveillé par Constant. Toute la pièce se trouve
éclairée par le ciel de Moscou embrasé. Les
incendies se sont propagés en d'effroyables proportions. La
ville entière est maintenant livrée aux flammes. Suivi
de Montesquiou et de Caulaincourt, l'Empereur monte au sommet de la
tour d'Ivan qui se dresse juste en face du Palais à Facettes.

    La vision, du plus
haut observatoire de Moscou, est dantesque. Une mer de feu couvre
littéralement la capitale, une mer dont le Kremlin, telle une
île encore intacte, semble être le centre. Napoléon,
atterré, demeure d'abord sans voix. Ses compagnons l'entendent
murmurer :

    Déjà
des voyous pillent les maisons désertes.

    – C'est
inconcevable ! Les barbares, les sauvages, brûler leur ville !
Qu'est-ce que des ennemis pourraient faire de pis ? Ils se vouent aux
malédictions de la postérité !

    – Surtout,
ordonne Napoléon au maréchal Mortier qu'il vient de
nommer gouverneur de Moscou, point de pillage ! Vous m'en répondrez
sur votre tête. Défendez la ville envers et contre tous
!

    Dans la soirée,
les foyers d'incendie, allumés le plus souvent par des forçats
libérés, se multiplient encore et l'on ne parvient
point à les maîtriser – le gouverneur Rostopchine
ayant fait donner l'ordre d'enlever toutes les pompes de la ville et
de leur faire prendre la route de Riazan. Il a même ordonné
bien plus que cela : l'incendie de toute la ville !

    À
Sainte-Hélène, Napoléon déclara :

    – Il ne
m'est pas démontré que les Russes aient voulu brûler
Moscou, ni qu'ils en aient reçu l'ordre !

    Mais alors
l'Empereur n'avait pas eu connaissance de la déposition du
commissaire Voronenko devant le tribunal de Moscou. « Le
14 septembre, à 5 heures du matin, a déclaré ce
dernier, le comte Rostopchine m'envoya à la Halle aux vins et
aux Halles Minty, au commissariat, et me chargea au cas où
l'ennemi entrerait subitement d'essayer de tout anéantir par
le feu ; ce que je fis jusqu'à 10 heures du soir, en divers
endroits, dans la mesure de mes forces, en présence de
l'ennemi. » Ce document se trouve conservé aux
Archives scientifiques et militaires de Moscou, sous le numéro
4346. Sans vouloir appeler a la barre de l'Histoire les combattants
de la Grande Armée, nous pensons que cette déposition
vient corroborer la déclarations des autres témoins
français demeurés à Moscou – tel le curé
de Saint-Louis ou l'émigré Beauchamp – et ruiner
la bien tardive mise au point de Rostopchine. Après avoir
paisiblement accepté, durant onze années, d'être
appelé « l'incendiaire de Moscou »,
Rostopchine, en 1823, accusera les Français d'avoir brûlé
Moscou... par imprudence « en visitant de nuit les
maisons » et en s'éclairant « avec des
bouts de chandelles, des torches et des fagots ».
Plusieurs même, précisera-t-il, « entretenaient,
au milieu des cours, des bûchers allumés pour se
chauffer ». Certes, l'absence de discipline dans l'armes
des vainqueurs peut être une raison suffisante pour expliquer
quelques foyers d'incendie, mais non pour élucider les raisons
de l'effroyable brasier. Le fait d'avoir donné l'ordre
d'enlever les pompes de la ville n'est-il pas accablant ? D'ailleurs,
ses enfants – dont la comtesse de Ségur – et les
descendants de Rostopchine considéreront toujours le
gouverneur comme celui qui avait eu la gloire, en mettant le feu à
Moscou, d'en avoir chassé Napoléon. Le comte Anatole de
Ségur, petit-fils du gouverneur, le précisera : « Après
un examen approfondi des faits et des témoignages, la
conviction se résume à ceci : le

Weitere Kostenlose Bücher