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La case de L'oncle Tom

La case de L'oncle Tom

Titel: La case de L'oncle Tom Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harriet Beecher-Stowe
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se retira en arrière d’un pas ou deux, – regardez-moi bien ! – regardez-moi là, – dans l’œil, – face à face ! » dit-il en frappant du pied à chaque pause.
    Tous les yeux, comme fascinés, fixèrent l’œil luisant et verdâtre de Simon.
    « À présent, dit-il en fermant sa grosse et lourde main en manière de marteau de forge, voyez-vous ce poing ? – Pesez-le ! – et il l’abattit sur la main de Tom. – Regardez-moi ces os !… Eh bien, je vous déclare que ce poing est devenu aussi dur que du fer à terrasser les nègres ! Je n’en ai pas encore vu un , que je n’aie pu jeter bas d’un seul coup. Il ramena ce redoutable poing si près du visage de Tom, que celui-ci sourcilla et se recula un peu. Je ne m’amuse pas à payer de vos damnés commandeurs ; je commande moi-même ; et j’y ai l’œil et la main. Vous n’aurez donc qu’à emboîter le pas, – à marcher vite et droit, dès que je parle. C’est le seul moyen de vous en tirer. Vous ne trouverez pas un seul point mou dans toute ma personne ; non, pas un. Ainsi, prenez garde à vous ! car je suis impitoyable ! »
    Les femmes retenaient leur souffle, et toute la bande demeura consternée. Simon tourna sur le talon, et alla se faire servir un verre de rhum à la buvette.
    « C’est là ma façon de débuter avec mes nègres, dit-il s’adressant à un homme, d’une tournure distinguée, qui avait assisté à son discours. J’ai pour système de commencer par le plus fort, afin qu’ils sachent à quoi s’en tenir.
    – En vérité ! dit l’étranger, le regardant avec la curiosité d’un naturaliste qui étudie quelque rare spécimen.
    – Oui, vraiment. Je ne suis point de vos gentilshommes planteurs, à doigts de lis, qui se laissent mener et flouer par quelque vieux renard de commandeur ! Tâtez seulement mes charnières ; – et il présenta ses articulations à l’examen. – Regardez-moi ce poing ! voyez plutôt si la chair n’en est pas devenue comme de la pierre, à force de s’escrimer sur les nègres. – Tâtez ! tâtez !
    L’étranger toucha du bout du doigt le formidable outil, et dit simplement :
    « Fort dur, en effet. Je suppose, ajouta-t-il, que la pratique a rendu votre cœur pour le moins aussi dur ?
    – Oui, je m’en flatte, dit Simon avec un gros rire. Je ne crois pas que là-dessus personne puisse me damer le pion. Il n’y a pas de jérémiades ou de câlineries de nègres qui me fassent broncher d’un pouce ; – c’est un fait.
    – Vous avez là un beau lot.
    – Beau et bon, reprit Simon. Il y a un certain Tom, qu’ils m’ont dit être quelque chose de rare. Je l’ai payé un peu cher, parce que j’en veux faire un gardien, une espèce de régisseur. Une fois qu’il sera purgé des sottes idées qu’il a prises en se voyant traité comme les nègres ne doivent jamais l’être, il fera fameusement l’affaire ! Quant à la femme jaune, j’ai été attrapé. Je la crois maladive ; mais je m’arrangerai pour en tirer ce qu’elle me coûte. Ce sera bien le diable si elle ne dure pas un an ou deux ! Je ne suis pas pour épargner le nègre, moi. Usez et achetez, c’est ma maxime. Ça donne beaucoup moins de tracas, et en résumé je suis sûr qu’il y a économie ; et Simon sirota son rhum.
    – Combien durent-ils, en général ? demanda l’étranger.
    – Ma foi, je ne sais pas ; c’est selon leur constitution. Les plus robustes vont de six à sept ans ; les plus faibles sont à bout après deux ou trois années. Au commencement, je me donnais un mal du diable pour tâcher de les faire durer ; – c’étaient des médecines quand ils étaient malades, des couvertures, des habits, tout un tremblement, pour les tenir un peu propres. Eh bien, ça ne servait absolument à rien : j’y perdais des masses d’argent, sans compter ma peine. À présent, voyez-vous, je les fais marcher malades ou bien portants. Quand un nègre crève, j’en achète un autre ; et, en définitive, c’est meilleur marché et plus simple. »
    L’étranger s’éloigna, et alla s’asseoir près d’un monsieur qui avait écouté la conversation avec un malaise évident.
    « Il ne faut pas prendre cet homme pour un échantillon des planteurs du Sud, dit le dernier.
    – J’espère que non, répliqua le jeune homme avec emphase.
    – C’est un misérable, brutal, grossier, ignoble !
    – Cependant vos lois lui permettent de tenir un nombre indéfini

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