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La chambre des officiers

La chambre des officiers

Titel: La chambre des officiers Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Dugain
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dimensions modestes, et d'un mauvais go˚t uniformément réparti. La couleur pourpre des murs donnait à la pièce un faux air cossu et les meubles Second Empire sortaient tout droit d'un grenier de campagne.
    Deux vieux messieurs cachés derrière un grand journal du jour semblaient attendre leur tour, confortablement installés dans l'anonymat de la fumée de leur cigare.
    La ribaude ne dissimula pas son étonnement en découvrant notre équipage.
    - Eh bien, mes pauvres garçons, dans quel état ils vous ont mis! Je suis désolée, je n'ai plus de fille disponible. D'ailleurs je ne suis pas certaine qu'elles acceptent.
    - Elles préfèrent probablement de vieux embusqués, gronda Penanster. Ou des réformés de complaisance, peut-être. Ou pourquoi pas, "des Boches!
    Un rictus de dinde dévoila une rangée de dents g‚tées r
    - Je vais voir ce que je peux faire. Asseyez-vous dans le coin, je vais vous servir des rafraîchissements. Soyez gentils, restez là. Nous comprenez, je ne voudrais pas que mes autres clients... enfin... je reviens. Vous avez de l'argent, au moins?
    Au regard de Penanster, elle comprit que la question était déplacée. Elle revint dix minutes plus tard, tirant par la main deux jeunes femmes échevelées qui essayaient de se rajuster
    1
    - Ces trois messieurs sont venus spécialement pour vous, mesdemoiselles. Je vous demande de faire honneur à notre maison.
    J'encourageai Penanster et Weil à passer
    P
    les premiers. La maquerelle s'éloigna de sa démarche de volaille en m'assurant que je n'aurais pas longtemps à attendre.
    Une porte cachée derrière une tenture s'ouvrit sur un homme jeune et élégant qui ne paraissait pas craindre le regard des autres. L'instant d'après, une fille qui ne devait pas avoir vingt ans, des cheveux blonds défaits, des joues colorées masquant difficilement le reste d'un visage blafard, s'approcha de moi.
    Elle me salua d'un bonjour de gamine que l'on présente à un grand-oncle éloigné.
    Je fermai la porte derrière moi.
    Elle se dénuda sans pudeur et sans la moindre esquisse de provocation. Puis elle resta là, plantée au milieu de la pièce, dans l'attente d'un mot, d'un ordre.
    Ses formes étaient parfaites, ce qui ajoutait à ma confusion.
    - Je dois vous dire, mademoiselle, que je vous trouve très belle et, pour être franc, tout à fait à mon go˚t. Je ne suis pas venu ici contraint, pas du tout, mais à la suite d'une sorte de pari que j'ai fait avec des amis.
    Elle écoutait mon discours avec un ennui manifeste, mais avec une certaine reconnaissance pour la trêve qu'il lui accordait.
    - Pour dire vrai, repris-je, je n'avais jamais mis les pieds dans un endroit pareil, et je n'en avais pas l'intention, si ce stupide pari...
    Alors
    comme nous avons un peu de temps, nous pourrions peut-être causer?
    - Causons, c'est toujours ce que me disent les vieux messieurs qui ne peuvent plus. Vous êtes vieux, vous aussi?
    Comme je ne répondais pas, elle dit encore - C'est à la guerre que vous vous êtes fait - Oui.
    - Vous avez de la chance. Mon frère, lui, il t mort.
    - Oui, j'ai certainement eu de la chance. - Alors, qu'est-ce qu'on fait? On cause ou n bouge. Si on cause, vous n'allez pas demaner un rabais?
    - Non, pas du tout.
    - Alors de quoi va-t-on parler? Surtout u'avec ce bandeau qui tombe sur la bouche, je e comprends pas tout ce que vous dites.
    Sans se rhabiller, elle s'assit au coin du lit, s genoux serrés.
    Le désir et le sentiment de ma dignité engaèrent alors en moi un combat sans merci. Comme je la dévisageais, d'autres images e visages féminins se superposèrent au sien. 'étaient ceux de Clémence et de Marguerite. 'amour et le respect.
    Le désir l'emporta.
    II ne me restait plus qu'à régler mes comptes avec cette tristesse qui s'empare
    des ‚mes lorsque l'acte a été consommé sans amour.
    En me rhabillant, et pour me donner bonne conscience, je voulus lui prêter une attention particulière. J'aurais pu sombrer dans le ridi cule en lui proposant de la sortir de là. Il me restait suffisamment de pudeur pour n'en rien faire. Je lui promis une visite prochaine, ce qui était le dernier de ses soucis.
    Penanster et Weil m'attendaient dans le petit boudoir de l'entrée. Je sentis à leur regard que j'avais été un peu long.
    Nous pay‚mes sans discuter, laissant même un généreux pourboire.
    Sur le chemin du retour, Penanster nous offrit sans un mot une de ces cigarettes anglaises qu'il s'était procurées je ne

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