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La chambre maudite

La chambre maudite

Titel: La chambre maudite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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son prévôt avec bonne humeur et décida de ne pas s’inquiéter davantage des rapines et pillages qui, durant son absence, avaient assombri la contrée. La garnison était de nouveau au complet à Montguerlhe, et les guetteurs aguerris auraient tôt fait désormais de voir venir une attaque massive. Depuis son éperon rocheux, la forteresse dominait ses voisins, et il ne s’était réellement trouvé d’assaillants que durant la guerre de Cent Ans. Mais là encore la position stratégique de Montguerlhe lui avait permis de barrer la porte du pays thiernois de façon rigoureuse.
    François s’en fut embrasser son épouse, et au dîner annonça avec plaisir qu’il regagnerait Vollore dès le lendemain. Seul. Durant toute la durée des travaux. Antoinette dut crisper ses doigts sur ses jupons pour ne pas hurler de joie, et parvint à grimacer, les yeux baissés, un pénible :
    –  J’ignore ce qui vous pousse à retourner là-bas, messire, mais vous me manquerez.
    –  Vous vous ferez vite à mon absence, ma dame, repartit François dans un rire clair. L’enfant que vous portez-vous distraira. Tout est dit. Huc saura où me trouver en cas de besoin ; pour le reste, ma retraite ne tolérera aucune visite. D’ailleurs la neige s’agglutine en abondance et il ne fera bientôt pas bon prendre la route.
    Antoinette hocha la tête. Cette décision la satisfaisait au plus haut point. En réalité, elle se doutait que François y viendrait. Elle savait pertinemment qu’il ne pourrait s’éloigner de ses travaux aussi longuement. Elle coula un regard complice à Huc qui partageait leur table. Comme elle détournait la tête pour éviter de se trahir, elle croisa le visage d’Albérie dans le renfoncement de la porte. L’expression qu’elle lut sur les traits de la jeune femme la glaça d’effroi. Tout en elle n’était que haine. Machinalement, elle suivit la direction du regard métallique. Albérie souriait froidement en fixant François de Chazeron.
     
    Le soleil était déjà haut lorsque François s’éveilla le lendemain à Montguerlhe, un goût âcre dans la bouche. Il n’avait cessé de cauchemarder toute la nuit, allant même jusqu’à imaginer un visage penché au-dessus de sa couche, un visage qui lui rappelait vaguement quelqu’un, mais il n’aurait su dire qui. Puis les traits s’allongeaient, s’étiraient et faisaient place à une tête de loup monstrueuse dont la gueule s’ouvrait pour engloutir sa face effrayée. Il garda un moment les yeux ouverts vers la fenêtre. Ce matin encore le ciel était clair, mais des brumes opaques s’amoncelaient lentement autour de la montagne. Dès le lendemain ou le surlendemain il neigerait en masse. Il était temps pour lui de retourner à ses fourneaux. Si le diable lui avait offert cet or, c’était sans nul doute pour l’assurer qu’il touchait au but. Il était décidé à recommencer ses recherches à partir des lignes que les flammes avaient épargnées. C’était sans doute là qu’il s’était fourvoyé. Il rejeta résolument les couvertures en arrière et fît mine de s’asseoir. A peine pourtant eut-il posé pied à terre qu’un vertige le saisit tandis qu’un tremblement agitait ses jambes jusqu’à gagner son corps tout entier. Il eut l’impression qu’on lui enfonçait une dague dans le ventre, et aussitôt il se mit à vomir sans pouvoir s’arrêter.
     
    Isabeau virevolta à plusieurs reprises devant le miroir qui lui renvoyait une image d’elle si lointaine qu’elle en avait presque oublié avoir été jolie. A ses côtés Bertille battait des mains comme une enfant, mais Isabeau n’y prêtait aucune attention, tant la naine généreuse et spontanée affichait cette habitude en toute occasion.
    –  Vous êtes superbe, dame Isabelle, approuva la couturière en s’agenouillant à ses pieds pour reprendre l’ourlet de la jupe. Vraiment superbe…
    Et de fait, elle l’était malgré sa toilette sobre. Bertille l’avait tout d’abord conduite chez un barbier pour discipliner sa chevelure que le manque de soins au fil de ces années avait rendue revêche et cassante. Ses onguents avaient fait merveille, et les fils de soie et de perles qui retenaient son demi-chignon duquel partait une longue tresse affinaient son visage légèrement fardé. Ainsi parée, Isabeau se vit avec quinze années de moins, comme si brusquement on avait effacé de sa vie les traces de ses violences. Un instant le visage de Benoît se

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