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La chapelle du Diable

La chapelle du Diable

Titel: La chapelle du Diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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frais du matin, elle laissa tomber le gant sur le dessus
     de sa commode et prit sa brosse à cheveux. Malgré elle, elle revit Ernest lui
     prendre des mains cette même brosse et la transformer en un instrument de
     caresse lors de leur nuit de noces. Ernest... Si elle n’avait pas rencontré
     John, son mari serait encore en vie... Léonie fit un effort et ferma son esprit
     à ses pensées. Elle était jeune et elle avait dansé avec le diable. Tout ce qui
     arrivait était sa faute... Elle lissa ses cheveux en un chignon serré qui lui
     rappela celui de mademoiselle Brassard. Dans sa lettre à cette dernière, Léonie
     lui affirmait qu’elle ne lui tenait pas rancœur. Le diable a tantde visages… celui de l’amour parfois. Elle l’informait aussi que La belle du
     lac fermait ses portes définitivement. Elle s’habilla, choisissant sa robe
     noire, celle des jours de deuil, et l’enfila. Elle ouvrit son coffret à bijoux,
     retira son jonc de mariage qu’elle portait encore malgré son veuvage et le mit
     dedans. Elle se voulait dépouillée. Du bout des doigts, elle fouilla dans la
     boîte. Que de menus objets gardés en souvenir au cours des années. Elle sourit
     en prenant dans le creux de sa paume une petite roche rosée. Elle venait du bord
     du lac Saint-Jean. C’était Ti-Georges qui la lui avait offerte. Elle se
     promenait sur la plage, avec son neveu de cinq ans, c’était le printemps... Le
     printemps de la mort d’Anna. Elle rejeta le trésor et se demanda si Ti-Georges
     suivrait son conseil et s’il pardonnerait à son fils Jean-Marie comme elle l’en
     implorait dans sa lettre. Elle referma le couvercle, ramassa son sac à main, le
     paquet de missives et sortit lentement de sa chambre.
    Elle s’assura que tout était en ordre dans la cuisine. Elle eut un regard
     tendre en remarquant les dentelles que Marie-Ange avait mises sur chaque
     tablette pour faire plus joli. Partout, on reconnaissait son empreinte. Sa nièce
     avait décidé que la pièce manquait de gaieté et elle avait peint sur chaque
     armoire une délicate fleur violette. Puis elle avait confectionné de nouveaux
     rideaux à partir d’un tissu à carreaux que Léonie trouvait franchement laid.
     Elle imaginait la surprise de Marie-Ange lorsqu’elle découvrirait dans sa lettre
     que sa tante lui faisait don de la maison montréalaise. Les clés seraient chez
     le notaire. Elle alla au salon et pianota quelques notes discordantes. Elle
     n’avait jamais appris à jouer. Ah ! sa Julianna... sa merveilleuse fille
     adoptive. Léonie avait longuement pesé ses mots en lui écrivant. Elle voulait
     tout lui avouer, en détail, puis elle se dit qu’il valait mieux ne pas la
     troubler. Elle lui parla plutôt de la perte de son bébé, lui dit qu’elle
     comprenait sa peine et la consola comme si elle avait été auprès d’elle. Elle
     avait entendu son appel au secours et même si elle ne serait plus là de corps,
     son amour l’engloberait pourtoujours… Elle lui parla d’Anna, sa
     vraie mère, et lui rappela que la mort ne sépare pas ceux qui s’aiment.
    Léonie prit une grande respiration. Sur la tablette du bas de la bibliothèque
     de chêne, près de la fenêtre, elle prit un grand album. Elle l’ouvrit et
     parcourut les photographies qui y étaient soigneusement insérées. Anna et
     Alphonse, Ti-Georges et ses frères et sœurs, Marie-Ange jeune adolescente,
     Julianna en robe de première communion, Julianna lors d’une représentation
     musicale... Ernest et François-Xavier posant avec fierté devant leur fromagerie,
     Ernest et elle, à leur mariage... Brusquement, elle délaissa ces souvenirs de
     papier et alla ramasser un morceau de tissu gris qu’elle venait d’apercevoir
     sous un des fauteuils. Elle reconnut un des gants appartenant à Albert. Il avait
     dû l’échapper. Elle alla devant le foyer et y alluma un feu. Dans les flammes,
     elle jeta l’accessoire. Que les feux de l’enfer brûlent la dernière trace de
     cette bête…

    Julianna apporta une tasse de café à son mari et la déposa sur la table.
     Celui-ci, penché sur les plans de la fromagerie, la remercia d’un air
     absent.
    Elle s’approcha.
    — Chus en train de mourir d’inquiétude, François-Xavier, lui dit-elle. Y faut
     faire quelque chose !
    François-Xavier releva la tête.
    — Ben non Julianna, essaie de pas trop t’en faire…
    — C’est pas normal ! reprit-elle. Il est arrivé de quoi

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