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La chapelle du Diable

La chapelle du Diable

Titel: La chapelle du Diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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nus et
     en jaquette, elle s’était dépêchée d’aller voir ce que son père lui voulait. Il
     allait réveiller ses petits frères et sœurs s’il continuait à beugler son prénom
     ainsi ! En passant devant lachambre de ses parents, elle avait
     chuchoté à sa mère de se rendormir. Sa chère maman était si fatiguée. Elle se
     privait, Rolande le savait bien, et elle acceptait tous les ouvrages qui lui
     tombaient sous la main. Elle avait encore dû coudre jusqu’aux petites heures de
     la nuit. En bâillant, Rolande était descendue. C’était presque l’aube. Elle
     avait été surprise quand elle s’était rendu compte que son père n’était pas
     seul. Un homme dans la trentaine se tenait à ses côtés et la détaillait d’un air
     intéressé. Les yeux de l’inconnu s’étaient attardés sur sa jeune poitrine comme
     jamais on ne l’avait fait. Mal à l’aise, elle avait croisé instinctivement les
     bras et demandé à son père ce qu’il voulait.
    — Rolande, j’te présente monsieur Paul-Émile Belley.
    Son père avait la voix pâteuse et son élocution était difficile.
    Un silence gênant s’était installé.
    — Monsieur, avait salué enfin timidement Rolande.
    — Retourne dans ton lit astheure, lui avait-il ordonné.
    Rolande n’avait rien compris à ce manège. Elle était remontée à l’étage tout en
     tendant l’oreille pour saisir la conversation entre les deux hommes.
    — Pis, ça fait-tu votre affaire ? s’était impatienté le père de la jeune
     adolescente.
    Paul-Émile avait sorti une liasse de billets de son portefeuille.
    — La moitié comme convenu, avait-il dit. L’autre quand j’vas revenir le mois
     prochain.
    Rolande s’était recouchée et les voix s’étaient estompées. Elle ressentait un
     certain malaise mais son père n’en était pas à ses premières frasques. Elle ne
     s’était pas rendormie ce matin-là, tournant dans sa tête ce bizarre incident.
     Les jours suivants, sa mère fuyait son regard et affichait une triste mine. Son
     père, au contraire, était de bonne humeur. Le loyer avait été payé. Un soir,
     Rolande avait demandé à sa mère ce qu’elle cousait.
    — C’est une robe pour ton mariage.
    Rolande était restée sans voix.
    Elle avait eu beau pleurer, son père, sa mère et une voisine
     l’avaient menée à la petite église du coin... hier... hier matin... un semblant
     de robe de mariée sur le dos, sa mère n’ayant eu ni le temps ni les moyens de
     faire des miracles. Hier... Elle était si jeune. Hier... Paul-Émile Belley,
     prenez-vous cette femme... Hier... Personne ne lui avait souhaité un bon
     anniversaire... Hier, elle avait eu 15 ans.

    Avec précaution, Ti-Georges avait transporté Marguerite dans ses bras et
     l’avait déposée au fond de la brouette que Julianna avait pris la peine de
     recouvrir d’une couverture en plus d’y mettre un oreiller. Ti-Georges poussa sa
     femme, encadré par Jean-Marie et Elzéar qui surveillaient le ballant du véhicule
     improvisé, sur un petit chemin qui serpentait le long de la grange des Belley.
     Ils s’éloignèrent de la ferme et se dirigèrent vers la forêt. Julianna suivait,
     un des jumeaux dans les bras, à côté de Léonie qui portait le frère identique.
     Sophie gambadait en tenant un panier en osier dans ses mains. Delphis et Samuel
     se chamaillaient avec un bâton. Marguerite souriait de bonheur. Léonie l’avait
     coiffée et lui avait enfilé, à sa demande, une jolie robe de coton fleuri, très
     démodée, mais que la malade affectionnait particulièrement. Le visage de
     Ti-Georges était tout enflé de la récente bagarre avec son beau-frère, pourtant
     l’homme était quand même rayonnant. Cela lui avait fait le plus grand bien de
     cogner ainsi sur cet imbécile de Paul-Émile ! Marguerite avait tout voulu savoir
     des détails de l’altercation. Julianna la lui avait résumée tout en lui
     promettant de n’omettre aucun détail plus tard. Malgré qu’ils n’aillent pas très
     loin, elle ne voulait pas s’attarder. Quand Julianna lui avait confié ce qu’elle
     avait imaginé pour réaliser son souhait, Marguerite avait applaudi comme une
     enfant. Elle trouvait le projet merveilleux ! À l’aide d’un dessin, elle avait
     désigné à Julianna et à Ti-Georges, l’emplacement idéal.
    Sous un superbe soleil, la drôle de procession continua son
     parcours. Marguerite avait les yeux brillants

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