La chasse infernale
rassit sur son tabouret.
— Pourquoi, ajouta-t-il, le fantôme de Montfort ne peut-il nous laisser en paix ?
Il leva les yeux.
— Sir Hugh, que va-t-il se passer à présent ? Je ne peux faire surveiller Sparrow Hall éternellement. Il faut avertir le roi.
Une touche d’acrimonie résonna dans sa voix.
— Il donnera l’ordre de disperser les maîtres et de fermer ce collège.
— Les proctors de l’université et les autres auront leur mot à dire ! s’exclama Barnett. Notre statut et nos droits sont les mêmes que ceux de notre sainte mère l’Église. Nous ne sommes pas quantité négligeable qu’on peut balayer d’un revers de main.
— Pourquoi êtes-vous tellement sûr qu’Appleston n’est pas le Gardien ? demanda Churchley. Nous n’avons que des conjectures pour étayer vos conclusions.
— Un instant, un instant, murmura Corbett. Messire Alfred, j’aimerais jeter un coup d’oeil dans la bibliothèque. Je rangerai ce livre moi-même. Ranulf, ici présent, vous rendra les Confessions. Il peut toujours étudier cet ouvrage dans les bibliothèques royales de Westminster.
Le magistrat, suivi de son serviteur, se dirigea vers la porte.
— Mais qu’aucun de vous ne s’en aille, les prévint-il. Le feu brûle encore et il faut que le pot finisse par bouillir.
— Que vouliez-vous dire ? demanda Ranulf alors qu’ils se dirigeaient vers la bibliothèque.
Corbett s’arrêta.
— Je ne sais pas, mais cela les fera réfléchir. Le Gardien prendra peut-être une autre initiative et, cette fois, ne sera pas aussi adroit. Va chercher leur livre. Je t’attendrai dans la bibliothèque.
Corbett ouvrit la porte de celle-ci et entra. Par les archères, placées haut dans le mur, filtrait une faible lumière, mais il repoussa les volets, à l’autre extrémité de la pièce, ce qui lui permit d’avoir vue sur le jardin. Il alla au bureau de l’archiviste et ouvrit le registre. Il trouva la trace de l’emprunt de Ranulf, et, plus tard, de celui d’Appleston pour le livre qu’il venait de rapporter. Le magistrat fit le tour de la pièce. Chaque étagère portait une marque, reproduite à l’intérieur des volumes. Il trouva la place du livre d’Appleston et retira avec soin les ouvrages voisins pour les examiner. Beaucoup étaient du même genre : des écrits du temps de la grande guerre civile et des extraits de chroniques concernant Montfort. Un volume, plus épais que le reste, contenait les papiers privés d’Henry Braose, le fondateur du collège. En les feuilletant, son coeur s’emballa. Certaines pages avaient été nettement coupées avec un couteau. Le magistrat ignorait si cela était récent ou datait de l’époque où le livre avait été relié. Corbett emporta le livre et s’installa sur un siège près de la fenêtre pour l’étudier. Il était essentiellement composé de lettres échangées par Braose, le roi et des membres du Conseil royal. Quelques-unes avaient été écrites par Lady Mathilda, la soeur bien-aimée de Braose ; trois ou quatre étaient adressées à Roger Ascham, son ami. Corbett referma le livre et regarda la couverture : pas de poussière, on l’avait récemment consulté. La porte s’ouvrit et Ranulf entra.
— Je vais le remettre en place, Messire, proposa-t-il en brandissant les Confessions. Je sais où il se range. Avez-vous découvert quelque chose d’intéressant ?
— Oui et non, répondit Corbett.
Il montra à Ranulf le volume aux pages manquantes.
Ils continuèrent leurs recherches sur les étagères. Des serviteurs leur proposèrent de se restaurer, mais ils déclinèrent l’offre. Tripham et Lady Mathilda entrèrent aussi pour leur offrir leur aide. Corbett murmura distraitement que ce n’était pas nécessaire, et lui et Ranulf reprirent leur quête. De temps à autre une cloche sonnait et ils entendaient des bruits de pas pressés à l’extérieur.
— Rien, conclut le magistrat. Je ne trouve rien.
Il s’arrêta quand la porte s’ouvrit pour laisser passer Messire Churchley.
— Sir Hugh, il faut habiller le corps d’Appleston et le préparer pour l’enterrement. Messire Tripham veut aussi savoir si votre serviteur a rendu le livre ; il vaut très cher.
— On peut enlever la dépouille, répondit Corbett. Et Ranulf a bien rapporté le livre.
— Combien de temps vous faut-il encore ?
— Autant que nous le jugerons nécessaire, Messire Churchley ! rétorqua sèchement le magistrat.
Il
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