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La chute de l'Empire Romain

La chute de l'Empire Romain

Titel: La chute de l'Empire Romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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cela, mais que nous ayons accepté un traité qui impliquait une telle abdication me donna la nausée.
    Nos empereurs avaient cru, en capitulant devant le Barbare Attila, sauver leur avenir. J’ai pensé au contraire que nous nous étions perdus.
    De retour à Rome, j’appris que les hordes d’Attila avaient franchi le Rhin et étaient entrées en Gaule.
    Les villes romaines brûlaient. Dieu nous abandonnait.

27.
    J’ai recueilli les témoignages des survivants. Leurs yeux étaient remplis d’épouvante.
    Ils regardaient fixement et j’avais pourtant le sentiment qu’ils ne me voyaient pas, même s’ils répétaient mon nom, ma qualité, ce qu’ils attendaient de moi.
    « Écris, Priscus, écris, il faut qu’on sache, que dans la nuit des temps on se souvienne. »
    Leur voix tremblait lorsqu’ils évoquaient ces cinq cent mille guerriers qui composaient l’armée d’Attila, certains en hochant la tête murmuraient « sept cent mille », ajoutant que toute l’Asie s’était enrôlée derrière les Huns munis de leurs longs carquois.
    Il y avait les Alains, les Neures, les Bellonotes, les Gélons, peints et tatoués, qui avaient pour arme une faux et pour parure une casaque de peau humaine.
    Il y avait les Scandinaves, armés du bouclier rond et de leur courte épée. Les Hérules, rapides à la course, invincibles au combat, mais cruels, et la terreur des autres Germains.
    J’ignorais bon nombre de ces peuples qui semblaient se déverser d’un chaudron de sorcière dans lequel bouillonnait une inépuisable mixture.
    C’était comme si tous les Barbares purs s’étaient rangés du côté d’Attila et les demi-Barbares du côté de tous ceux qui prétendaient encore être l’Empire romain d’Occident.
    C’était aussi une « guerre sociale » comme Rome en avait connu.
    Le déversement en Gaule de ces centaines de milliers de guerriers guidés par Attila avait provoqué un chaos inextricable, et la misère, la famine, le désespoir, la terreur et l’épouvante − je réécris ce dernier mot à dessein − avaient à leur tour produit la guerre civile.
    Les Bagaudes, en dépit des efforts d’Aetius, qui les avait plusieurs fois vaincus, massacrés, dispersés, continuaient de piller et de tuer.
    Ils étaient jeunes, n’avaient pour avenir que la destruction, et étaient prêts à se joindre aux cohortes d’Attila.
    C’est ce qu’avait fait, dès 448, l’un de leurs chefs, le médecin Eudoxe − « homme d’une grande science mais d’un esprit pervers », m’avait déclaré un chroniqueur qui l’avait côtoyé.
    Arrivé chez les Huns, Eudoxe avait incité Attila à porter la guerre en Gaule, lui promettant l’appui des brigands, des esclaves et des paysans révoltés qui composaient les Bagaudes.
    Et les villes tombèrent aux mains des Huns et des Barbares qui les avaient ralliés.
    Les noms de Strasbourg, de Spire, de Worms, de Mayence, de Tongres, d’Arras, de Besançon m’ensevelirent comme s’il s’agissait de monceaux de cadavres.
    À Metz, la veille des Pâques, le 7 avril 451, l’évêque fut épargné et emmené captif, mais ses prêtres furent tous égorgés au pied de l’autel, dans l’église où ils s’étaient réfugiés.
    Les habitants périrent soit par l’épée, soit par les flammes de leurs maisons qui furent réduites en cendres.
    Il ne resta debout qu’un oratoire.
    J’écoutais, je notais, et mon âme tremblait.
    J’assistais à la fin de cette civilisation romaine qui avait nourri mon enfance et dont ma famille était si fière.
    Peut-être ne restait-il d’elle que le christianisme, la mémoire de ces évêques qui tentaient de préserver la vie et les biens de leurs fidèles.
    Ce fut ainsi à Reims, où Attila et ses hordes entrèrent sans rencontrer de résistance.
    La ville était presque déserte, les habitants s’étant retirés dans les bois, mais l’évêque nommé Nicasius restait dans la cité avec une poignée de fidèles courageux pour attendre ce qu’il plairait à Dieu.
    Quand il vit, après la rupture des portes, les Barbares se précipiter dans la ville, il s’avança vers eux sur le seuil de son église, entouré de prêtres, de diacres, et suivi d’une troupe de gens du peuple qui cherchaient protection près de lui.
    Revêtu de ses ornements épiscopaux, l’évêque chantait d’une voix forte ce verset d’un psaume de David : « Mon âme a été comme attachée à la terre ! Seigneur, vivifie-moi selon ta

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