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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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« C’est
inquiétant.
    — Je suis bien de cet avis.
Demain, ils risquent de refuser de tirer sur leurs nouveaux amis.
    — Que ferions-nous
alors ?
    — Il nous faut une bataille,
le plus vite possible, pour que les choses reprennent leur cours normal. Si les
deux camps s’envoient des obus dès demain matin, les hommes recommenceront à se
détester mutuellement.
    — J’espère que tu as raison.
    — Et à part ça, comment
vas-tu, mon vieux ? »
    Fitz se rappela la bonne nouvelle
et son visage s’éclaira. « Je suis père depuis quelques heures. Bea a
donné naissance à un garçon. Tiens, je t’offre un cigare. »
    Ils fumèrent ensemble. Walter lui
apprit qu’il revenait du front oriental. « Les Russes sont tous corrompus,
dit-il avec une grimace de dégoût. Les officiers revendent les provisions au
marché noir et laissent leurs hommes souffrir de faim et de froid. La moitié
des habitants de Prusse-Orientale portent des bottes de l’armée russe achetées
à bas prix, alors que les soldats du tsar marchent pieds nus. »
    Fitz lui apprit qu’il était allé
à Paris. « Voisin, ton restaurant préféré, est toujours ouvert », lui
dit-il.
    Les soldats avaient organisé un
match de football, Angleterre contre Allemagne, empilant des casques pour
matérialiser les buts. « Il faut que j’aille signaler ce qui se passe,
murmura Fitz.
    — Moi aussi. Mais d’abord,
dis-moi : comment va Lady Maud ?
    — Très bien, je crois.
    — J’aimerais que tu lui
transmettes mon meilleur souvenir. »
    Fitz fut frappé par l’insistance
avec laquelle Walter lui fit cette requête pourtant banale. « Bien sûr. Tu
as une raison en particulier ? »
    Walter détourna le regard. « Juste
avant de quitter Londres… j’ai dansé avec elle au bal de Lady Westhampton.
C’est la dernière chose civilisée que j’aie faite avant cette verdammten guerre. »
    Walter semblait en proie à une
violente émotion. Sa voix tremblait et il n’avait pas l’habitude d’émailler son
anglais de mots allemands. Peut-être était-il lui aussi contaminé par cette
atmosphère de fête.
    « J’aimerais qu’elle sache
que je pensais à elle le jour de Noël », reprit-il. Il fixa sur Fitz des
yeux humides. « Tu le lui diras, mon vieux ?
    — Je n’y manquerai pas. Je
suis sûr qu’elle en sera très touchée. »

XIV. Février
1915
    1.
    «Je suis allée chez le docteur,
dit la voisine d’Ethel. Je lui ai dit : “ J’ai la
chatte qui me démange. ” »
    La pièce croula sous les rires.
Au dernier étage de cette petite maison de l’est de Londres, près d’Aldgate,
vingt femmes étaient assises en rangées de part et d’autre d’un établi tout en
longueur, chacune devant sa machine à coudre. Il n’y avait pas de chauffage et
l’unique fenêtre était fermée hermétiquement pour ne pas laisser entrer le
froid du mois de février. Le plancher était nu. Le plâtre chaulé des murs s’effritait
sous l’effet de l’âge, laissant apparaître les lattes par endroits. La présence
de vingt femmes dans ce local exigu finissait par rendre l’atmosphère
étouffante sans parvenir pourtant à la réchauffer, et elles gardaient toutes
manteau et chapeau.
    Elles venaient de s’arrêter pour
une brève pause et les pédales restaient silencieuses sous leurs pieds. La
voisine d’Ethel s’appelait Mildred Perkins, elle avait le même âge qu’elle et c’était
une authentique cockney. C’était aussi sa locataire. Sans ses incisives
proéminentes, elle aurait été très belle. Les histoires salées étaient sa
spécialité. Elle conclut : « Et figurez-vous que le docteur, il me
dit : “  Il ne faut pas dire ça, c’est un gros mot." »
    Ethel sourit. Mildred réussissait
à égayer leurs douze heures de labeur quotidiennes. Jamais Ethel n’avait
entendu parler aussi crûment. À Ty Gwyn, les domestiques s’exprimaient avec
distinction. Ces Londoniennes n’avaient pas froid aux yeux. Il y en avait de
tous âges et de toutes nationalités ; certaines parlaient à peine anglais,
notamment les deux réfugiées belges qui avaient fui l’envahisseur allemand.
Leur seul point commun était d’avoir désespérément besoin d’un emploi.
    «Alors je lui fais : “  Mais qu’est-ce que je dois dire, docteur ? ”  Et lui : “  Dites que vous avez le doigt qui vous démange. ”  »
    Elles confectionnaient des
uniformes pour l’armée, des milliers d’uniformes,

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