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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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chocolat. Grigori ne quittait pas des yeux la bouche de
Katerina, ses lèvres pleines. Il adorait la regarder parler. Malgré son menton
résolu et ses yeux bleus au regard hardi, elle lui paraissait toujours aussi
vulnérable. Vladimir s’était endormi dans ses bras, apaisé par le bercement de
Grigori et par la voix de sa mère. Il le déposa délicatement dans le lit de
fortune que Katerina lui avait préparé dans un coin de la pièce. Le matelas n’était
qu’un sac rempli de chiffons, mais le bébé s’y blottit confortablement sous la
couverture en suçant son pouce.
    Neuf heures sonnèrent. Katerina
demanda : « à quelle heure tu dois être rentré ?
    — Dix heures. Il faut que j’y
aille.
    — Attends. » Elle passa
les bras autour de son cou et l’embrassa.
    Ce fut un instant délicieux. Les
lèvres de la jeune femme étaient douces et souples contre les siennes. Il ferma
les yeux une seconde, inhalant profondément le parfum de sa peau. Puis il s’écarta.
« Il ne faut pas.
    — Ne sois pas idiot.
    — C’est Lev que tu aimes. »
    Elle le regarda droit dans les
yeux. « Je n’étais qu’une petite paysanne de vingt ans qui venait de
débarquer en ville. Lev m’a séduite avec ses beaux costumes, ses cigarettes, sa
vodka, ses largesses. Il était charmant, beau et drôle. Mais j’ai vingt-trois
ans maintenant et un enfant. Et où est Lev ? »
    Grigori haussa les épaules. « Aucune
idée !
    — Toi, tu es là. » Elle
lui caressa la joue. Il devait la repousser, il le savait, mais il en était
incapable. « Tu payes le loyer, tu apportes à manger à mon bébé. Tu t’imagines
que je n’ai pas compris à quel point j’étais bête d’aimer Lev plutôt que toi ?
Tu crois que je n’y vois pas plus clair aujourd’hui ? Tu ne comprends pas
que j’ai appris à t’aimer ? »
    Grigori la regardait, hébété.
    Ses beaux yeux bleus soutenaient
son regard avec sincérité. « C’est vrai, dit-elle. Je t’aime. »
    II gémit, ferma les yeux et,
capitulant, il la prit dans ses bras.

XX.
Novembre-décembre 1916
    1.
    Ethel Williams parcourut
anxieusement la liste des victimes publiée dans le journal. Il y avait
plusieurs Williams, mais aucun caporal William Williams des chasseurs gallois.
Remerciant silencieusement le ciel, elle replia le journal, le tendit à Bernie
Leckwith et alla poser la bouilloire sur le feu pour préparer du cacao.
    Cela ne voulait pas dire que
Billy soit vivant. Il pouvait très bien avoir été tué au cours des derniers
jours ou des dernières heures. Elle n’arrivait pas à chasser de son esprit
cette journée des télégrammes d’Aberowen, les visages crispés de crainte et de
douleur de toutes ces femmes, des visages qui porteraient à jamais les marques
cruelles de cette nouvelle affreuse. Elle avait honte de la joie qu’elle avait
éprouvée en constatant que Billy n’était pas au nombre des victimes.
    À Aberowen, les télégrammes
n’avaient pas cessé d’affluer. La bataille de la Somme ne s’était pas achevée
en ce premier jour. Tout au long des mois de juillet, d’août, de septembre et
d’octobre, l’armée britannique avait continué d’envoyer de jeunes recrues à
travers le no man’s land se faire faucher par les mitrailleuses allemandes. La
presse criait régulièrement victoire, mais les télégrammes, eux, racontaient
une tout autre histoire.
    Bernie se trouvait dans la
cuisine d’Ethel, comme presque tous les soirs. Le petit Lloyd aimait bien oncle
Bernie. D’habitude, il s’asseyait sur ses genoux et Bernie lui lisait le
journal à haute voix. L’enfant ne comprenait pas grand-chose, mais il avait
l’air content. Ce soir-là, pour une raison inconnue, Bernie était énervé et ne
prêtait pas attention au petit garçon.
    Mildred apparut une théière à la
main. « Tu aurais une cuiller de thé à nous prêter, Eth ?
    — Sers-toi, tu sais où il
est. Tu ne préfères pas une tasse de cacao ?
    — Non, merci, ça me fait
péter. Salut, Bernie ! Alors cette révolution, ça vient ou
quoi ? »
    Le jeune homme leva les yeux du
journal en souriant. Il aimait bien Mildred. Comme tout le monde. « Un
simple petit report de date. »
    Mildred mit quelques feuilles de
thé dans sa théière. « Des nouvelles de Billy ?
    — Pas récemment, répondit
Ethel. Et toi ?
    — Rien depuis une quinzaine
de jours. »
    Ethel, qui ramassait le courrier
déposé dans l’entrée le matin, savait que Mildred

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