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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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bien plus
fidèle que tout ce que rapportait la presse traditionnelle. Maud rédigeait
l’essentiel du journal. Mais Ethel ayant eu l’idée de cette publication,
c’était elle qui se chargeait intégralement de cette page, devenue la plus lue
du journal.
    Ethel s’était vu proposer un
emploi mieux payé au Syndicat national des ouvriers du textile, un travail
d’organisatrice à plein temps, mais elle avait préféré rester auprès de Maud et
continuer à faire campagne.
    Elle parcourut une demi-douzaine
de lettres et soupira. Puis elle se tourna vers Bernie : « On
pourrait penser que les gens se révolteraient contre cette guerre.
    — Eh bien, pas du
tout ! Tu as vu les résultats de l’élection. » Le mois dernier, à la
suite du décès d’un député, des élections partielles avaient eu lieu dans une
circonscription de l’Ayrshire, opposant le général de division Hunter-Weston,
un conservateur qui avait participé à la bataille de la Somme, au pasteur
Chalmers, partisan de la paix. Le militaire l’avait emporté à une majorité
écrasante de sept mille cent quarante-neuf voix contre mille trois cents.
    « C’est la faute des
journaux ! dit Ethel avec dépit. Que peut faire une petite publication
comme la nôtre pour encourager la paix, face à la propagande de l’infecte
presse de Northcliffe ? » Lord Northcliffe, militariste convaincu,
était le propriétaire du Times et du Daily Mail.
    « Il n’y a pas que la presse
en cause, observa Bernie, c’est aussi une question d’argent. »
    Bernie s’intéressait de près aux
questions financières, ce qui était curieux pour un homme qui n’avait jamais eu
plus de quelques shillings en poche.
    « Que veux-tu dire ?
demanda Ethel, saisissant l’occasion de l’arracher à sa morosité.
    — Avant guerre, le
gouvernement dépensait environ cinq cent mille livres par jour, tout
compris : l’armée, la justice et les prisons, l’éducation, les pensions,
les colonies, tout, quoi.
    — Tant que ça ! C’est
le genre de statistiques que mon père a toujours connues par cœur »,
remarqua-t-elle avec un sourire affectueux.
    Il but une gorgée de cacao avant
de poursuivre : « Devine combien nous dépensons aujourd’hui ?
    — Le double ? Un
million par jour ? Ça paraît impossible.
    — Tu n’y es pas du
tout ! La guerre nous coûte cinq millions de livres par jour. Dix fois le
budget normal du fonctionnement du pays. »
    Ethel en resta bouche bée. « Et
d’où tirons-nous tout cet argent ?
    — Nous l’empruntons. Voilà
le problème.
    — Mais la guerre dure depuis
plus de deux ans. Nous avons donc dû emprunter… près de quatre milliards de
livres ?
    — Quelque chose comme ça.
Soit vingt-cinq années de ce que nous dépensions en temps normal.
    — Et comment
rembourserons-nous ?
    — Nous ne pourrons jamais le
rembourser. Si un gouvernement voulait augmenter les impôts suffisamment pour
payer cet emprunt, ce serait la révolution.
    — Qu’allons-nous faire
alors ?
    — Si nous perdons la guerre,
les Américains – qui sont nos principaux créanciers – feront
faillite. Si nous gagnons, nous obligerons les Allemands à payer.
« Réparations », c’est le mot qu’on utilise.
    — Et eux, comment
pourront-ils payer ?
    — Ils mourront de faim. Mais
qui se soucie des perdants ? D’autant que les Allemands ont déjà fait le
coup aux Français en 1871. » Il se leva et posa sa tasse dans l’évier. « Tu
comprends maintenant pourquoi nous ne pouvons pas faire la paix avec
l’Allemagne ? Qui paierait la note ? »
    Ethel était consternée. « Il
faut donc que nous continuions à envoyer nos garçons mourir dans les
tranchées ? Parce que nous ne pouvons pas régler l’addition ? Pauvre
Billy. Dans quel monde vivons-nous !
    — Nous allons le changer,
crois-moi. »
    Espérons-le, pensa Ethel. Bernie
était persuadé qu’il faudrait en passer par une révolution. Elle avait lu des
livres sur la Révolution française et savait que les choses ne se déroulaient
pas toujours comme prévu. Néanmoins, elle était bien décidée à tout faire pour
que Lloyd connaisse une vie meilleure.
    Ils gardèrent le silence un
moment, puis Bernie se leva. Il se dirigea vers la porte, comme s’il
s’apprêtait à partir, puis se ravisa et revint s’asseoir. « Il était
intéressant, cet orateur, hier soir.
    — Oui, dit-elle.
    — Et intelligent aussi.
    — Oui, très

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