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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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tu te mariais et que tu avais un fils, tu pourrais être transféré
où tu voudrais.
    — Vous me gardez à Berlin
pour m’obliger à épouser Monika von der Helbard ? demanda Walter,
incrédule.
    — Je n’en ai pas le pouvoir.
Mais il n’est pas impossible qu’au haut commandement, certains comprennent la
nécessité de perpétuer les lignées aristocratiques. »
    Devant cette duplicité manifeste,
Walter s’apprêtait à protester mais, à cet instant, la voiture quitta la route
pour franchir un portail sculpté. Elle s’engagea dans une longue allée bordée d’arbres
dénudés et de pelouses enneigées qui débouchait sur une demeure immense, plus
grande que tout ce que Walter avait pu voir en Allemagne. « C’est le
château de Pless ?
    — Effectivement.
    — C’est vaste !
    — Trois cents pièces. »
    Ils descendirent de voiture et
entrèrent dans un vestibule aussi vaste qu’une gare, aux murs décorés de têtes
de sanglier encadrées de soie rouge. Un escalier de marbre massif conduisait
aux salles de réception du premier étage. Walter, qui avait passé la moitié de
sa vie dans des demeures somptueuses, trouva celle-ci exceptionnelle.
    Un général s’avança vers eux,
Walter reconnut von Henscher, un ami de son père. « Si tu fais vite, tu as
le temps de faire un brin de toilette, dit-il aimablement mais avec insistance.
On vous attend dans la salle à manger d’apparat dans quarante minutes… »
Il se tourna vers Walter. « Ce jeune homme est sans doute ton fils. »
    Walter claqua des talons.
    « Il est dans les services
secrets, expliqua Otto.
    — Je sais. C’est moi qui l’ai
inscrit sur la liste. » Le général s’adressa à Walter : « Je
crois que vous connaissez l’Amérique.
    — J’ai séjourné trois ans à
notre ambassade de Washington, mon général.
    — Bien. Je ne suis jamais
allé aux États-Unis, ton père non plus. Pas plus que la plupart des hommes qui
sont ici, à l’exception notable de notre nouveau ministre des Affaires
étrangères. »
    Vingt ans plus tôt, au retour d’un
séjour en Chine, Arthur Zimmermann avait traversé les États-Unis en chemin de
fer de San Francisco à New York. Depuis, il était considéré comme un
spécialiste de l’Amérique. Walter se tut.
    Von Henscher reprit : « Herr
Zimmermann m’a demandé de vous consulter tous les deux sur un point. »
Walter en fut à la fois flatté et intrigué. Pour quelle raison le nouveau
ministre voulait-il connaître son avis ? « Mais nous en reparlerons
tout à l’heure. » Von Henscher fit signe à un valet vêtu d’une livrée à l’ancienne
mode, qui les conduisit jusqu’à leurs chambres.
    Une demi-heure plus tard, ils
étaient dans la salle à manger reconvertie en salle de conférences. Parcourant
l’assemblée du regard, Walter s’étonna de découvrir la quasi-totalité des
personnalités les plus influentes d’Allemagne, parmi lesquelles le chancelier
Theobald von Bethmann-Hollweg, un homme de soixante ans aux cheveux presque
blancs et coupés ras.
    La majorité des officiers
supérieurs étaient assis autour d’une longue table. Plusieurs rangées de
chaises inconfortables avaient été disposées le long du mur à l’intention des
hommes de rang inférieur, comme Walter. Un aide de camp fit circuler quelques
exemplaires d’un mémorandum de deux cents pages. Par-dessus l’épaule de son
père, Walter jeta un coup d’œil au dossier. Il vit des diagrammes représentant
le tonnage des marchandises qui entraient et sortaient des ports britanniques,
des tableaux des tarifs d’expédition et du volume des cargaisons, de la valeur
calorifique des repas anglais, et même des calculs sur la quantité de laine
nécessaire à la confection des jupes des Anglaises.
    Ils attendirent deux heures.
Enfin, l’empereur Guillaume fit son entrée en uniforme de général. Tout le
monde bondit sur ses pieds. Sa Majesté, qui venait tout juste de fêter ses
cinquante-huit ans, avait l’air pâle et de mauvaise humeur. Comme toujours, son
bras gauche atrophié pendait le long de son corps, inerte, et il cherchait à le
dissimuler. Walter eut du mal à retrouver l’émotion de joyeuse loyauté qu’il
éprouvait si facilement, enfant, à la vue de son souverain. Il ne pouvait plus
reconnaître en lui le père rempli de sagesse de son peuple. Guillaume II était
de toute évidence un homme ordinaire, complètement dépassé par les événements.
Incompétent,

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