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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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assura Pinski. Il observa Mark en fronçant les sourcils. « Vous
êtes son beau-frère, n’est-ce pas ? »
    Mark lui rendit son papier. « L’homme
que vous recherchez n’est pas là. »
    Pinski sentait qu’il disait la
vérité et cela le rendait fou de rage.
    « Et pourquoi ? Il
habite ici.
    — Lénine n’est pas là »,
répéta Mark.
    Pinski s’empourpra. « Quelqu’un
l’a prévenu ?» Il saisit Grigori par sa tunique. « Pourquoi es-tu là,
toi ?
    — Je suis député du soviet
de Petrograd, je représente le 1 er  régiment de mitrailleurs et
si tu ne veux pas voir le régiment tout entier rappliquer à ton quartier
général, tu as intérêt à ôter tes sales pattes de là. »
    Pinski le lâcha. « On va quand
même jeter un coup d’œil. » Il y avait une bibliothèque près de la table
du téléphone. Pinski sortit quelques livres d’une étagère et les lança par
terre. Il fit signe aux officiers de pénétrer dans l’appartement. « Allez-y,
amusez-vous un peu. »
    3.
    Walter se rendit dans un village
situé sur le territoire pris aux Russes et donna une pièce d’or à un paysan
stupéfait et ravi en échange de ses vêtements : un manteau crasseux en
peau de mouton, une blouse de coton, un pantalon de grosse toile avachie et des
sabots en écorce de hêtre tressée. Heureusement, Walter n’avait pas besoin de
sous-vêtements, car l’homme n’en portait pas.
    Il se coupa les cheveux avec des
ciseaux de cuisine et cessa de se raser.
    Sur un petit marché, il acheta un
sac d’oignons, au fond duquel il dissimula une pochette de cuir contenant dix
mille roubles en pièces et en billets.
    Une nuit, il se macula le visage
et les mains de terre. Vêtu des habits du paysan, son sac d’oignons sur l’épaule,
il traversa le no man’s land, franchit les lignes russes et gagna la gare la
plus proche, où il acheta un billet de troisième classe.
    Affichant une mine agressive, il
répondait par des grognements à tous ceux qui lui adressaient la parole, comme
s’il craignait qu’ils aient des visées sur son sac d’oignons, ce qui était
peut-être le cas. Il portait, bien en vue à la ceinture, un grand couteau,
rouillé mais effilé. Et, caché sous son manteau malodorant, un pistolet
Mosin-Nagant, emprunté à un officier russe prisonnier. Quand, par deux fois, un
policier l’aborda, il se contenta de lui offrir un oignon avec un sourire
stupide ; les deux fois, le policier considéra d’un air dégoûté ce
pot-de-vin minable avant de s’éloigner. Si l’un d’eux avait exigé de fouiller
son sac, Walter l’aurait tué sans hésiter, mais cela ne fut pas nécessaire. Il
prenait des billets pour de courts trajets, s’arrêtait chaque fois trois ou
quatre gares plus loin : un paysan ne parcourait pas des centaines de
kilomètres pour vendre ses oignons.
    Il était tendu, toujours sur ses
gardes. Son déguisement était assez peu convaincant. Si quelqu’un échangeait
plus de trois mots avec lui, il s’apercevrait immédiatement qu’il n’était pas
russe. Il risquait la peine de mort.
    Dans un premier temps, il eut
peur. Mais le deuxième jour, la crainte fit place à un profond ennui. Il n’avait
aucun moyen d’occuper son esprit. Il ne pouvait pas lire, évidemment. Il se
gardait bien d’examiner les horaires affichés dans les gares et regardait à peine
les panneaux indicateurs, la plupart des paysans étant analphabètes. Dans les
trains qui se succédaient et bringuebalaient avec lenteur à travers les
interminables forêts de Russie, il se laissa aller à un rêve éveillé complexe,
imaginant l’appartement dans lequel il vivrait avec Maud après la guerre. Il
serait aménagé dans un style moderne, tout en bois clair et en couleurs
neutres, comme la maison des von der Helbard, à l’opposé du décor sombre et
chargé qui dominait chez ses parents. Tout serait facile à entretenir, en
particulier la cuisine et la buanderie, pour qu’ils puissent se contenter d’un
nombre réduit de domestiques. Ils auraient un bon piano, un piano à queue
Steinway, car ils aimaient jouer l’un et l’autre. Ils achèteraient une ou deux
toiles modernes spectaculaires, d’expressionnistes autrichiens pourquoi pas,
pour horrifier leurs aînés et asseoir leur réputation de couple progressiste.
Ils auraient une chambre claire et spacieuse, dormiraient nus dans un lit mœlleux,
s’embrasseraient, bavarderaient et feraient l’amour.
    Il finit ainsi par

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