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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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avaient jalonné son enfance : la
pendaison de son père, la mort de sa mère devant le palais d’Hiver, le prêtre
qui avait baissé le pantalon de Lev quand il était tout petit, le labeur
harassant aux usines Poutilov. Il voulait une autre vie pour son enfant.
    « Lénine appelle au
soulèvement armé », annonça-t-il à Katerina sur le trajet qui les
conduisait chez Magda. Lénine se cachait toujours, mais inondait le parti de
lettres incendiaires le poussant à l’action.
    « Je crois qu’il a raison,
approuva Katerina. Tout le monde en a marre de ce gouvernement qui parle de
démocratie mais ne fait rien pour faire baisser le prix du pain. »
    Comme toujours, elle exprimait ce
que pensaient les ouvriers de Petrograd.
    Magda les attendait et avait
préparé du thé. « Je suis désolée, il n’y a pas de sucre, s’excusa-t-elle.
Cela fait des semaines que je n’en trouve plus.
    — J’ai hâte d’accoucher,
souffla Katerina. Ce poids m’éreinte. »
    Magda palpa son ventre et déclara
qu’elle en avait encore pour deux semaines environ.
    « Ça a été horrible quand
Vladimir est né, raconta Katerina. Je n’avais pas d’amies et la sage-femme
était une peau de vache, une Sibérienne revêche qui s’appelait Xenia.
    — Je la connais, approuva
Magda. Elle est compétente, mais un peu rude.
    — Je ne te le fais pas dire. »
    Konstantin s’apprêtait à partir
pour l’institut Smolni. Même si le soviet ne tenait pas séance tous les jours,
il y avait en permanence des réunions de comités et de groupes spécialisés. Le
gouvernement provisoire de Kerenski était tellement affaibli que le soviet
était devenu l’autorité de fait.
    « Il paraît que Lénine est
rentré, annonça Konstantin à Grigori.
    — Oui, la nuit dernière.
    — Où habite-t-il ?
    — C’est un secret. La police
n’a pas renoncé à l’arrêter.
    — Qu’est-ce qui l’a décidé à
revenir ?
    — On le saura demain. Il a
convoqué une réunion du comité central. »
    Konstantin les laissa pour
prendre un tramway et rejoindre le centre-ville. Grigori raccompagna Katerina.
Il était sur le point de partir pour la caserne quand elle lui dit : « Je
suis rassurée de savoir que Magda sera là.
    — Tant mieux. »
    Grigori ne pouvait s’empêcher de
penser qu’un accouchement était plus dangereux qu’un soulèvement armé.
    « Toi aussi, tu seras là,
ajouta Katerina.
    — Pas dans la pièce même,
rectifia Grigori, vaguement inquiet.
    — Non, bien sûr. Mais tu
seras à côté, à faire les cent pas, et ça me tranquillise.
    — Alors c’est bien.
    — Tu seras là, n’est-ce pas ?
    — Mais oui. Quoi qu’il
advienne, je serai là. »
    Quand il arriva à la caserne une
heure plus tard, il y régnait une belle agitation. Sur la place d’armes, des
officiers s’efforçaient d’organiser le chargement d’armes et de munitions dans
des camions, sans grand succès : tous les comités de bataillon étaient en
réunion ou s’apprêtaient à en tenir une.
    « Kerenski en a fait une
belle ! annonça Isaak d’un air réjoui. Il prétend nous envoyer au combat.
    — Qui ça, nous ? s’alarma
Grigori.
    — Toute la garnison de
Petrograd ! Les ordres sont tombés. Nous devons remplacer les soldats qui
sont au front.
    — Pour quelle raison ?
    — Apparemment, c’est à cause
de la progression des Allemands. » Les Allemands avaient pris les îles du
golfe de Riga et se dirigeaient vers Petrograd.
    « Foutaises, grommela
Grigori. Ce n’est qu’un prétexte pour tenter d’affaiblir le soviet. » Il
reconnaissait que c’était une manœuvre très intelligente. Si les troupes de
Petrograd cédaient la place à celles qui revenaient du front, il faudrait des
jours, voire des semaines, pour constituer d’autres comités de soldats et élire
de nouveaux représentants au soviet. Pire, les nouveaux venus n’auraient pas l’expérience
des six derniers mois de lutte politique. Tout serait à recommencer. «Qu’en
disent les soldats ?
    — Ils sont furieux. Ils
veulent que Kerenski négocie la paix, pas qu’il les envoie au casse-pipe.
    — Refuseront-ils de quitter
Petrograd ?
    — Je ne sais pas. Ce sera
plus facile s’ils obtiennent le soutien du soviet.
    — Je m’en occupe. »
    Grigori prit une voiture blindée
et deux gardes du corps et traversa le pont Liteïni pour gagner l’institut
Smolni. Ce revers apparent, se dit-il, pourrait peut-être tourner à

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