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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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dans tous ses états. Elle était élégamment
vêtue d’un manteau de tweed et d’un chapeau très sobre, mais elle avait les
cheveux en bataille et les yeux rougis de larmes. « Ma chérie !
murmura- t-il. Que se passe-t-il ?
    — C’est fini. Je ne te
reverrai plus. Oh que je suis malheureuse ! » Elle se mit à pleurer.
    Gus aurait voulu la prendre dans
ses bras, mais le lieu était mal choisi. Il n’avait pas de bureau personnel. Il
regarda autour de lui. Le gardien posté près de la porte les observait.
Impossible d’avoir la moindre intimité. C’était exaspérant. « Sortons,
proposa-t-il. Marchons un peu. »
    Elle secoua la tête. « Non.
Ça va aller. Restons ici.
    — Qu’est-ce qui t’a
bouleversée à ce point ? »
    Elle avait les yeux rivés au sol,
refusant de le regarder en face. « Je dois être fidèle à mon mari. J’ai
des obligations.
    — Je veux être ton mari. »
    Elle leva le visage vers lui et
le déSir qu’il y lut lui brisa le cœur. « Si seulement c’était
possible !
    — Et pourquoi pas ?
    — J’ai déjà un mari.
    — Il ne t’est pas fidèle,
quelle obligation as-tu envers lui ? »
    Elle ignora l’argument. « Il
a accepté une chaire à Berkeley.
    Nous partons pour la Californie.
    — N’y va pas.
    — Ma décision est prise.
    — J’en ai bien l’impression,
en effet », dit Gus d’une voix éteinte. Il était assommé. Sa poitrine
était douloureuse et il avait du mal à respirer. « La Californie, fichtre ! »
    Voyant qu’il se résignait à l’inévitable,
elle reprit un peu son calme. « C’est la dernière fois que nous nous
voyons.
    — Ne dis pas cela !
    — S’il te plaît, écoute-moi.
Je tiens à te dire quelque chose et je n’aurai pas d’autre occasion.
    — Bien.
    — Il y a un mois, j’étais
prête à me tuer. Ne me regarde pas comme ça, c’est vrai. J’avais l’impression d’avoir
si peu d’importance que ma mort ne provoquerait qu’indifférence. Et puis, tu as
surgi sur le pas de ma porte. Tu étais si tendre, si courtois, si attentionné
que j’ai fini par me dire que la vie valait tout de même d’être vécue. Tu m’aimais. »
Les larmes ruisselaient sur ses joues, mais elle poursuivit. « Et tu étais
tellement heureux quand je t’embrassais ! Si j’étais capable de donner
autant de joie à quelqu’un, je ne pouvais pas être complètement inutile. Cette
idée m’a permis de m’accrocher. Tu m’as sauvé la vie, Gus. Que Dieu te bénisse. »
    Il était presque en colère. « Et
moi ? Il me reste quoi ?
    — Des souvenirs. J’espère
que tu les chériras autant que moi. »
    Elle fit demi-tour. Gus la suivit
jusqu’à la porte, mais elle ne se retourna pas. Elle sortit et il ne la retint
pas.
    Quand elle fut hors de vue, il
prit machinalement le chemin du Bureau ovale, avant de changer de direction :
il était trop ému pour affronter le président. Il se rendit aux toilettes,
aspirant à un instant de répit. Heureusement, il n’y avait personne. Il s’éclaboussa
le visage puis se regarda dans la glace. Il vit un homme mince, surmonté d’une
grosse tête : on aurait dit une sucette. Avec ses cheveux châtains et ses
yeux bruns, il n’était pas très beau, mais il plaisait généralement aux femmes
et Caroline l’aimait.
    Ou, du moins, elle l’avait aimé
un moment.
    Il n’aurait pas dû la laisser
partir. Comment avait-il pu la regarder s’éloigner sans réagir ? Il aurait
dû la convaincre de remettre sa décision à plus tard, d’y réfléchir, d’en
discuter avec lui. Peut-être auraient-ils pu imaginer une autre solution. Mais
au fond de lui-même, il savait qu’il n’y en avait pas. Elle avait sûrement déjà
tout envisagé. Elle avait dû rester éveillée au cœur de la nuit, son mari
endormi à ses côtés, à examiner la situation sous tous les angles. Elle s’était
fait une raison avant de venir le voir.
    Il fallait qu’il retourne à son
poste. L’Amérique était en guerre. Mais comment chasser Caroline de son esprit ?
Quand il ne pouvait pas la voir, il passait toute la journée à songer au bonheur
de leur prochaine rencontre. À quoi ressemblerait la vie sans elle ? Cette
perspective lui paraissait déjà irréelle. Que ferait-il ?
    Un employé entra. Gus s’essuya
les mains à une serviette et retourna dans la petite pièce, près du Bureau
ovale.
    Quelques instants plus tard, un
messager lui apporta un câble du consul

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