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La colère du lac

La colère du lac

Titel: La colère du lac Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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soignée dans un endroit spécialisé pour les
     gens comme elle. Le médecin en connaissait un, mais c’était à Québec… et les
     coûts…
    Ernest avait mis de côté un bon montant pour l’implantation de sa fromagerie.
     Sans hésitation mais le cœur brisé, il convint qu’il donnerait
     toutes ses économies pour que ces drôles de docteurs, là-bas, soignent sa
     Rose-Élise. Il fut convenu que d’ici son départ, elle resterait au
     presbytère.
    — N’ayez aucune crainte, monsieur Rousseau, Antoinette, ma ménagère, s’occupera
     très bien de votre femme. Je comprends que vous ne puissiez laisser votre
     ferme.
    — C’est surtout parce que j’ai ben peur de pas être capable de retraverser. Les
     grands froids vont finir par poigner, pis avant que le pont de glace se fasse,
     on en a pour un bon boutte de temps.
    — Vous en faites pas. Je vais garder votre épouse jusqu’à ce que le docteur
     Picard ait tout arrangé.
    — Ça ne devrait poser aucun problème, confirma le médecin. J’ai un de mes
     confrères qui travaille là-bas. Le temps de lui envoyer un télégramme lui
     décrivant l’état de madame Rousseau pis tout sera réglé.
    Les trois hommes étaient assis dans le salon et discutaient, tout en jetant de
     fréquents coups d’œil à la femme qui se laissait docilement dorloter par la
     servante.
    — J’va vous coiffer un peu les cheveux, d’accord ? dit Antoinette, une brosse à
     cheveux à la main.
    La pauvre femme était tout échevelée. « Non mais quelle misère de voir
     quelqu’un rendu de même. Après tout ce qui lui est arrivé, pas étonnant qu’elle
     ait perdu la raison. Voir ses enfants mourir l’un après l’autre, quelle
     pitié… »
    — J’veux des tresses, répondit Rose-Élise en faisant la moue.
    — Oui, oui, Antoinette va vous faire des belles tresses qu’a va attacher en
     couronne sur le dessus de votre tête.
    Rose-Élise tapa dans ses mains de contentement :
    — Oui, oui une couronne !
    — Vous voyez, monsieur Rousseau, ma ménagère Antoinette, elle a le tour. Faudra
     pas vous en faire, dit le curé en se faisant rassurant.
    — J’vois ben, m’sieur le curé… soupira Ernest. Mais, si vous
     pouviez la bénir, même si… enfin vous comprenez ce que j’veux dire, j’serais
     plus tranquille pour son départ.
    — Mais oui mon fils. Je ne pourrai pas la confesser, mais je la bénirai de tout
     cœur.
    — Comme ça, vous la garderez icitte jusqu’à ce qu’a puisse avoir une place à
     Québec ? Mais le voyage, lui ? On peut toujours ben pas la mettre dans le train
     tuseule ? s’inquiéta subitement Ernest.
    — Je voyagerai moi-même avec elle, intervint le docteur. Il y a longtemps que
     je me promettais d’aller visiter ce nouvel établissement. Mon confrère m’en a
     tant parlé. J’en profiterai pour passer le temps des Fêtes à la haute ville. Ma
     famille est encore là-bas, vous savez, il y a si longtemps qu’ils me pressent de
     venir les voir.
    Ce jeune médecin avait bien du courage et du cœur aussi. Venir pratiquer dans
     une région lointaine remplie de pauvres colons ne devait pas être un choix
     facile.
    — Vraiment, docteur, j’peux pas vous demander ça, c’est trop, voulut refuser
     Ernest.
    — Mais non, rétorqua le médecin. Ça va me faire un réel plaisir.
    — Antoinette aussi a de la parenté dans ce bout-là, n’est-ce pas ? demanda le
     curé à sa servante.
    — Oui, monsieur le curé, sur le bord du fleuve, répondit celle-ci.
    — Des petites vacances méritées, ça vous tenterait pas un petit brin ?
     s’informa le curé, les yeux pleins de malice.
    — Des vacances ?
    La ménagère du curé n’en croyait pas ses oreilles.
    — Ben certain que j’aimerais ça ! reprit la femme, excitée. Mais avec Noël le
     mois prochain, vous laisser seul, c’est pas ben ben raisonnable !
    — Allons, allons, je suis un grand garçon, Antoinette, plaisanta lecuré. Puis vous savez bien que mes paroissiens veulent tous me
     recevoir à manger, au point que je soupe souvent deux fois dans une même
     journée, dit le curé en s’esclaffant avant d’insister gentiment :
    — Acceptez, Antoinette. Madame Rousseau semble être si calme avec vous, vous
     avez le tour.
    — C’est sûr que j’aimerais pas que ma Rose-Élise fasse de la misère au docteur,
     intervint Ernest.
    — Bon, ben, puisque m’sieur le curé insiste, c’est d’accord,

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