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La Collection Kledermann

La Collection Kledermann

Titel: La Collection Kledermann Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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impossible d’en distinguer la couleur…
    Sans doute sur son ordre, les laquais ne la regardaient pas. Ils se tenaient un peu en retrait, face comme elle au jardin et obéissaient à un signe ou à une parole que l’observateur ne saisissait pas…
    En dépit du danger qu’il courait, Sauvageol ne parvenait pas à en détacher son regard, cherchant quel âge pouvait avoir cette femme qui peut-être avait été belle. Une impression purement gratuite d’ailleurs.
    Et il resta là à la contempler jusqu’à ce qu’elle eut achevé son repas. Il la vit boire un verre de champagne puis, s’étant essuyé les lèvres, elle sembla donner un ordre. Une infirmière apparut aussitôt, recouvrit son visage de la mantille, offrit à la fois une canne et son bras tandis que l’un des serviteurs écartait la lourde chaise à haut dossier armorié. À petits pas, elles gagnèrent le salon où était le piano dont un valet venait d’allumer les bougies rouges dans leurs chandeliers de cristal.
    Enfin arraché à sa contemplation, Sauvageol se faufila vers la balustrade qu’il franchit d’un bond, se redressa en grimaçant parce qu’il s’était tordu le pied et plongea dans les ombres du jardin, aboutit au mur sur lequel il s’appuya un instant afin de reprendre son souffle et d’apaiser les battements rapides de son cœur… Un vent d’est se levait et le ciel se chargeait de nuages annonçant la pluie. À la villa d’ailleurs on fermait les portes et les volets. L’homme aux chiens n’allait sans doute pas tarder à paraître.
    Avec un peu plus de peine qu’à l’aller il refranchit le mur et regagna la villa Hadriana.
    Debout au bas du perron, Wishbone fumait sa pipe.
    — Bonne promenade ? demanda-t-il. On dirait que vous boitez ?
    — Ça va passer. Je me suis mal reçu en sautant le mur ! Mais ça ira mieux demain, fit-il en s’asseyant sur les marches pour frictionner sa cheville.
    — Pourquoi y être allé sans moi ?
    — Trop risqué à cette heure et plus tard les chiens sont lâchés. Et autant vous renseigner tout de suite, ça n’en vaut pas la peine.
    — Ah non ?
    — Non. Un peu étrange pour notre époque, baroque si vous préférez, mais ce n’est certainement pas sa sœur que notre Borgia de pacotille a installée dans cette maison : peut-être sa mère, ou une tante ? N’importe comment c’est une femme déjà âgée, aux cheveux gris et qui se prend pour la reine d’Espagne.
    Cornélius s’assit à côté de lui, vida sa pipe qui venait de s’éteindre, la tapa sur une contremarche avant de la bourrer de nouveau.
    — Qu’est-ce qui vous le fait dire ?
    Sauvageol décrivit alors la scène véritablement hors du temps qu’il lui avait été donné de contempler : les dentelles noires, la fortune en diamants, le haut peigne planté dans les cheveux argentés, les livrées des valets aux couleurs de l’Espagne.
    — Il doit s’agir d’une vieille aristocrate, une princesse ? que l’on cache parce qu’elle est défigurée et un brin dérangée. À moins qu’elle n’ait choisi de vivre ici. Je crois sincèrement que je n’ai plus rien à faire chez vous, pas plus que Durtal, et si on ne nous avait pas rappelés, je l’aurais demandé. Mais ne vous vexez pas : j’ai apprécié mon séjour auprès de vous. C’était bien agréable mais j’aime aussi mon métier !
    — Vous pensez que nous avons tort, le professeur et moi, de continuer à jouer cette comédie ?
    — Non, car malgré tout il ne faut pas oublier que la Malaspina appartient à ce Gandia-Catannei et s’il y revenait, vous pourriez nous en avertir rapidement. J’ai laissé au professeur un de nos numéros de téléphone d’urgence et avec un avion nous serions vite de retour… Et un conseil d’ami : ne reprenez pas de femme de ménage !
    — Si vous le dites !
    — J’en suis persuadé. Le professeur est tellement plus heureux de rester lui-même sauf quand il se promène dans le jardin. Il est clair qu’il commence à en avoir par-dessus la tête de cette histoire. Non ?
    — Psychologue, hein ?
    — On fait ce que l’on peut. Quant au ménage, Boleslas suffit à la besogne. Et il va avoir l’immense bonheur d’être débarrassé de moi !
    Il partit donc non sans laisser des regrets. Sa gentillesse et son inaltérable bonne humeur en faisaient quelqu’un d’attachant. Sauf, naturellement, pour Boleslas qui ne regrettait pas davantage la femme de ménage et s’empara allègrement de l’aspirateur,

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