Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La confession impériale

La confession impériale

Titel: La confession impériale Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
Vom Netzwerk:
tonsure, à condition que la cérémonie ne se déroulât
pas en public mais dans l’ombre du monastère. Je ne pouvais lui refuser cette
ultime faveur. La cérémonie se déroula au monastère de Saint-Goar.
    Dans les jours qui suivirent, je le fis
conduire en Neustrie, dans l’abbaye de Jumièges, sur une rive de la Seine. La
solidarité familiale ne fut pas vaine : Liutberge et sa famille connurent
volontairement le même sort.
    Je me gardai de
faire subir à la Bohême, en l’absence de ses souverains, une invasion et une
occupation manu militari de Ratisbonne. Comment oublier que cette nation
avait pris l’habitude d’une autonomie autorisée par la mansuétude de mon père
et la mienne ? La lui retirer pour nous conduire en conquérants l’eût
dressée contre le gouvernement et les astreintes que j’allais lui imposer.
    L’ancienne dynastie des Agilolfings n’était
plus qu’un souvenir, mais il s’attachait à ce nom des relents d’indépendance
qui risquaient de susciter des troubles. Je me contentai de faire exiler
quelques officiers palatins, des chefs d’armée, de grands prélats réputés pour
leur fidélité au régime déchu et de les remplacer par des gens en lesquels
j’avais confiance.
    Le changement se fit sans heurts pour le
peuple, comme je pus moi-même le constater par quelques discrètes incursions
dans les villes et les campagnes. Si toutes mes conquêtes s’étaient faites dans
ces conditions, j’en aurais remercié le Seigneur et aurais dormi du sommeil du
juste.

4
    Palais
d’Aix : été 800
    Les préparatifs de
mon couronnement, prévu pour la fin de cette année, ont été endeuillés par un
événement qui a changé le cours de ma vie intime : mon épouse, Liutgarde,
est décédée. Elle m’a fait, durant ces années, oublier la mauvaise ambiance que
la précédente, Fastrade, faisait régner dans ma maison. Elle était depuis six
ans ma compagne, ma conseillère et mon amie.
    Une singulière fatalité semble peser sur ma
famille. Je me retrouve veuf pour la troisième fois et bien décidé à ne pas me
mettre en quête d’une nouvelle épouse, alors qu’il me reste peu d’années à
vivre, si j’en crois les astrologues. Je dois me contenter, pour peupler ma
solitude, de mes servantes, mais n’accomplis l’œuvre de chair qu’en des
occasions de plus en plus rares. Leur présence à mon côté, la nuit, m’exempte
d’une solitude et de cauchemars que je redoute.
    Parenthèse :
    Éginhard :
    — Sire, vous l’ai-je
assez reproché ? Ces habitudes détestables risquent de vous interdire la
porte de saint Pierre. Pensez-vous qu’il soit bon de relater ces débauches
indignes de votre âge et de votre condition ? L’évêque de Soissons,
informé de vos mœurs, s’en est plaint à moi récemment. Il m’a dit…
    — Je me moque
de ce que pense ce vieux débauché qui, il y a peu, se conduisait comme un nabab
dans son sérail. Et il prétend me donner des leçons ! Contente-toi
d’écrire ce que je te dicte et de ne rien omettre. Au travail, mon ami, au
travail !
    C’est à l’un de mes
officiers palatins que je dois ma rencontre avec Liutgarde, fille d’un comte
d’Alamanie, et l’union qui s’est ensuivie.
    À peine sortie de l’adolescence quand elle me
fut présentée, elle était femme déjà et grande (j’aime les femmes de haute
stature), réputée sage et dévote. Sage, elle l’était ; dévote, je fis en
sorte qu’elle ne le fût pas à l’excès.
    Elle n’avait pas, comme Hildegarde et
Fastrade, la chevelure blonde ; la sienne, lisse et profonde, était d’un
châtain foncé. Son visage me rappelait par sa rondeur celui des femmes
d’Italie, la dame Amalia notamment, dont elle avait les yeux étirés et les
lèvres bien ourlées.
    Je retrouvai en elle les qualités mentales de
ma chère Hildegarde : nature souple, charitable, volontiers complaisante
envers nos domestiques. Si je l’avais écoutée, au cours de nos visites aux
pauvres, elle eût accepté que je leur donne, comme saint Martin, la moitié de
mon manteau.
    J’ai passé une
partie du printemps à inspecter nos provinces, de l’embouchure du Rhin à celle
de la Loire, afin de m’assurer de l’état de nos défenses contre les pirates
danois. Liutgarde ayant tenu à m’accompagner, j’y avais consenti sans réserve
mais non sans plaisir.
    Alors que nous nous trouvions sur les rivages
de la Frise méridionale, en bordure des marais, elle avait été

Weitere Kostenlose Bücher