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La cote 512

La cote 512

Titel: La cote 512 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Thierry Bourcy
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leur résistance et quelques salves bien ajustées des canons de 75, les premiers soldats allemands prirent pied dans la tranchée. Célestin vit un grand gaillard braquer sur lui son revolver, il eut juste le temps de dévier le coup de feu d’un coup de la crosse de son fusil puis, baïonnette en avant, il blessa son agresseur à l’épaule. Le type se laissa tomber le long de la paroi, la main crispée sur son bras ensanglanté. Ensuite, ce fut une mêlée sauvage, Célestin crut voir Flachon enfoncer son poignard dans le ventre d’un des attaquants, Peuch traîner Fontaine inanimé vers un renfoncement et Doussac tirer des coups de revolver. Et puis il y eut les renforts, le 111 e régiment d’infanterie vint les sortir d’une situation qui devenait critique. La compagnie réussit à se maintenir dans la tranchée de seconde ligne. Il fallut couper les boyaux de communication avec des sacs de sable pendant que, dans ce qui avait été la première ligne française, les Allemands confortaient leur nouvelle position. Le 111 e releva la compagnie de Célestin : ils étaient restés sept jours au feu.
    La troisième section de la vingt-deuxième compagnie prit son repos au bourg de Saint-Mard. Étiré le long de la route, le village n’avait pas encore trop souffert de la guerre : seules une ou deux toitures éventrées témoignaient d’un duel d’artillerie. Pourtant, la plus grande partie de la population civile s’était enfuie. Il ne restait plus, dans une bicoque flanquée d’un maigre jardin, qu’un vieux facteur en retraite qui radotait sa guerre de 1870, et la propriétaire hors d’âge d’une petite mercerie. Son magasin était envahi par les soldats, soit qu’ils voulussent trouver de quoi réparer leurs vêtements, ou seulement pour se rappeler les jours de paix et le plaisir simple d’aller faire des courses dans une boutique. Célestin, Germain, Flachon, Fontaine et Peuch, devenus inséparables comme les cinq doigts de la main, avaient trouvé refuge dans un hangar à bois au fond du jardin d’une vaste demeure dont tous les volets avaient été fermés. Dans un potager à l’abandon, Fontaine avait découvert un carré de pommes de terre, de quoi bien se caler le ventre si le cuisinier était en retard. Et, de toutes façons, ça ne les dérangeait pas de manger deux fois. Ce n’était pas le bois sec qui manquait, ils se firent un feu autour duquel ils s’assirent. Ils étaient moins bavards qu’à l’ordinaire. L’explosion de la tranchée et la férocité des combats qui avaient suivi les avaient assommés. Ils restaient immobiles, les yeux perdus dans les flammes, à ne penser à rien. Peuch faisait passer son bouteillon rempli d’eau de vie. Le petit Germain but au goulot et tendit la gourde d’alcool à Célestin.
    — Vous pensez à votre enquête, pas vrai ?
    Célestin prit le bidon et but au goulot une rasade d’eau-de-vie qui lui brûla le ventre.
    — Oui, ça m’obsède. Mérange est mort devant moi, son meurtrier était probablement dans la tranchée que nous venions de quitter. Il s’est mis tranquillement au parapet, il a eu tout son temps pour viser et son coup de feu s’est perdu dans la confusion et dans le chaos. Une sorte de crime parfait.
    — Si vous n’aviez pas été là…
    Célestin passa l’alcool à Peuch, à sa gauche, et considéra Béraud. Le jeune homme était en quelques semaines devenu un combattant vif et malin, capable de se sortir avec brio de situations difficiles. Il avait mis tout son talent de petit voleur des rues, toute sa débrouillardise, au service de la guerre. C’était désormais un compagnon sûr et fidèle, et le regard d’admiration qu’il lançait à Célestin toucha le policier.
    — Qu’est-ce que vous allez faire, maintenant ?
    — À moins d’un coup de chance invraisemblable, je ne suis pas en mesure d’identifier le tueur. Je manque d’éléments. Il faut absolument que je rencontre madame de Mérange et son beau-frère, Jean de Mérange. Il y a de toute évidence un contentieux entre eux et le lieutenant.
    — Vous pensez à une histoire de jalousie ?
    — Pour se faire une idée, il faut voir les gens, leur parler. Ici, coincé dans la guerre, je ne peux faire que de vagues hypothèses. Tout ce que je crois, c’est qu’il y a un lien entre l’assassinat du lieutenant et sa famille.
    Une silhouette approchait. Les hommes reconnurent le lieutenant Doussac et firent mine de se lever, il les

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