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La Cour des miracles

Titel: La Cour des miracles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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il nous paraît inutile de détailler les innombrables questions que se posèrent réciproquement la mère et le fils, chacun d’eux oubliant souvent de répondre ; inutile aussi de décrire les touchantes effusions des deux êtres d’élite qui se découvraient, s’essayaient à se connaître, ou plutôt à se reconnaître.
    Disons seulement que Manfred, au bout de ce temps, songea à Lanthenay et annonça à la princesse qu’il allait sortir. Béatrix pâlit :
    – Si j’allais le perdre encore…
    Mais Manfred la rassura d’un sourire et d’un mot.
    – Je ne suis plus l’enfant qu’enlève une bohémienne, dit-il, et je suis de taille à me défendre… maintenant surtout ! Mort-dieu, ma mère, je plains les pauvres diables qui essayeraient de nous séparer !
    Béatrix alors examina son fils pour la première fois.
    Elle vit sa force, sa vigoureuse élégance, sa robuste beauté, et une flamme de fierté monta à son front. Tout lui parut admirable en lui, jusqu’à ce juron familier qui venait de lui échapper.
    C’était bien le digne fils de Ragastens.
    Manfred ne fut guère absent que deux heures.
    Quand il revint, il était accompagné de trois personnes.
    – Ma mère, dit-il à la princesse, voici Lanthenay, mon ami, mon frère de tous les instants depuis mon enfance, celui qui m’a sauvé plusieurs fois la vie… Voici M. le comte de Monclar… Ce vieillard est le père de Lanthenay… Voici M lle Avette Dolet, fiancée de mon ami… je la considère comme ma sœur…
    Béatrix tendit la main à Lanthenay et baisa Avette au front.
    Puis un long entretien s’engagea entre ces personnages, entretien auquel le comte de Monclar seul ne put prendre part.
    Il fut résolu qu’Avette et le comte demeureraient dans l’hôtel, pendant que Manfred et Lanthenay prendraient le chemin de Fontainebleau.
    Puis Lanthenay, Avette et le vieillard furent conduits à des chambres que Béatrix avait ordonné de leur préparer.
    Que dirons-nous de plus ?
    L’aube se levait, et ni Béatrix ni Manfred n’avaient songé à prendre de repos ; il leur semblait qu’ils n’arriveraient pas à épuiser tout ce qu’ils avaient à se dire.
    Il fallut pourtant se séparer.
    Après mille et mille recommandations, Manfred monta à cheval et, accompagné de Lanthenay, prit la route de Fontainebleau.
    La première heure de trot se fit silencieusement, Manfred et Lanthenay se livrant chacun à leurs pensées… Pensées exclusivement riantes chez Manfred.
    – Comment trouves-tu ma mère ? demanda-t-il à Lanthenay.
    Lanthenay tressaillit, arraché soudain à ses pensées qui, elles, étaient toutes de tristesses.
    – Ta mère ? fit-il… elle est telle que j’eusse souhaité la mienne. Ah ! tu es heureux, frère ! Tu as ta mère… moi, je n’ai que le portrait de la mienne. Tu as ton père… moi, je n’ai que l’ombre du mien.
    Et comme Manfred regardait son ami d’un air étonné :
    – Pardonne-moi mon amertume, reprit Lanthenay. Le malheur rend mauvais.
    – Mauvais, toi !… Tu plaisantes… Mais tu dis que tu as le portrait de ta mère ?
    – Oui, un fort beau portrait qui se trouvait à l’hôtel de la grande prévôté… J’y ai été hier, pendant que tu te rendais rue des Canettes.
    – Imprudent !
    Lanthenay haussa les épaules.
    – Nul n’a fait attention à moi, dit-il. J’ai trouvé les domestiques en train de piller l’hôtel en douceur. La… maladie de leur maître les a rendus impudents : « Que voulez-vous, monsieur, m’a dit le majordome, il faut bien que nous soyons payés de nos gages, puisque nous ne savons pas si monseigneur reviendra jamais… » J’ai obtenu pour vingt ducats la permission d’emporter la toile, à condition de laisser le cadre… La toile est maintenant dans la maison du pauvre Dolet.
    Et Lanthenay ajouta :
    – C’est tout ce qui me reste de ma mère.
    Ce fut en devisant de ces choses que les deux amis arrivèrent à Fontainebleau en pleine nuit et qu’ils eurent la rencontre que nous avons racontée.
    Quelques minutes après avoir si vivement brûlé la politesse au roi, ils mettaient pied à terre devant l’auberge du
Grand-Charlemagne.
    Le roi était demeuré stupéfait, et de la réponse des deux inconnus, et de leur brusque fuite. Il ne fallait pas songer à essayer de les retrouver.
    – Qui diable peuvent être ces deux malandrins ? murmura-t-il.
    – Malandrins est bien le mot, sire, dit une voix près de lui.
    François

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