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La couronne et la tiare

La couronne et la tiare

Titel: La couronne et la tiare Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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d’une épée, mais je sens que si je te compagne, je me condamnerai à mort. Tu attires les malfaisances !
    Il avait insisté sur la dernière phrase comme pour, justement, exorciser ces malefortunes alors que le sang montait aux joues de Tristan. Un grand appétit d’action le dominait d’un coup. Mais quelle espèce d’action ? Il n’en savait tien. Et pour quel résultat ?
    – Besoin de toi, dit-il.
    Tiercelet soupira. Tristan glissa sur quelques pavés verglacés. Il se sentit empoigné par un coude et contraint à revenir sur ses pas.
    – Besoin de moi !
    La voix du brèche-dent était changée. Sans se vouer à devenir la victime d’une amitié déjà singulière entre un noble et un manant, un chevalier et un ancien Jacques, il semblait en accepter les risques une fois encore. Il aimait l’action, lui aussi. Cette passion flambait, s’apaisait, se ravivait à chaque événement, nourrie par une espèce d’ostentation et par une sorte d’oubli de soi-même, la jouissance complète du mouvement et peut-être du meurtre.
    – Je ne te dis pas oui. Je ne te dis pas non. D’ailleurs, tu n’es pas prêt pour une chevauchée. On en reparlera… Mais regarde ! Les maisons sont toutes closes. Les gens flairent la présence des malandrins… Espagnols ou routiers, point de différence.
    Tristan n’osa réitérer sa proposition. Deux jours plus tard, Paindorge qui s’était rendu en Avignon pour confier, à un bourrelier, les étrivières d’une selle destinée à Tiercelet, annonça qu’il avait rencontré Jean d’Artois.
    – Toujours aussi content de lui, messire.
    Tristan, occupé à une partie de dés avec Tiercelet, leva enfin la tête :
    – Que t’a-t-il dit ?
    – Il m’a demandé où vous étiez… J’ai fait le sourd. Comment vous alliez. Je me suis félicité de votre guérison. Il m’a dit que le roi s’était inquiété de vous.
    – Ah ? fit Tristan, balançant entre l’incrédulité et la satisfaction. Il sait que j’existe toujours. Même si je lui ai infligé un de cevenent 77 sur le champ clos de Villeneuve, peut-être se dit-il qu’il peut encore m’employer… ce que je crains !
    Villeneuve, justement, dit Paindorge. Le comte m’a dit que vous feriez bien de vous y rendre lundi prochain, à la relevée 78 , pour y assister à un conseil important. Vous pourrez, ensuite, repartir pour Paris informer le dauphin de ce qui s’y sera dit.
    Tristan fît sauter les dés dans sa paume tout en réservant sa réponse. Le roi, le dauphin, le dauphin et le roi. Il fallait qu’il cédât sa place.
    D’autres chevaliers pouvaient lui succéder. Il dit cependant :
    – J’irai.
    Ensuite, invitant Tiercelet, d’un clin d’œil, à cesser une moue de désapprobation, il reprit la partie.

IX
     
     
     
    L’hôtel du roi Jean II, au cœur de Villeneuve, était évidemment somptueux. Tristan n’en vit que les dorures tant il y faisait sombre : bien qu’un ciel de plomb pesât sur la journée, on avait négligé d’allumer les chandelles.
    Il était arrivé le second, précédé de quelques enjambées par un Boucicaut dont l’humeur atrabile et glacée semblait la conséquence du temps maussade.
    – Content de vous voir debout, Castelreng !
    Et le vieux maréchal avait disparu derrière une tenture. Il connaissait la demeure. Bientôt, Tristan avait tendu l’oreille aux échos d’une conversation qui, d’enjouée, avait dégénéré.
    – C’eût été folie, sire, que de persister dans vos intentions ! avait déclaré Boucicaut.
    Quelles intentions ? Le mariage absurde ou chimérique avec Jeanne de Naples ou quoi d’autre ?
    Le maréchal était le contraire d’un homme curial (300) . On disait qu’il avait appris à jouter à Jean II et qu’il le tutoyait parfois brièvement lorsqu’ils discutaient a parte. C’était son privilège supplémentaire. Tandis que les autres ne l’approchaient que la bouche pleine de formules melliflues, le roi acceptait cette familiarité : elle le rajeunissait sans que Boucicaut parût sentir sur ses épaules, telles des mains familières, le fardeau des années périlleuses ou non.
    Votre ainsné fils, le dauphin, avait réprouvé, Dieu merci, cette intention. Vous ne devez avoir qu’un seul dessein : votre rançon. Elle est énorme, sire, et n’est point acquittée. Je crains que vous ne dussiez repartir pour Londres plus tôt que prévu… Le Pape a changé. Son prédécesseur vous était acquis. Je

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