Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La couronne et la tiare

La couronne et la tiare

Titel: La couronne et la tiare Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
Vom Netzwerk:
redoute qu’il n’en aille différemment avec ce moine de chez nous qui m’a-t-on dit, veut réintégrer la papauté dans Rome.
    – Croyez-vous, le Meingre, que je suis venu en Avignon pour saluer seulement le nouveau Saint-Père et attendre la venue de deux souverains ? J’ai commencé à m’entretenir de ma rançon avec Sa Sainteté. Elle atermoie, ce dont je ne saurais la blâmer. Mais je la convaincrai !
    Las de son immobilité, certain de perdre son temps, Tristan s’éloigna vers la porte d’entrée.
    Des hommes poussèrent l’huis : Artois et Maignelet.
    – Le bonjour, Castelreng !… Heureux de vous revoir.
    Le gros Tancarville entra, puis trois évêques mitrés, Dammartin et deux écuyers ; d’autres prélats, des chevaliers de Langue d’Oc, Jean de Neuville et un moine, le museau bas sous sa cuculle.
    – Excellent estekis contre ce Gozon, Castelreng, dit Guy d’Azai au passage. Tous ont oublié l’esclandre chez le Pape pour conserver en mémoire la façon dont vous avez atterré ce géant !
    – Par ma foi, je vous sais bon gré de me le dire.
    Tristan recouvra son sourire. Il lui plaisait d’être salué. Il éprouvait une satisfaction profonde à se sentir admis parmi les fidèles de ce petit cénacle : sa personnalité s’en trouvait rehaussée.
    Lorsque Boucicaut se montra et salua, il y eut un murmure. D’un geste, le maréchal invita les prélats puis les hommes de guerre à s’asseoir sur les faudesteuils disposés le long des murs. Alors des conversations feutrées s’engagèrent, percées çà et là par l’accent chantant des chevaliers du Midi, plus langagiers que ceux du Nord.
    Un huissier apparut, quelque peu engoncé dans une cotte gambaisée d’azur privée de lis et du moindre ornement.
    – Messeigneurs et messires, le roi !
    On interrompit les parlures pour se lever et s’incliner à la venue de Jean II. Le geste lent, le visage indéchiffrable, il invita ses hôtes à se rasseoir et demeura debout, immobile et proche d’une chaise curule dont l’ivoire se mit à briller lorsque deux serviteurs apportèrent des candélabres qu’ils disposèrent sur des bahuts jusque-là restés dans l’ombre.
    – Satisfait de vous voir… et vous aussi, Castelreng.
    Tristan sentit des regards s’agglutiner sur sa personne, les uns moqueurs ou suspicieux, les autres indifférents.
    – Vivant ! poursuivit Jean II. Quel tençon 79 … J’en conserverai souvenance !
    Ce n’était pas un tençon mais un combat à outrance, sans vainqueur ni vaincu comme celui d’Archiac et de Pommiers. Cependant, puisque Jean II le définissait ainsi et se réjouissait d’y avoir assisté, les expressions des visages changèrent : Tristan ne compta plus que des admirateurs.
    – Mais nous sommes point céans, Castelreng, et vous, messeigneurs et messires, pour parler d’une appertise (301) sans précédent… Je vous sais bon gré, chevalier, d’avoir maintenu très haut l’honneur de nos armes…
    S’agissait-il d’un pluriel de majesté ou bien Jean II, ex abrupto, séparait-il les nobles hommes en deux groupes : ceux du Nord comme au temps de la croisade contre les Albigeois et ceux du Midi ? Trapu et comme gêné aux emmanchures de son pourpoint de soie d’azur semé de lis, le front bosselé, l’œil étincelant sous un sourcil oblique, il se voulait, comme toujours, d’une éloquence homilétique. Or, déjà, il lantiponnait.
    – Un chevaucheur de Waldemar est arrivé hier. Le roi du Danemark approche. Il sera parmi nous au milieu du mois prochain. Le roi de Chypre nous rejoindra en mars… Voilà ce que j’avais à vous dire.
    « Est-ce tout ? se demanda Tristan. Nous savions cela ! »
    Le roi se détourna vers son siège d’ivoire. Derechef, il hésita à s’y asseoir et se mit à marcher au milieu de la salle, entre ses chevaliers et les évêques, heureux de se sentir entouré d’attention, sinon de respect. Heureux de taper du talon sur les grandes dalles d’un échiquier rouge et noir où son ombre grandissait et rétrécissait selon qu’il s’approchait ou s’éloignait des sources lumineuses.
    Un scribe apparut, en robe noire, coiffé d’un chaperon sombre, l’écritoire sous le bras, portant son encrier comme il l’eut fait d’une fleur. Jean II lui désigna un siège, près de Boucicaut.
    – Nous n’attendions plus que vous.
    – Ma chambre est froide, sire. Mon encre y avait gelé.
    Le roi balaya cette explication et l’œil

Weitere Kostenlose Bücher