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La couronne et la tiare

La couronne et la tiare

Titel: La couronne et la tiare Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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roi.
    – A-t-elle pour lui de l’aversion ?
    – Ils semblaient bons amis, mais c’est Jaime de Majorque qu’elle a choisi, ce que vous devriez savoir.
    – Parfait… Elle est jeune encore. Les beaux enfants que le roi lui eût faits !
    Ainsi se résumait l’essentiel souci du prince. Il pouvait, d’une allusion, se moquer d’héritiers qui ne naîtraient jamais. Il oubliait ceux qu’il avait conçus avec son épouse : une race de malades.
    « Lui avec sa grosse pote (308) et le pus qui lui coule de son bras… Des filles laides, mortelles avant leur temps 83 … Il veut un fils. In cauda venenum (309)  ! Pauvre Jeanne de Bourbon ! Il lui transmet son mal en la foutant quand il s’en sent la force. »
    –  Mon père doit être marri, si j’ose dire.
    La trouvaille était simplette : le dauphin se frotta les mains avant de replonger sa dextre malade au chaud contre sa poitrine.
D’après ce que j’ai lu en hâte, le roi n’est guère accort (310) avec les Espagnols.
Hélas !
    Le dauphin hésita, se remit à marcher. Il allait lourdement, d’un pas de pèlerin, et il semblait qu’il eût perdu le fil de ses pensées.
    – Nous avons l’Angleterre contre nous. Faut-il aussi que nous ayons les Espagnols ?
    Tristan ne se sentit point enclin à répondre. D’ailleurs, le prince Charles ne se fût guère emberloqué (311) de son opinion.
Il faut dire que le roi Pedro de Castille est un malandrin. Qu’en pensez-vous ? Parlez résolument !
    Tristan s’inclina :
    – D’après ce que j’ai appris, monseigneur, Enrique de Trastamare ne vaut rien. Les gens de la Langue d’Oc l’ont en détestation.
    – Bah ! Il s’assagira et ses hommes aussi.
    « Plus il s’élève, plus il a courte vue ! »
    –  Vivement l’été ! grommela le dauphin en se frottant les mains plus vigoureusement que la première fois. Malgré tout ce bois qui flambe près de nous, le froid me paraît plus audacieux que jamais. Je songe… à la foire du Landi. Quand il y fait beau, il fait beau le reste de l’année. Redoutez-vous le froid, Castelreng ?
    – Point trop. L’an passé, il a plu à la foire du Landi (312) . Et nous souffrons du mauvais temps… Les terres sont gelées, les récoltes seront mauvaises.
    – Et le commun, les loudiers qui souffriront de la disette nous accuseront de leurs malheurs… Que vous a-t-on dit de Chandos ?
    – Rien, monseigneur.
    – Il m’a fait réclamer ses trente mille écus d’or. Audrehem les lui a-t-il versés ?
    – Si ce n’est fait, cela ne saurait tarder.
    « Sans doute les a-t-il conservés dans son escarcelle ! »
    –  Avez-vous rencontré des routiers en chemin ?
    – Non, monseigneur… ou plutôt quelques-uns.
    – Pour un homme qui, comme vous, s’est sorti de Brignais où ces démons furent des milliers, quelques- uns n’ont pu vous effrayer. Mais je suis rassuré : messires Bertrand Guesclin et Arnaud de Cervole sont décidés à nous débarrasser de cette vermine !
    « Il faut, enragea Tristan, que je revienne à Paris, que je sois au palais royal et dans cette Grosse-Tour pour que je doive ouïr ces deux noms ! »
    Il pouvait se regimber, il ne s’en priva pas :
    – Ces quelques routiers, monseigneur, avaient pour chef l’Archiprêtre !
    Le dauphin sourcilla.
    Que me dites-vous là ? Oseriez-vous comparer ce bon serviteur de la Couronne et de la France à ces malandrins que nous allons… évacuer ?
    Tristan s’inclina :
    – Je ne compare pas, monseigneur : je vous dis les faits. Après qu’il eut assiégé longtemps le château de Vitteaux-en-Auxois avec ses Bretons et ses Gascons qui d’ordinaire, se complaisaient avec les Anglais…
    – J’ai ouï parler de ce siège. Ce châtelet appartenait à Hugues et Louis de Chalon-Arlay…
    – J’en suis passé tout près et dans une auberge, on m’a conté cette affaire… Ce qui importe, à mes yeux, c’est ce qui s’est passé lors de ce siège.
    – Ah !… Et que s’est-il passé ?
    Les Bretons et les Gascons sont allés gobelotter à Villaines-en-Duesmis… là où, je l’ai appris, la Cour de France entasse les vins du roi…
    Le dauphin avait suspendu sa marche. Il avait compris. Il se tourna, un peu plus pâle, vers son visiteur :
    – Ils ont osé…
    Ils ont tout bu, monseigneur.
    – Tancarville ne m’en a rien dit !
    Le maréchal n’a point voulu vous attrister (313) .
    Soudain la grosse main et la petite se joignirent à plat

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