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La croix de perdition

La croix de perdition

Titel: La croix de perdition Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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est si… indemne.
    Hermione s'étonna du réconfort que lui procurait cette confidence faite à une inconnue qu'elle n'appréciait pas.
    – Je vois.
    – Vraiment ? tenta d'ironiser Hermione, sans grand succès.
    – Si fait. Indemne de taches, indemne de cicatrices. C'est bien cela ?
    – Seriez-vous devin ?
    – Non pas. Observatrice, plus simplement.
    Toujours accroupie devant le feu, Hermione tourna la tête vers la femme, attendant la suite.
    – Parmi les cinq personnes présentes en l'abbatiale, une seule ne comprenait pas ce qu'elle découvrait. Plaisance de Champlois. Une seule ne s'était pas assez frottée aux hommes pour se convaincre qu'ils sont capables de tout, notamment du pire. On m'a confié que madame notre mère était arrivée encore enfante en l'abbaye. Elle est donc vierge de véritables cicatrices, celles qui vous lacèrent l'âme et suintent à jamais. Oh, je ne doute pas qu'elle les sache, qu'elle connaisse leur existence, veux-je dire. Cependant, entre savoir et ressentir…
    – Et vous, qu'en connaissez-vous ? jeta Hermione que l'aigreur gagnait.
    – Bien plus que vous ne le supposez, contra Mary d'un ton cordial. Toutefois, c'est une longue histoire et il ne me sied pas de vous la conter. Revenons, je vous prie, à notre… déplaisante découverte, proposa la nouvelle apothicaire en tendant le bras afin de récupérer le gobelet d'infusion que lui offrait Hermione. Avez-vous gagné en compréhension ?
    Hermione de Gonvray s'installa à ses côtés et hésita avant d'admettre :
    – À la vérité, tant de choses me paraissent insensées…
    Son menton reposant dans l'une de ses paumes, Mary de Baskerville la fixait de son dérangeant regard myosotis.
    – … la croix de sang inversée, le pentacle évoquant la sorcellerie, le satanisme, mais l'utilisation d'un bien vulgaire fer à repasser.
    – Tout juste, approuva l'Angloise. Que veut-on nous faire accroire ? Qu'il s'agit d'un meurtre démoniaque ? Pourtant, rien dans la façon dont a été tuée Blanche n'évoque une sorte de sacrifice. Tout au contraire. On y perçoit la rage, la haine, bref, les souvenirs, qu'ils aient ou non été partagés par la victime. C'est pourquoi je doute que le but de l'assassin ait été de nous aiguiller vers une fausse piste de sorcellerie. À moins d'imaginer qu'il soit imbécile. Sinon, il aurait choisi une manière plus symbolique de donner la mort, et certainement pas un fer à repasser qui sent un peu l'improvisation. Au demeurant, ce fer pose une épineuse charade. Si c'est un homme qui a hissé le cadavre alourdi du chandelier suspendu, il faut alors supposer qu'il est de belle force. Si tel est le cas, pourquoi n'avoir pas simplement étranglé sa victime ou lui avoir heurté violemment la tête contre les dalles du sol ou les murs ? Pourquoi ne pas lui avoir brisé les vertèbres et avoir opté pour un fer qui, dans les mains d'un homme, risque de surprendre ?
    Hermione s'étonna :
    – Songeriez-vous qu'une femme ait été capable de…
    – Tuer ? À l'évidence. Hisser de la sorte sa victime ? C'est exclu. Même en imaginant ses forces décuplées par la fureur.
    – Si ce n'est ni un homme, ni une femme, ni une puissance des Ténèbres, qu'est-ce ?
    – Souvenez-vous de ce que je vous ai conseillé. Lorsque les possibilités les plus vraisemblables sont épuisées, c'est que l'improbable, voire l'impossible, est vrai.
    Un frisson hérissa Hermione qui murmura :
    – Ils, ou elles, étaient plusieurs.
    – C'est également la conclusion à laquelle j'en suis arrivée.
    Hermione hocha la tête, songeuse :
    – Vous évoquiez plus tôt l'attitude troublante de monsieur de Villanova… N'est-il pas bien étonnant qu'il ait d'abord, en grande discrétion, examiné le cou de Blanche alors que, à l'évidence, les coups mortels avaient été portés au crâne ?
    Mary de Baskerville frappa de satisfaction dans ses mains avant de s'exclamer :
    – Oh, je sens que notre collaboration sera fructueuse, car je n'avais pas remarqué cela. En revanche, son manifeste désir de nous donner raison à chaque nouvelle hypothèse m'a certes flattée, mais grandement surprise… Tout comme sa stupéfaction, son inertie lorsque nous avons découvert le corps de Blanche… Allons… Il s'agit d'un prestigieux médecin et je doute que la vue d'un cadavre l'impressionne encore. Or, il connaissait l'identité de la morte, grâce aux déclarations de Thibaude, avant de

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