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La danse du loup

La danse du loup

Titel: La danse du loup Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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d’amour sorti de ma bouche. Nous nous esbouffâmes au même moment et nous jetâmes, ivres de joie, dans les bras l’un de l’autre.
     
     

     
     
    C’est à cet instant précis que le cri que je dus lancer dans mon sommeil me réveilla en sursaut. J’étais recroquevillé, grelottant sur le lit à courtines de la chambrette que je partageai avec mon compain l’écuyer Arnaud de la Vigerie, près du logis seigneurial, dans une tour située entre la haute et la basse-cour.
    Pendant mon sommeil agité, j’avais malencontreusement rejeté les couvertures en peaux de bête en me tournant et me retournant pendant mon sommeil.
    J’écartai promptement les tentures de toile censées me protéger pendant la nuit des vents coulis, me dressai séant, passai une main dans mes cheveux courts et ébouriffés, regardai désespérément autour de moi. Je quêtai la damoiselle blanche, la petite fée aux alumelles. Point de dame blanche.
    Avant de poser mes pieds sur le ventre d’Arnaud qui, en sa qualité de second écuyer du baron de Beynac, dormait dans le lit à tiroir situé sous le mien, je me penchai ; Arnaud n’appréciait point d’être pris pour un marchepied et me menaçait toujours en ces occasions d’occuper le lit du dessus.
    Mais le tiroir à roulettes dans lequel était enchâssé son châlit était presque fermé. Seule une partie de la paillasse avait glissé sur le sol, manifestation d’une précipitation inhabituelle de sa part. Arnaud, mon compain et meilleur ami, était connu de tous pour sa coquetterie et un sens du désordre qui étalait son insouciance aux yeux des lingères. Point d’Arnaud. Il avait découché. Moi aussi, mais autrement.
    Les couvertures de ma couche avaient glissé. Le drap du dessus s’était répandu sur le sol, comme un suaire blanc sur le corps d’un défunt. Les peaux de bête jonchaient le plancher. Le feu, dans la cheminée, s’était éteint faute de mains et de bois pour en entretenir la combustion.
    Les grandes chandelles s’apprêtaient à rendre leur dernier soupir. À leur lumière vacillante, j’aperçus quelques alumelles soufrées et un briquet à étoupe sur les lattis du plancher.
    J’étais presque nu comme un ver et grelottai sous ma chemise de nuit, le corps tremblant et ruisselant, couvert de sueurs froides de la nuque aux pieds. La dame de mon cœur, la gente fée aux alumelles avait disparu. Mon rêve devint cauchemar.
    Impétueux comme je l’étais, mon sang ne fit qu’un tour. Je décidai de partir incontinent à sa recherche. J’ouvris précipitamment les volets intérieurs du fenestrou de la chambrette, basculai le loquet pour ouvrir les vitraux sertis de plomb et jetai un regard au dehors. Un air glacial s’y engouffra, me mordit le visage et me fouetta le corps de mille vergettes.
    Dans cette nuit de pleine lune, la basse-cour était recouverte d’une fine pellicule blanche qui s’épaississait d’instant en instant. Il neigeait. De légers tourbillons se formaient sous un vent venu du nord.
    J’enfilai mes braies, oubliai mes ablutions matinales, laçai mes chausses, choisis mon meilleur pourpoint, le plus chaud, le plus épais, attrapai dans le coffre mon surcot le plus ample. Un peu élimé, certes, mais il ferait l’affaire.
    Je plongeai mes pieds dans des bottes fourrées (un don du tanneur de Castelnaud à qui j’avais rendu un menu service), sans lacer mes éperons. Je ceignis mon épée d’estoc cette fois, sans oublier de rengainer le braquemart dans son nouveau fourreau, attrapai au vol un mantel en peau de loutre que le baron de Beynac m’avait offert un jour de bonté, et glissai ma bague au doigt (je la posais toujours sur la table pendant la nuit).
    J’ouvris la porte de la chambrette et dévalai quatre à quatre les marches de l’escalier. Toujours à jeun, mais le sang chaud et le cœur bouillonnant.
     
    Sitôt parvenu près des écuries, à l’angle d’un passage, une main ferme s’abattit sur mon épaule. Je sursautai vivement, portai la main à la garde de mon épée et me retournai pour me retrouver soudain nez à nez face au tout puissant seigneur des lieux.
    Mon maître, le baron Fulbert Pons de Beynac, se dressait devant moi, revêtu d’un long mantel de martre zibeline de couleur sable, d’un noir d’autant plus inquiétant qu’il était moucheté de blanc par quelques flocons de neige, ici et là.
    La clarté forte et jaune d’une torchère fixée sur un support à l’angle du mur

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