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La Fausta

Titel: La Fausta Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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entière, changeant de destination et de tactique, se préparait à donner l’assaut à la chapelle.
    Croasse chercha, éperdu, un trou de souris où se fourrer, et parcourut la chapelle dans l’obscurité, se heurtant aux bancs, aux sièges, qui dès lors devinrent des ennemis ; la chapelle avait été envahie, toute une armée aux trousses du seul Croasse… Il sentit son épouvante se décupler, et cette épouvante dépassant les limites, il devint brave, empoigna une chaise et se défendit. Alors ce fut une bataille extravagante du gigantesque Croasse contre des ennemis absents. La chaise au bout de ses longs bras faisait de terribles moulinets.
    — Encore un par terre ! hurlait-il. Lâches ! Cent contre un !… Vlan ! un autre qui tombe ! A moi ! Au secours !… Grâce, messieurs ! au meurtre, au truand !…
    Croasse, dans cette lutte fantastique contre rien, reculait. Soudain, il tomba tout de son long ; au même instant, une décharge d’arquebuses éclata au loin. Le bruit de l’arquebusade lointaine continua à surexciter sa terreur ; il se cramponna à un anneau de fer que ses mains rencontrèrent, et il s’arc-bouta à cet anneau comme un noyé s’accroche au fétu de bois. Or, à force de s’arc-bouter et dans les mouvements spasmodiques de sa frayeur, Croasse constata tout à coup que la dalle à laquelle était scellé l’anneau se soulevait.
    Alors, avec la force de la panique, il acheva de soulever cette dalle ; un trou béait ; toujours convaincu qu’il avait des légions à ses trousses, affolé par le bruit de l’arquebusade, Croasse s’engouffra dans ce trou ; jamais lièvre ne se terra avec autant de précipitation ; ses pieds touchèrent les marches d’un escalier de pierre et, sans même songer à replacer la dalle pour protéger sa fuite, il descendit en hurlant ses appels et ses cris de miséricorde.
    Une sorte de long boyau s’ouvrait devant lui. Il se précipita. L’obscurité était profonde, absolue. Où aboutissait ce souterrain ? Savait-il seulement qu’il se trouvait dans un souterrain ?… Croasse courut à perdre haleine et le bruit de ses pas répercutés lui prouva que les ennemis acharnés continuaient à le poursuivre. Soudain son front heurta contre quelque obstacle. Croasse eut la sensation d’avoir reçu sur le crâne un coup de masse d’armes. Il tomba et, s’abandonnant à son triste sort, s’évanouit…
    Pendant cette mémorable bataille de Croasse dans la chapelle, Picouic avait continué sa course, et ce ne fut qu’en arrivant au moulin qu’il s’aperçut de la disparition de son compagnon.
    — Le lâche a fui ! Ah ! Croasse, tu nous déshonores !…
    Et comme Picouic ne voulait pas être déshonoré, il raconta à Pardaillan que Croasse s’était embusqué au pied du sentier pour tenter une diversion.
    — Je fusse bien resté près de lui pour le soutenir, ajouta-t-il, mais il fallait vous prévenir de l’arrivée de l’ennemi.
    Pardaillan fut convaincu que Picouic avait eu peur et que Croasse était pétri de bravoure. Le chevalier prit aussitôt ses dispositions et rassembla tout son monde dans la grande salle : c’est-à-dire le meunier, trois garçons meuniers, dix muletiers, ce qui, en comprenant le duc d’Angoulême et Picouic et lui-même, portait à dix-sept le nombre des défenseurs du moulin. Quant aux deux ou trois femmes du moulin, elles s’étaient renfermées dans une salle donnant sur les champs.
    M. Peretti suivait de l’œil toutes les évolutions du chevalier. Une dernière hésitation se lisait sur le visage du vieillard. La nouvelle de l’approche de cette bande armée signalée par Picouic l’avait fait pâlir. Mais cette pâleur n’était nullement provoquée par la frayeur.
    Pardaillan venait de faire sortir sa troupe. On entendait les pas des hommes de Guise qui montaient le sentier. Bientôt, on distingua leurs ombres confuses.
    « Ce jeune homme est-il un traître ? réfléchissait M. Peretti. Ce Pardaillan est-il un envoyé de Guise ?… Je vais le savoir dans un instant… Ma destinée et celle du royaume de France sont dans les mains de cet inconnu… Si c’est un traître, mes millions sont à Guise… Guise est roi… et moi… prisonnier, peut-être !… Quelle aventure ! En quels temps vivons-nous, Seigneur !… Par le sang du Christ, nous verrons bien !… Le vieux gardeur de pourceaux a plus d’un tour dans son sac !… »
    Pensif, il alla s’accouder contre les

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